Un camouflet politique pour le maire de Bayonne

L’enquête publique pour l’urbanisation du Sequé IV a débouché sur un avis défavorable. C’est peu commun. Mais il faut souligner l’attention portée par la commissaire enquêtrice aux arguments des opposants, et son travail de déconstruction de la stratégie urbaine de la ville à travers de nombreux échanges argumentés avec le maître d’ouvrage.

Un avis n’est qu’un avis

Un avis défavorable est rare dans une enquête publique pour la mise en conformité d’un plan d’urbanisme (MECDU). Mais il ne bloque pas le projet. Le maire de Bayonne et président de la CAPB, maître d’ouvrage, peut renoncer. Comme le souligne le rapport d’enquête, un nouveau PLUi (Plan Local d’Urbanisme intercommunal) est en cours d’élaboration, et où est l’urgence quand le Sequé III n’a pas commencé à sortir de terre ? Etchegaray peut, à l’inverse, considérer que son autorité politique est en cause, et décider de passer en force avec l’accord du Préfet. Il peut proposer au conseil communautaire d’adopter la mise en conformité, en motivant son rejet de l’avis défavorable.

Quel que soit le choix d’Etchegaray, la perspective d’un débat sur le PADD (Plan d’Aménagement et de Développement Durable), dès juin prochain au conseil communautaire, ouvre une fenêtre d’opportunité aux opposants pour prolonger leurs propositions, en s’appuyant sur les conclusions de l’enquête publique. Le PADD est préalable aux zonages et règlements du PLUi, dont l’adoption doit intervenir fin 2025. C’est un dossier à ne pas laisser refroidir.

Le Sequé IV est pour l’instant un terrain libre de constructions, à l’exception d’une seule maison à son extrémité nord-est. Il est le long du chemin de Loustaouanou, en face des bâtiments qui vont de l’EPHAD à la maison de quartier (le Sequé I). Au nord-ouest, la zone d’activités Saint-Etienne dont il devait être le prolongement. A l’est, le Sequé II. Le Sequé III (en limite des I et II) attend ses constructions depuis 2019.

On peut imaginer que le Sequé IV soit reclassé en zone naturelle (N), voire agricole (A) ce qu’il fut par le passé. On peut imaginer aussi une zone mixte telle que proposée par plusieurs contributions à l’enquête, avec du maraîchage en permaculture et des « tiny houses ».

Sur le registre d’enquête

La mobilisation pour contribuer à l’enquête publique sur le registre dématérialisé s’est avérée plus faible que lors de la précédente, en 2019, avec 42 contributions seulement cette année. Pour l’enquête Sequé III, une grande partie venait des habitants du Sequé. Mais une fin de non recevoir avait été opposée aux remarques et propositions des habitants, de quoi les démotiver pour la suite. Le caractère répétitif du dossier a certainement aussi contribué à la démobilisation.

En fait, la participation de 2023 a même été boostée par un mode original d’intervention : l’utilisation d’une plate forme (« Risefor ») comme démultiplicateur d’une contribution. Cette plate forme (écolo, de gauche) sert pour différentes pétitions et autres.

Ici, elle a été utilisée par un réseau « d’écologie pratique » du BAB, « Vue d’ensemble » (https://www.instagram.com/vuedensemble_64/), qui, par Risefor (https://agir.risefor.org/consultations-publique/consultation-detail/@https://agir.risefor.org/consultationpublics/2/), a proposé plusieurs versions pour les contributions, de différentes tailles, mais avec la même structure : demande d’une prolongation de l’enquête, refus d’une artificialisation supplémentaire, constat d’une cité dortoir, proposition de permaculture pour nourrir le quartier, etc.

Et cela a marché : plus de la moitié des contributions reprennent cette trame. Comme toujours, une bonne partie des contributions sont anonymes, ici 20 (avec ou sans Risefor), et n’indiquent pas le lieu d’habitat (seuls 5 contributeurs disent habiter au Sequé). Au final, la commissaire n’a repéré que 2 contributions favorables au projet…

Plusieurs points soulevés dans ces contributions l’avaient déjà été lors de la concertation préalable.

– Personne ne conteste le besoin de logements à Bayonne, mais pourquoi ici ? Il n’est pas présenté d’étude comparative entre différentes localisations possibles.

– Le projet ne répond même pas à la typologie des besoins exprimés, en raison du grand poids donné à l’accession à la propriété, privée ou dite « sociale »

– Il n’y a aucune référence à l’état de l’artificialisation à Bayonne, et à la nécessité de la réduire.

– L’aspect « village » affiché par la ville ne correspond ni au vécu des habitants, ni à la faible réalisation des promesses de services, d’activités, de commerces. Il ne reste qu’une cité-dortoir.

Dans les conclusions de la commissaire enquêtrice

Selon la commissaire, 3 contributions étaient particulièrement argumentées, dont certainement celle qui a été démultipliée. Elles lui ont servi pour interroger le maître d’ouvrage.

Selon elle, cela portait sur : « – l’artificialisation des sols ; – la consommation des terres nourricières et naturelles ; – la fragilisation de l’écosystème ; – la logique de la ville de Bayonne de concentrer de plus en plus d’activités pour aboutir à une métropolisation ; – l’absence de politique ambitieuse de la ville pour mettre en place d’autres moyens, afin de résoudre la question du logement, que de construire ; – la spéculation immobilière ; – l’échec, en quelque sorte de l’écoquartier existant, dépourvu de commerces, dont les habitants sont tributaires de la voiture pour aller ne serait-ce qu’au centre de Bayonne ». Ces mêmes thèmes feront l’objet d’échanges avec le maître d’ouvrage décrits dans le rapport complet.

La commissaire ne reprend pas à son compte ces argumentaires, mais estime que « avec d’autres, tirés des réponses-mêmes du maître d’ouvrage, ils sont susceptibles, selon moi, de fragiliser la démonstration conduite par la CAPB pour justifier le bien-fondé du projet soumis à enquête ».

Ici et maintenant ?

Elle reconnaît que la ville mobilise « l’intérêt général », comme il se doit dans ce genre d’enquête, en insistant sur la nécessité du logement, et semble reconnaître le bien-fondé de la « charte de mixité sociale », pourtant chiche en logements locatifs publics.

Mais pour elle, dans ses réponses, le maître d’ouvrage a été incapable de suffisamment justifier l’urgence et le lieu.

L’urgence ? Ce PLU date de 2007 ; il a fait l’objet de 17 modifications, 8 modifications simplifiées, 4 Mecdu. Le nouveau PLUi a été prescrit en 2015, puis mis au frigidaire. Il est relancé (ce que ne savait pas la commissaire) de manière accélérée pour être adopté fin 2025. L’ancien SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale) date de 2014, et un nouveau va arriver en 2024. Des nouveaux documents d’urbanisme vont voir le jour, et, selon elle, le maître d’ouvrage n’a été en mesure que de mentionner des études en cours, des résultats non approuvés, etc. Sans parler du Sequé III qui n’est pas sorti de terre. L’urgence n’est donc pas justifiée, et le « maintenant » c’est non.

Le lieu ? L’argumentaire sur l’artificialisation supplémentaire sera développée dans le rapport général. Dans cette partie « conclusions », la commissaire insiste surtout sur la petite dimension du Sequé IV (4,5 ha), peu à même de contribuer à résoudre la crise du logement.

Au final, « la CAPB ne démontre pas suffisamment, selon moi, que la réalisation de logements – qui peut dans l’absolu présenter un intérêt général – se justifie actuellement sur ces terrains du Sequé IV. Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable. »

Ni maintenant, ni ici. Fermer le ban. Et pan sur le bec de la CAPB.

Au rapport

On trouve les conclusions et le rapport complet sur le site de la CAPB : https://www.communaute-paysbasque.fr/enquetes-publiques-2/enquete/enquete-publique-sur-la-declaration-de-projet-seque-4-emportant-mise-en-compatibilite-du-plan-local-durbanisme-plu-de-bayonne#ligne₁

(Fichier 3.1 pour le rapport et 3.2 pour les conclusions synthétiques)

Les observations des « Personnes Publiques Associées » (PPA)

Le premier point soulevé concerne les avis des PPA, certains critiques. La Chambre d’agriculture, le Conseil départemental et le Syndicat des mobilités n’ont pas de réserves. La Chambre des métiers et de l’artisanat s’inquiète des difficultés de trouver du foncier pour les artisans.

Le bureau du SCoT demande que le projet soit recontextualisé à l’échelle de la commune et des différentes phases d’aménagement du Sequé. Il souligne l’absence d’une vision globale de la stratégie communale en matière de logement, et souhaiterait une ventilation plus précise du logement locatif social.

La Direction départementale des territoires et de la mer a émis un avis favorable, mais sous réserve de la production de documents et de renseignements supplémentaires, afin de sécuriser la MECDU. Elle a recommandé aussi la production d’un bilan de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers, et exigé que le dossier soit complété par un chapitre sur l’application de la loi Littoral.

La Mission régionale d’autorité environnementale a recommandé de présenter un bilan du PLU afin de mettre en perspective l’opération projetée, et de préciser les éventuelles incidences environnementales.

La Commissaire apporte alors les commentaires suivants : « Si la collectivité a apporté une réponse, parfois précise, à certaines de ces recommandations, demandes, souhaits…, elle a trop souvent renvoyé à des études diligentées dans le cadre de l’élaboration du PLUi. Ou bien ces études sont en cours, ou bien elles sont connues de la collectivité, mais cette dernière n’a pas jugé utile de les communiquer ».

On retrouve dans ces observations plusieurs des critiques faites sur le registre par des habitants, des citoyens fort éclairés donc, bien que traités avec mépris par la ville. De plus, le dossier reste superficiel, ses fondements sont incertains, ou même volontairement cachés. Il ne tient pas la route.

Vous avez dit acceptabilité ?

La commissaire avait écarté un débat public et la prolongation de l’enquête, le 6 décembre, après seulement 17 demandes en ce sens, alors que la majorité est intervenue ultérieurement. Elle s’était rangée à l’avis de la collectivité.

Elle avait ainsi justifié son refus : « Cependant, la consultation du bilan de la concertation qui s’est tenue entre le 15 mars et le 15 avril 2023 (c’est-à-dire il y a quelques mois à peine) montre que la réunion publique organisée dans le quartier de Sequé a réuni 55 personnes, dont 11 sont intervenues. Elles avaient alors évoqué les principaux sujets que l’on retrouve – de manière plus ou moins développée – dans les contributions déposées sur le registre dématérialisé de la présente enquête. Une réponse leur avait été faite par la collectivité. »

A la fin de l’enquête, la collectivité a voulu argumenter davantage le bien-fondé de ce refus : selon elle, la concertation préalable avait déjà confirmé l’acceptabilité du projet, l’information pour l’ouverture de l’enquête publique avait été faite normalement. Surtout, le registre dématérialisé a reçu 597 visites, et 38 personnes seulement (Note : 42 au final), soit 6%, ont déposé une contribution. « Ce qui montre une acceptabilité du projet par la majorité des personnes s’y étant intéressée ». CQFD.

Cette fois, la commissaire semble avoir tiqué, manifestant une certaine forme de remords. Selon elle, les arguments pour ne pas prolonger l’enquête « méritent d’être nuancés ». Elle « ne saurait valider le terme d’acceptabilité du projet par la population à l’issue de la concertation préalable »

Faut-il le croire ?

Revue thématique des objections

L’essentiel du rapport consiste à examiner, thème par thème, les objections faites par les contributeurs, et à commenter les réponses apportées par le maître d’ouvrage. Cela provoque parfois des échanges très longs.

En premier lieu, la consommation des « terres naturelles nourricières. Cela donne lieu à 7 allers retours, plus un commentaire final de la commissaire. Les premières réponses de la collectivité sont succinctes, et se contentent des généralités superficielles usuelles. Les objections de la commissaire ne semblent pas plus prises au sérieux que celles des habitants.

Mais à partir de la 3e relance par la commissaire, les réponses deviennent plus développées. Elles mélangent des références au cadre réglementaire existant (le PLU de 2007 et son PADD) dont les autres zones N existantes, avec annonces d’études en cours pour un nouveau zonage prochain : des futurs reclassements en zones N et A ; une méthode en train d’être mise au point par la CAPB pour analyser l’artificialisation ; revégétalisation de la ville en cours ; et pléthore d’autres études en cours pour la maîtrise foncière (La Feuillée, Rive Droite Adour, Montalibet, …).

Promesses, promesses, pas documentées. Cela ne convainc pas la commissaire, notamment le tour de passe passe du maître d’ouvrage, qui vante le reclassement en zone N de 6 000 m² du Sequé IV (à côté du ruisseau). Ce n’est qu’un changement administratif, de papier, d’espaces boisés classés, alors que la plus grande partie de la zone sera défrichée, y compris la majorité des bois classés.

Deuxième thème, « le projet ne répond pas véritablement aux besoins de la population en matière de logements ». La commissaire relève l’insuffisance du logement social dans le projet, et les risques d’alimenter la spéculation immobilière. A ces critiques, le maître d’ouvrage répond longuement en décrivant le règlement anti-Airbnb, la charte de « mixité sociale », la vigilance sur les prix de sortie, la lutte contre la vacance. Quant à « l’habitat léger » (les fameuses tiny houses notamment), il ne serait pas adapté au Sequé IV, et réservé à des expérimentations en zone urbaine pour l’hébergement d’urgence.

La commissaire prend acte, tout en soulignant la nécessité d’études complémentaires.

Troisième thème qui motive aussi une longue réponse, « la centralité de Bayonne est un piège pour justifier la nécessité de créer des logements ». Le maître d’ouvrage répond avec sa volonté de remplir les objectifs du PLH (Plan Local de l’Habitat) et de créer un quartier neuf au Sequé depuis 2007, la référence à la « charte d’aménagement et de développement durables » adoptée en 2020 par la CAPB, et les études en cours pour le PLUi. Sans convaincre la commissaire.

Un village imaginaire

Quatrième thème, où la commissaire fait état des critiques émises dans la plupart des contributions, « Le projet ne répond pas à un authentique écoquartier », avec très longue réponse du maître d’ouvrage. Sans surprise la réponse insiste sur les quelques boutiques ouvertes, sur la qualité paysagère. Plus encore « le quartier bénéficie de nombreux avantages que les autres quartiers n’ont pas : maison de quartier gérée par une association habitante, jardin partagé et verger, lac, environnement boisé ». Sans compter une voie dédiée aux circulations douces et une ligne de transports collectifs qui met la mairie à 20 minutes (ligne dont l’insuffisance est malgré tout reconnue).

Il est cependant admis que le quartier « présente des faiblesses et qu’il pourrait devenir zone dortoir ». Heureusement, les projets Sequé III et IV promettent d’y remédier… Et il y a la maison de quartier autogérée, qui sert d’alibi : l’ancienne ferme du Loustaouanou, transformée en maison du Sequé, est brandie, dans plusieurs réponses, comme exemplaire de la politique municipale pour le quartier.

Cela mérite un commentaire supplémentaire de ma part. La ville n’a, semble-t-il, rien appris des expériences (anciennes et partout) de construction de nouveaux quartiers ex-nihilo. On fait du logement, des promesses pour les activités et la vie sociale. Mais rien ne suit, il reste des cités dortoirs, qui deviennent « à problèmes ». Le Sequé prend ce chemin, comme tant d’autres ailleurs avant. Bien loin du village rêvé des habitants. Et de leur réalité vécue.

Prendre le problème à l’endroit, anticiper les infrastructures pour les déplacements, l’école, les activités, la vie culturelle, et ensuite seulement mettre l’habitat en cohérence avec ce qui précède, quand les conditions d’une vie de quartier sont prêtes ou en voie de réalisation proche. Cela procéderait d’une volonté politique et d’investissements financiers, d’un « logiciel » souvent étranger aux aménageurs, comme dans le cas du Sequé.

Le reste est plus succinct : « l’environnement n’est pas suffisamment protégé », « la dangerosité du site », « la santé », « les mobilités douces », « les commerces »…

Au final

Au delà de l’avis défavorable, le rapport d’enquête n’est pas habituel. La commissaire enquêtrice a pris au sérieux les critiques argumentées faites sur le registre et les a décryptées avec soin, c’est rare. En les reprenant pour les soumettre au maître d’ouvrage, elle leur a donné du poids. Au début, il lui répond comme il le fait aux habitants : des réponses lapidaires, stéréotypées, qui se veulent pédagogiques, sous-entendant qu’elle avait mal compris le dossier. Ce mépris ressenti a sans doute compté dans sa conclusion défavorable.

Les échanges révèlent, et c’est en cela qu’ils sont importants, le chaos qui règne à Bayonne pour la planification urbaine, entre les multiples modifications du PLU depuis 2007, et les transformations attendues, et en cours d’études, pour les deux prochaines années, avec les futurs SCoT, PLUi et trajectoire ZAN (Zéro Artificialisation Net). Quelque part, c’est une bifurcation qui devient nécessaire. Alors pourquoi s’obstiner sur une trajectoire caduque ?

Pour ne pas l’avoir compris, le maire de Bayonne et président de la CAPB a subi le camouflet d’un avis défavorable.

Patrick Petitjean, 26 janvier 2024

Avis défavorable dans l’enquête sur le Sequé IV à Bayonne

Ici, doivent s’élever des immeubles

C’est trop rare pour ne pas être souligné : une enquête publique a débouché sur un avis défavorable. Il s’agissait de l’extension de la construction de logements sur le secteur IV du Sequé. La commissaire enquêtrice a entendu les contributions faites sur le registre. Même si on ne peut partager toute son argumentation, son avis défavorable bloque le projet. Et permet d’en rediscuter.

Voici les 5 pages de la synthèse du rapport, en date du 10 janvier, accessible sur le site de la CAPB avec ce lien https://www.communaute-paysbasque.fr/enquetes-publiques-2/enquete/enquete-publique-sur-la-declaration-de-projet-seque-4-emportant-mise-en-compatibilite-du-plan-local-durbanisme-plu-de-bayonne#ligne₁

La synthèse est le document 3.2, et le rapport complet le 3.1

Je reviendrai dans un prochain billet sur l’argumentaire de la commissaire concernant le logement, et sur les contributions qui avaient été faites.

Patrick Petitjean, 18 janvier 2024

Bayonne : Le Carré maudit

vendredi 21h

La grue était tombée le 9 mars 2022 sur l’immeuble voisin, le Carré Saint-Esprit, détruisant un appartement du dernier étage. Les réparations avaient commencé en début de mois. Vendredi 20 septembre, la dépression Aline est passée par là, et l’échafaudage a été sérieusement endommagé. Les riverains imaginent ce qui aurait pu se passer si une grue avait été déjà remontée…

Principale victime, l’emballage du dernier étage, une housse sensée le protéger des intempéries pendant sa reconstruction. On voit sur les photos, prises le vendredi soir et le samedi, les morceaux de toile qui volètent au vent…

samedi matin, vu du Bd Alsace Lorraine

Les dégâts portés à l’échafaudage proprement dit seront expertisés dans la semaine, mais au vu des photos, le désordre semble important. A voir aussi les conséquences de l’entrée de la pluie à travers la bâche détériorée.

les dégâts sur l’échafaudage, à gauche et à droite, vus d’un immeuble voisin

Une barre est tombée sur le boulevard Alsace Lorraine, détériorant le toit d’un abri-bus. Pas de blessés, et le boulevard a été interdit à la circulation pendant l’épisode venteux.

Une barre de l’échafaudage tombée sur le boulevard. Photo PG
L’abribus détérioré

Sans surprise, avec les fortes pluies (et le niveau de l’Adour), le niveau d’eau dans la mare voisine est à son maximum ce samedi matin. Le COL, Domofrance et la mairie pourront-ils rester droit dans leurs bottes et reprendre le chantier comme de si de rien n’était ?

Patrick Petitjean 21 octobre 2023

Lapix, de retour quai Bergeret à Bayonne

Le quai Bergeret, déjà défiguré, où l’immeuble du COL ne dépareillera pas

La responsabilité de Lapix, entreprise du bâtiment omniprésente à Bayonne, dans la chute de la grue quai Bergeret et dans la mort du grutier a suffisamment été pointée par l’expert judiciaire pour que, avant même le procès au pénal, son assureur, AXA, avance le coût des réparations sur l’immeuble touché dans l’accident. Pour des raisons financières, et malgré la faute professionnelle, le COL et Domofrance ont confirmé le marché avec Lapix. La vie d’un ouvrier ne vaut rien pour eux.

Pour reprendre la main sur le dossier de la friche Bergeret et relancer le chantier malgré l’accident mortel de mars 2022, le COL, Domofrance et la mairie avaient organisé une rencontre avec les riverains ce lundi 16 octobre. Pour eux, soyons rassurés, tout baigne. L’accident n’est plus un sujet. Les engagements financiers interdisent tout report, à plus forte raison toute modification du projet. Et de changer d’entreprises. C’est l’argument avancé pour justifier le retour prochain de Lapix et de sa grue sur le chantier. Les riverains apprécieront.

C’est la même entreprise qui vient d’être condamnée le 17 octobre par le tribunal de Bayonne pour un accident du travail sur un de ses chantiers dans le sud des Landes, où un ouvrier avait eu le bassin écrasé par une structure métallique en 2020.

Pour reprendre le chantier sans attendre le jugement au pénal de l’accident, le maire et le COL parlent aussi de « l’insupportable attente » des personnes qui ont réservé leur appartement depuis plusieurs années. Faudra-t-il considérer le grutier décédé comme responsable du retard ?

Selon le COL et Domofrance «  Le projet est comme ça, on ne peut revenir en arrière ». « L’accident n’a pas remis en cause le cahier de charges ». « Zéro accident, ce n’est pas possible ». La question a été posée d’installer une plaque, à défaut du jardin mémoriel proposé par les riverains. Réponse du COL : les copropriétaires ne sont pas en général favorables, cela donne une image négative de leur résidence…

Les conditions de reprise du chantier

Le calendrier a été fourni

(photo V. T.)

Il n’y aura pas de gros œuvre avant le démontage en janvier (en principe) de l’échafaudage installé sur le Carré Saint Esprit.La grue sera décalée de 1m50 par rapport à celle qui s’est effondrée, avec de nouveaux pieux. Sur les études préalables au moment du PC, ou supplémentaires après l’accident concernant les sols et l’inondabilité, sur les problèmes d’une grue dans un sol inondé en permanence, pas de réponses réelles, si ce n’est : l’expert a fait des préconisations, un protocole de précaution (et avant l’accident?) a été défini. Soyez rassurés, bonnes gens.

Le COL a, en principe, donné son accord pour qu’une réunion plus technique soit organisée sur ces questions. A suivre ?

Le boulevard Alsace Lorraine

(photo V.T.)

Un plan de l’organisation du futur chantier a été présenté, qui empiète fortement sur ce boulevard. C’est une voie à forte circulation : bus, autocars intercités (flixbus et autres) en plus du trafic habituel de vélos, voitures et camions, et des piétons sur les trottoirs. Les embouteillages sont importants tous les jours entre 7h30 et 8h30. Cela promet : on peut le voir dès maintenant, à échelle réduite avec le chantier de réparation du carré Saint-Esprit.

A cette occasion a été constaté l’inexistence à Bayonne, contrairement à d’autres villes, d’une « charte de chantier » où les entreprises concernées s’engagent à respecter leur insertion dans un quartier (du bruit au déplacement des piétons et à la circulation de leurs camions) et où la ville renforce la surveillance de voirie.

Ce problème rejoint celui de l’accès, à partir du boulevard, au parking de 37 places qui sera construit sous les bâtiments : une promesse de difficultés supplémentaires de circulation aux heures de pointe.

Le locatif social, c’est toujours non

Ce n’était pas à l’ordre du jour, mais cela n’a pas manqué d’être abordé par les présents : pourquoi que des BRS, sans location sociale ? Pour Domofrance, pas de réponse. Pour le COL, c’était la volonté des membres de l’association Âge et Partage 64 qui porte le projet de résidence pour personnes âgées.

Et toujours le dogme : le BRS, c’est du social, même si le maire avait semblé en douter il y a quelques mois lors d’un conseil municipal. La priorité est de loger les classes moyennes, intermédiaires entre les plafonds de la location et un privé inaccessible : d’où l’accession sociale. Cela se tient. Mais comment prétendre que les personnes âgées modestes, les précaires, les CDD, les jeunes, qui sont souvent en dessous du SMIC peuvent accéder au BRS ? On en fait quoi ? Les 2/3 de demandeurs de logements sociaux sont en deçà du plafond d’une location très sociale (PLAI), moins que le SMIC.

Zubi Mayou

C’est le nom du bâtiment du COL qui devrait abriter la résidence seniors, le long du quai Bergeret. Ce projet est porté par une association, Âge et Partage 64, officiellement constituée à Anglet en août 2017. L’association s’est racontée dans 3 articles de Sud Ouest en septembre 2017, octobre 2018 et juin 2023. Plusieurs de ses membres étaient présentes le 16 octobre, ce qui a permis de préciser les articles de Sud Ouest et d’en savoir un peu plus.

L’association

L’idée était dans l’air depuis 2016, mais la réunion publique de lancement a eu lieu en septembre 2017 à Anglet. Sur la quarantaine de personnes présentes, seules 5 ou 6 sont restées dans le projet : le groupe de futurs propriétaires s’est constitué progressivement. Lors de cette réunion, elle donnait l’exemple de plusieurs résidences sociales seniors : les Babayagas (locatif, Montreuil), Chamarel (Vaux en Velin, coopérative) ou les Boboyakas (Bègles, coopérative). C’est une autre voie qui a été prise : de l’accession sociale à la propriété, comme le COL l’avait fait déjà au Séqué avec Terra Arte.

L’association disait rechercher du foncier sur le BAB : il est venu l’année suivante grâce au maire de Bayonne qui a proposé ce foncier à l’association, lors d’une rencontre avec la présidente en 2018. Le groupe s’est progressivement complété en 2019, une fois le foncier trouvé, beaucoup de membres ne se connaissant pas avant. Ils et elles ont progressivement pris leur place dans le processus participatif de conception de l’immeuble et de son fonctionnement.

Dans le Sud Ouest de juin 2023, on apprenait que tous sont déjà propriétaires (en réalité, il y a quelques locataires), alors que le BRS est plutôt destiné aux primo-accédants, mais avec des revenus inférieurs à 2 000 euros par mois, ce qui les fait rentrer dans les plafonds du BRS. Selon cet article, le prix au m² est fixé à 2 600 euros, à comparer avec les prix du marché à Saint Esprit.

La présidente de l’association a confirmé lundi que le choix d’être propriétaires individuels était celui de ses membres, au lieu d’une propriété collective sous forme coopérative. La solidarité et le participatif ont leurs limites. Être déjà propriétaires permet aussi d’éviter les emprunts, impossibles pour des personnes âgées.

Actuellement l’association comporte une trentaine de membres pour 15 futurs propriétaires. Cela permettra d’animer le local du rez-de-chaussée, ouvert sur le quartier, et, subsidiairement, de candidater pour remplacer des propriétaires qui viendraient à décéder.

Comment ce foncier public a-t-il été attribué à l’association ?

Apparemment, « sur un coin de bureau » entre le maire et Colette Schnurrenberger la présidente de l’association.

Modeste, le maire de Bayonne a attribué à Martine Bisauta la maternité de l’idée de résidence seniors, et a affirmé n’avoir agi que comme « facilitateur »

Pour de l’habitat participatif, il y a en général appel public à candidatures, réunions d’information, après lesquelles se constitue un groupe qui travaille collectivement le projet. Cela se passe ainsi avec le COL pour Vigilant ou HSA au Prissé. Ou pour Gurekin à Urt et à Hasparren.

(voir billet précédent du 16 octobre 2023)

Quand il s’agit d’un groupe constitué en amont, pour du foncier public (foncier privé, c’est autre chose) il y a en général (à Paris notamment) un appel à intérêt, et choix selon des critères prédéfinis entre les groupes postulants. Ici, il n’y a pas eu d’appel à manifestation d’intérêt pour un groupe.

S’il y a bien eu une ou deux réunions publiques sur Anglet pour présenter le projet et constituer la liste des futurs propriétaires, qu’en est-il dans le quartier Saint-Esprit ?

Les riverains n’ont souvenir ni d’une réunion publique pour recruter des candidats, ni même d’une simple réunion d’information pour présenter le projet.

Le contraste est saisissant avec a manière dont le COL a pourtant procédé sur un îlot voisin du même quartier, Vigilant, où un appel public a été fait, et où le directeur du COL a déclaré selon Sud Ouest du 29 avril 2021 : « Nous travaillons bien avec les associations de quartier » « Quand vous faites un projet qui tient compte de son environnement, il faut discuter, respecter le quartier ». Pour quoi donc tant d’opacité de la part de la mairie et du COL à Bergeret ?

Quel contenu BRS ?

L’Etablissement Public Foncier Local du Pays Basque, EPFL-PB reste propriétaire du foncier à travers de Bizitegia, son Office Foncier Solidaire (OFS), avec lequel les BRS seront signés.

C’est donc lui qui est chargé de contrôler l’éligibilité des postulants au regard des plafonds et autres conditions. C’est aussi lui qui devra appliquer les décisions du Conseil municipal de Bayonne de juillet 2019 concernant cette opération. Il touchera la redevance du foncier, 1,5 euros par m² pendant 60 ans, pour les appartements du COL comme pour ceux de Domofrance. C’est enfin lui qui veillera à l’éligibilité des éventuels remplaçants des propriétaires décédés.

Un Conseil d’Administration de l’EPFL de septembre de la même année à confirmé ces décisions, tout en évaluant à 30,31 ans la durée d’amortissement du foncier avec cette redevance. C’est une contribution solidaire des propriétaires pendant 30 ans pour aider à la constitution de rserves foncières publiques.

Le Conseil municipal avait aussi fixé à 30 % de moins que le prix du marché pour le prix au m² des appartements, tant pour Domofrance que pour le COL. Pour Zubi Mayou (Sud Ouest de juin 2023), c’est 2600 euros par m², avec un prix du marché actuel autour de 5000 euros.

Voir aussi sur cette réunion

Patrick Petitjean, 19 octobre 2023

Bayonne Saint-Esprit : 22 quai Bergeret, la lutte continue

(mare au canards)

Jeudi 12 octobre, le collectif 22-Bergeret a organisé une réunion publique pour présenter ses propositions quant au futur du chantier interrompu depuis la chute de la grue, provoquant la mort du grutier, Mohamed Kichoui ; un chantier devenu friche. Le collectif avait invité la mairie de Bayonne, les deux constructeurs (Domofrance et COL) et l’EPFL propriétaire du terrain pour réagir en direct aux propositions. Ils étaient présents, sauf l’EPFL.

Le projet, le collectif, l’état des lieux

Plusieurs articles ont déjà été publiés sur ce blog à propos de l’accident de grue et du projet de construction. Voir en déroulant les différentes parutions du blog.

Rappel du projet

Le terrain avait été acquis par l’EPFL-PB (Etablissement Public Foncier Local du Pays basque, chargé de gérer le foncier pour le compte des communes) en 2014 pour le compte de la ville de Bayonne. Il est situé entre le quai Bergeret et le boulevard Alsace-Lorraine.

Le projet comporte deux bâtiments, 5 et 4 étages plus attiques, 1 parking souterrain. Domofrance (une filiale d’Action Logement pour l’Aquitaine), sur le bd Alsace Lorraine avec une trentaine de logements. Le COL (Comité Ouvrier du Logement, coopérative issue du mouvement des Castors au Pays basque après-guerre, aujourd’hui spécialisée dans l’accession sociale à la propriété et dans les projets participatifs) avec 15 logements pré-affectés par la ville de Bayonne pour une résidence participative seniors. Tous les logements sont proposés en accession sociale avec BRS (Bail Réel Solidaire), où le foncier reste public (pas de spéculation donc) et seul l’appartement est privé (avec des contraintes en cas de revente)

L’accident, le collectif de riverains

Le 9 mars 2022, la grue s’effondrait quelques heures après son installation dans un terrain inondé. Le grutier était tué, et l’immeuble voisin (le Carré Saint-Esprit) très endommagé. Le dernier étage était détruit et ses occupants, présents à l’intérieur, échappaient par miracle à la mort.

En solidarité avec toutes les victimes, un collectif a été créé par des riverains, pour obtenir la mise en sécurité du chantier, obtenir toutes les informations sur l’accident et ses suites, réfléchir à l’avenir de la parcelle.

Le 9 mars 2023, il a organisé un hommage au grutier, Mohamed Kichoui, avec les syndicats CGT et LAB du bâtiment. Plus d’une centaine d’habitants ont répondu à l’appel, pour manifester leur solidarité… mais sans aucun représentant de la mairie.

(plaque d’hommage)

L’état des lieux

Le chantier n’a pas repris, et s’est transformé en îlot de fraîcheur apprécié des riverains, dont une mare aux canards (voir photo à la une) et aux poissons. La végétation a aussi repris ses droits.

(Mare et retour du végétal en octobre 2023)

En septembre, les travaux de réparation de l’immeuble voisin ont débuté, pour plusieurs mois. Les ouvriers ont constaté les difficultés de fixer l’échafaudage côté chantier, sur une mince bande de terre molle entre la mare et l’immeuble.

(échafaudage sur le carré Saint-Esprit)

Pour un jardin mémoriel

Les riverains refusent l’effacement de l’accident mortel de Mohamed Kichoui et des autres victimes. Le chantier ne peut être relancé tel que comme s’il ne s’était rien passé. C’est pourtant ce qui semble être la première préoccupation de la mairie et du COL au vu de leurs annonces répétées de date pour cette reprise.

La proposition du collectif est d’inclure dans le projet un espace vert public, de taille suffisante, en plaine terre, qui constitue un espace mémoriel. Il y a actuellement dans l’ancien projet un tout petit espace vert privé (destiné à être un jardin partagé pour les propriétaires du bâtiment du COL). Evidemment inacceptable.

Le collectif a bien conscience que cela nécessite une modification du PC (Permis de Construire), voire une modification simplifiée du PLU (Plan Local d’Urbanisme)

A quelques blocs de l’îlot Bergeret (l’îlot Vigilant entre les rues Muscard, Bourbaki et Argote), un tel espace vert public avait pu être glissé dans un projet immobilier du COL (toujours en BRS), tout en nécessitant une modification du PLU (faite en 2019), une délibération du conseil municipal (en 2022) et une modification du PC. Les travaux vont commencé.

Le quartier est en demande d’espaces verts. Pourquoi ce qui a été possible pour Vigilant ne le serait pas pour Bergeret ?

Remettre sur le tapis la totalité du projet, y compris la programmation de logements

Le collectif avait fait au printemps dernier un sondage auprès d’une centaine de personnes. Sans surprise, les deux besoins qui sortent en premier sont les espaces verts et les logements, principalement les locations sociales. Sans surprise non plus, au vu de l’îlot de fraîcheur qu’est devenu le chantier, les habitants ne souhaitent pas de construction sur Bergeret.

Revoir très fortement la programmation des logements ou même faire table rase des bâtiments. Le collectif partage ces deux demandes, et laisse ces deux hypothèses encore ouvertes. Elles doivent être mises sur la table dans une re-discussion globale du projet.

Le collectif pose cette question : Ne faut-il pas profiter de l’arrêt du chantier pour revoir la programmation de logements, avec de vrais logements sociaux et en réduisant l’emprise des bâtiments pour laisser place à un espace vert ?

Rééquilibrer en faveur du locatif

Dans le projet actuel, tant Domofrance que le COL ne proposent que de l’accession dite sociale. Il n’y a pas de logements locatifs qui s’adressent aux jeunes, précaires, aux personnes de ressources modestes, notamment retraitées.

Pour mémoire : il y a 5000 habitants de Bayonne sur les listes de demande de logements sociaux. Ils et elles sont candidats à la location, pas à la propriété pour la plupart.

La mairie semble considérer qu’il y a suffisamment de diversité sociale à Saint-Esprit, et privilégie l’accession, au risque d’une gentrification. Cela se voit dans les contraintes souples au niveau du plan local de l’urbanisme, le PLU. Le seuil pour l’obligation de logements sociaux (avec une partie obligatoire de locatif) par opération immobilière est actuellement de 31 logements dans le quartier. Une révision proche va l’abaisser à 20. Cela reste très insuffisant.

La plate forme « Herrian Bizi », qui a organisé les manifestions sur le logement et regroupe de très nombreuses associations concernées et compétentes sur le logement, préconise un seuil de 3 ou 4 logements en général, avec davantage de locatif que d’accession. A Grenoble, ce seuil est de 3

Une alternative pour une résidence seniors participative

La mairie a décidé de faire une résidence seniors sur l’îlot Bergeret, c’est très bien, il en faut, et c’est son droit. Mais pourquoi en BRS, en plus pour des copropriétaires (les candidat.e.s du COL, sauf une, selon la presse) ? C’est son choix politique, mais ce n’est pas le seul possible

Si on veut faire une résidence seniors participative, pour des milieux populaires, il y a l’exemple de l’association Gurekinen, partenariat avec le COL, à Urt. C’est un projet de37 logements avec 27 locatifs et seulement 10 en BRS. Il y a 7 HLM stards et 3 très sociaux. Restent 17 logements locatifs, T1 et T2, sous forme d’une « maison partagée », avec des espaces collectifs. La maison partagée donne lieu à un processus participatif classique avec les futurs locataires.

37 logements, c’est le même ordre de grandeur que les 45 de Bergeret : Un projet semblable est concevable pour Bergeret, et contribuerait à réduire l’emprise des bâtiments et laisser de la place pour un espace vert public. Une proposition à débattre pour un nouveau PC

Mettre en oeuvre les principes de précaution et d’anticipation

Le collectif pose une autre question : Quelles leçons ont été tirées de l’accident avant une éventuelle reprise du chantier, avec ce sol spongieux. Quels est l’état des sols ? Quelles précautions pour construire dans la nappe phréatique ? Quelle anticipation des risques d’inondation en 2050 avec l’augmentation du niveau des océans ?

Il s’agit à la fois de précaution et d’anticipation.

L’îlot Vigilant est officiellement en zone inondable, contrairement à Bergeret, pourtant au bord de l’Adour. Le parking est donc tenu à un double coffrage, pas celui de Bergeret.

Pour les années qui viennent la ville a un grand projet d’urbanisme voisin, de l’autre côté du pont Saint Esprit, vers l’aval. Elle l’explique régulièrement, « l’inondabilité du secteur constituera un vrai sujet dans les décennies à venir ». Etait-il vraiment impossible, il y a 10 ans, d’anticiper ce risque d’inondabilité, 200m en amont de ce grand projet ?

Dans une plaquette diffusée en 2022, la ville expose son intention de lutter contre l’artificialisation des sols, pour les îlots de fraîcheur et le végétal en pleine terre.

Super de super. Mais n’était-il pas possible d’anticiper à Bergeret, en arrêtant la bétonnisation galopante du quartier ? Conçu il y a plus de 10ans, le projet actuel est un projet anachronique du « temps d’avant ». Pourquoi ne pas profiter de l’arrêt du chantier pour le reprendre complètement ?

Pour une concertation publique sur l’avenir du site

Le collectif demande une telle concertation depuis plus d’un an, mais se heurte à un refus de discussion. Il demande, pour le moins, que ce refus soit sérieusement motivé. Que de temps perdu ?

Il faut rappeler par ailleurs qu’un procès concernant l’accident va avoir lieu, que l’expert n’a pas rendu son rapport final, et qu’au-delà de Lapix, il y a les donneurs d’ordre, dont le maire qui a signé le PC. Une éventuelle reprise précipitée du chantier poserait le problème de sa responsabilité pour défaut de précaution.

Une concertation peut se faire dans les 4 à 6 mois à venir, voir plus, période dans laquelle le chantier ne pourra techniquement pas reprendre. Et déboucher sur une modification du PC, avec un nouvel équilibre espaces bâtis / espaces verts, et sur une nouvelle programmation beaucoup plus sociale.

Les conditions de reprise du chantier ne sont pas réunies. Malgré tout, le COL, Domofrance et la mairie ont convoqué, en réaction à la réunion publique du collectif, leur propre réunion 5 jours après, le 16 octobre. Avec au menu la reprise du chantier, avec la participation des entreprises concernées

Le débat avec les porteurs du projet actuel

La municipalité et le COL étaient déjà venues (sans avoir été invités) lors de la première réunion publique du collectif en janvier dernier. Cette fois-ci, ils étaient confrontés à des questions et propositions plus élaborées quant à l’avenir de la friche. Les échanges entre les participants et les porteurs du projet actuel ont été courtois, riches, mais n’ont pu que constater une impasse complète.

En premier lieu, les demandes d’information sur les études faites (ou à faire) sur les sols et l’inondabilité sont restées sans réponses

Un côté très positif cependant : le collectif a réussi à maintenir ses propres termes du débat : « quel type de logement social et pour quels habitants » et sur la complémentarité entre logements et espaces verts. Et donc en ne laissant pas les autorités le renvoyer dans une fausse alternative entre logements et espaces verts.

La discussion a porté sur le refus de remettre en cause le moindre aspect du projet actuel et donc le refus de toute concertation. Le COL et Domofrance ont surtout mis en avant les arguments économiques : les marchés déjà signés, les promesses de ventes, tous les coûts en augmentation. On a appris au passage que si les 15 logements du COL étaient déjà attribués, il restait à Domofrance quelques logements à vendre, la commercialisation ayant été arrêtée à la suite de l’accident.

Il y avait trois élu.e.s présent.e.s : Joseba Erremundeguy (conseiller délégué aux relations avec les conseils de quartier), Laurence Hardouin (adjointe à la transition) et Alain Laccasagne (adjoint à l’urbanisme). Plusieurs registres ont été mobilisés pour récuser toute remise en débat :

la défense de l’accession sociale à la propriété (par le trio), supposée permettre de loger les classes moyennes inférieures qui, comme chacun sait, rêvent de devenir propriétaires, surtout les personnes âgées au bout de leur « parcours résidentiel » (sic). C’est d’ailleurs le thème de la propagande d’Alday, promoteur bayonnais bien connu, pour vendre ses appartements « en accession maîtrisée » au Prissé. Comme si les BRS étaient vraiment accessibles à toutes les classes moyennes, surtout en ce moment, avec les difficultés de crédit et l’inflation. En contre partie, évidemment, pas un mot pour défendre le locatif social à Saint Esprit.

la responsabilité morale des élus (par JE et AL), envers les futurs habitants, qui ont signé des « réservations » et attendent leur appartement depuis des années (la livraison du bâtiment du COL était prévue en 2021, mais le covid, puis l’accident…). Sans éviter le registre larmoyant : certains sont très âgés et ne peuvent plus attendre

un BRS qui se crée, c’est une location qui se libère, (par le COL). Sauf qu’à Bergeret, les futurs propriétaires sont déjà propriétaires, sauf une qui a été mise en avant lors de la réunion. Dans un entretien à Sud Ouest en juin dernier, la présidente de l’association qui a bénéficié des BRS avait elle-même reconnu ses membres étaient déjà propriétaires.

on a commencé à faire, et on va le faire de plus en plus (LH), pour répondre à notre référence à la plaquette de la ville. Mais plus tard, ou ailleurs à Saint Esprit.

autoritaire (JE), avec cette affirmation choc : « La concertation, c’était les élections municipales. Ce projet était dans notre programme ».

à suivre

On en est resté là ce 12 octobre. Les discussions reprendront le lundi 16 avec le COL, Domofrance et le maire à la barre. Elles ne seront pas les dernières dans ce dossier.

Patrick Petitjean, le 16 octobre 2023

Voir aussi sur cette soirée : http://ramdam6440.fr/2023/10/16/le-collectif-22-quai-bergeret-enfin-pris-au-serieux/

Le site du collectif : http://22quaibergeret.fr

Projet Rive Droite de l’Adour : au fil des posts sur facebook

Le 13 septembre doit avoir lieu une nouvelle étape du processus officiellement baptisé « de concertation » concernant le projet d’aménagement de la Rive Droite de l’Adour (RDA). Il s’agit d’un atelier dit « jeu du programmiste » pour contribuer à la préparation du plan-guide pour le futur quartier, dont le cabinet Güller-Güller a la charge.

Après des acquisitions foncières au débat des années 2010, le projet avait sommeillé plus de 10 ans avant d’être spectaculairement relancé au printemps de cette année, en s’appuyant sur le travail engagé quelques mois auparavant par plusieurs bureaux d’études.

La concertation toujours absente

La Communauté d’Agglo se revendiquait dans une démarche exemplaire de démocratie participative. Le moins que l’on puisse dire est que, pour l’instant, les habitants restent sur leur faim. Au printemps, il y a eu une enquête sur les « attentes », un atelier de présentation du projet (où les mêmes attentes ont été collectées), un atelier sur l’histoire du quartier, un atelier avec des enfants. Comptes rendus et captations sont sur le site du projet. Mais, bien que promises, les réponses à l’enquête ne sont toujours pas disponibles. Les concepteurs du projet ont travaillé sur ce « réservoir d’idées » nous dit-on, mais les habitants n’en auront (peut-être) connaissance que le 13 septembre. De même, les propositions faites lors du premier atelier pour mieux faire participer les habitants sont restées lettre morte.

Depuis le 19 juin, des informations sont régulièrement données sur le projet dans une page facebook : https://www.facebook.com/Projetrivedroitedeladour. Elles sont présentées comme les réponses à des « « FAQ », les questions que les habitants doivent se poser sur le projet. Cela ressemble aux faux courriers des lecteurs dans un magazine, rédigés par les journalistes eux-mêmes. Mais cela traduit surtout un état d’esprit très directif, « descendant ». Très loin donc d’une interaction, d’aller retour entre habitants et responsables du projet. Et le travail des bureaux d’études se fait dans l’opacité vis-à-vis des habitants.

Pour beaucoup, les informations distillées sur ce facebook sont des généralités (notamment sur les berges de l’Adour et les déplacements) qui avaient été énoncées dès la réunion d’information du 25 mai. Ou des évidences : on respectera le PLH, la réglementation thermique nationale, le plan Climat, la réglementation sur les risques d’inondation… Mais il y a quand même des indications précieuses sur le contenu du plan guide et ses échéances, et des précisions ponctuelles importantes

Le plan guide

Selon le post facebook du 30 mai, le plan guide, dont Güller-Güller a la charge,

« – définit la philosophie, les ambitions et les grands équilibres programmatiques du projet (par exemple, la part respective de logements et d’activités)

– fixe les grands principes d’organisation spatiale et urbaine : localisation des nouveaux espaces publics (les voies de circulation et les espaces verts), délimitation des futurs îlots, volumétrie de principe des futurs bâtiments

– propose un phasage de principe des différents secteurs à aménager. ».

(schéma du futur plan guide, repris du post de facebook)

Le bureau d’études doit rendre sa copie à la fin de l’année, et le conseil de la CAPB le validera au 1er trimestre 2024. A marche forcée donc.

Bien sûr, le plan guide est très loin d’épuiser le sujet, c’est un cadre, et tout devra être précisé, pièce par pièce. Mais le vote de la CAPB au printemps prochain aura pour effet de graver dans le marbre l’essentiel du projet, du moins dans l’esprit des responsables politiques actuels, le maire-président en tête.

Le plan guide, c’est maintenant

Selon ce même post, la livraison des futurs bâtiments et espaces publics est envisagée pour 2034-2040

Mais ce plan guide permet aussi d’avancer dans la mise en œuvre de différents « schémas directeurs » dont la CAPB est friande : pour les espaces publics, les équipements sportifs,… Et surtout, la réalisation d’un campus universitaire, dont une « Ecole de Management » prévue au contrat de plan Etat-Région (post du 1er septembre) : davantage donc des logements et services pour étudiants évoqués lors de l’atelier en mai. L’ombre d’Arkinova (projet d’installations universitaires dans une zone naturelle à Anglet, bloqué par les habitants) plane aussi sur RDA avec l’éventualité d’une relocalisation partielle.

Le jeu programmatique du 13 septembre

Selon les différents posts qui présentent cet atelier, des « invariants », impératifs techniques et politiques définis en préalable par la CAPB et Bayonne, seront présentés en introduction du « jeu ».

Pour reprendre en entier le post du 31 août :

« Vous vous glisserez dans la peau d’un programmiste urbain pour imaginer, avec vos coéquipiers, l’éventail des fonctions et usages du futur quartier. Ensuite, vous proposerez un plan répartissant ces programmes dans l’espace. Vous vous pencherez tout particulièrement sur 6 dimensions essentielles du projet :

➡ Le logement

➡ Les facteurs d’animation, la convivialité, les lieux de rencontre…

➡ Les déplacements

➡ Les enjeux environnementaux, le lien avec l’Adour

➡ L’activité économique

➡ La solidarité

Les contributions au projet issues du Jeu du programmiste seront partagées avec le public, avant d’être communiquées aux concepteurs du projet qui les intégreront à leur réflexions. »

Les intégreront ? Ou pas. C’est un « dialogue participatif » (dénomination officielle de ces ateliers) à sens unique.

Quel morceau de ville deviendra RDA ?

Le découpage en FAQ sectorielles a le même effet que le passage direct à la répartition thématique des ingrédients du dossier : la dépolitisation du projet. Du moins, le principal choix politique reste du domaine réservé des élu.e.s, préservé d’une mise en cause par les habitants. L’atelier du 13 septembre laisse-t-il une possibilités de discussion des « impératifs techniques et politiques » ?

Un tel débat politique général aurait du avoir lieu avant ces discussions par morceaux : qu’est-ce qui fait sens pour ce morceau de ville, avec quelle vision pour Bayonne et la CAPB en arrière-fond ? Cette discussion n’a pas eu lieu ni au conseil de la CAPB, ni avec les habitants. Il ne pourra être évité quand le plan-guide y sera présenté au printemps prochain.

Reste que le thème du logement est celui où se glisse le plus clairement les choix politiques et sociaux de la CAPB pour ce futur quartier.

La charte, rien que la charte

C’est ce qui ressort déjà des posts concernant le logement : il y aura la mise en œuvre de la dite « charte de mixité sociale » de la ville de Bayonne, qui préconise, pour toute opération de plus de 50 logements, 30 % en location sociale (public), 15 % d’accession sociale à la propriété (type BRS), 15 % d’accession « maîtrisée » et 40 % d’accession libre. Cette charte n’est pas un document juridique, ni même un engagement contractuel. On peut la comprendre comme une entente politique entre des promoteurs immobiliers et le maire-président. Pour facilité la vente de leurs appartements, la ville leur vend du foncier public (ce sera le cas de RDA) en dessous des prix du marché, contre leur engagement de quelques appartements à prix maîtrisés (et l’obligation de rester en résidence principale un certain nombre d’années).

La mixité sociale dont il est question est celle de l’accession à la propriété des classes moyennes, pas celle des milieux populaires. Cette charte est en parfaite adéquation avec la politique nationale du logement récemment redéfinie par le gouvernement Macron-Borne : marginalisation du logement locatif social, priorité à la propriété pour les classes moyennes « intermédiaires ».

De part sa situation géographique, RDA est présenté à la fois comme une extension du centre ville (auquel il fait face de l’autre côté de l’Adour) et comme un prolongement du quartier Saint Esprit sur la même rive (dont il fait partie historiquement). Ce sont des quartiers que beaucoup oppose encore.

Prolonger Saint Esprit ?

Sur la rive droite, de l’autre côté du Pont Saint Esprit, c’est un quartier qui fut très populaire, avec des immeubles anciens (et donc des logements sociaux de fait) en partie rénovés et des logements sociaux construits après guerre, jusqu’aux années 1970-80. Depuis, la politique municipale a changé, et la priorité est le logement des classes moyennes. En dehors de la rénovation des logements anciens, il n’y a plus de location sociale nouvelle depuis de nombreuses années. Les immeubles récents du quai Bergeret et du boulevard Alsace-Lorraine sont caractéristiques de cette nouvelle politique. C’est un quartier en voie de gentrification (voir la rue Sainte Catherine), même s’il reste populaire.

Prolonger le centre ville ?

En face sur la rive gauche, le centre ville (Paulmy et les Arènes) est un ghetto pour riches sans HLM, auquel il a été adjoint de grands immeubles sans âme (Marinadour et Rivadour) principalement pour classes moyennes. Le plus récent, Rivadour (Eiffage) com

porte un hôtel « standing » pour tourisme d’affaires, mais aussi (PLH oblige) 53 logements locatifs sociaux confiés à HSA sur les 155 de l’immeuble. Est-ce le modèle à étendre sur l’autre rive ?

Sobriété urbaine

En face du centre ville, ce sont les bâtiments anciens (dont des ex-entrepôts) préemptés et vides, sauf pour des activités (provisoires) de solidarité. Le devenir de ces bâtiments à long terme est laissé dans le flou : le post du 16 août, consacré à la sobriété urbaine, parle du réinvestissement des bâtiments pré-existants, « car le cycle démolition-reconstruction est extrêmement énergivore à tous les stades ». Les bâtiments du quai de Lesseps sont les seuls concernés, si l’on laisse de côté la parcelle « Duprat » (l’ancien entrepôt de vins et une maison).

Selon un autre post (26 juin), ces bâtiments relèveraient de l’étude sur l’urbanisme transitoire confiée à Plateau urbain, dont on attend toujours le rapport. Mais dont le premier geste, faut-il le rappeler, a été d’expulser le collectif Maurizia de l’immeuble occupé en avril dernier rue Sainte Ursule et qui en était la mise en pratique à l’initiative d’un groupe de jeunes.

Je reviendrai sur l’urbanisme transitoire quand sortira ce rapport de Plateau urbain.

(sous-titre) L’atelier qui manque : Rive Droite Adour 2050 ou 2060

Les livraisons des bâtiments sont prévues vers 2034-2040, mais ils sont supposés durer des dizaines d’années. Un travail d’anticipation, une réflexion prospective auraient très utile pour déterminer ce que l’on fait maintenant pour le nouveau quartier. Comment prendre en compte l’accélération de la crise climatique sous tous ses aspects ? Mais aussi, les évolutions urbaines possibles (de nouveaux terrains libérés par le port de Bayonne ) ou potentielles (la restitution de la citadelle par l’armée).

Les échelles ne temps ne sont pas les mêmes pour tous les aspects du projet. Mais au fil des posts, on ne peut qu’être inquiet devant la faiblesse du triptyque « anticipation, imagination, ambition ». Que le « déjà-là » à Bayonne soit omniprésent à travers les schémas directeurs à appliquer, le plan climat auquel se conformer, les réglementations à respecter, rien de plus normal. Mais cela ne projette guère dans le futur.

Quelques exemples

Pour la transition énergétique, le plan climat est souvent jugé insuffisant, et accélérer est déjà une nécessité. L’appliquer ne peut être la seule perspective offerte : faire mieux que les réglementations dès maintenant. Les expérimentations ne manquent pas dans d’autres villes, au Pays basque même.

Pour l’architecture, la référence est celle des frères Gomez, d’il y a près d’un siècle. Il paraît que leur architecture est « intemporelle »… Peut-être faudrait-il regarder plutôt du côté des immeubles compacts, denses, exemplaires pour l’énergie, incorporant la tradition basque, tels développés à Urrugne.

Pour les déplacements, vouloir privilégier les déplacements doux et limiter la circulation automobile, ce n’est plus contesté en paroles. En pratique… Dans un post, il est indiqué une volonté d’éviter le trafic de transit devant la gare, en se limitant à la desserte. Ce serait un progrès. Mais un quartier sans voitures, cela existe et ce serait une anticipation plus forte. Un parking à l’entrée du quartier, des vélos cargos en libre service, etc, etc.

Pour la mise en valeur de l’Adour, on pourrait faire preuve de plus d’imagination que l’amélioration de ce qui existe déjà. Si l’état de l’Adour (en amont du port) le permet, pourquoi pas une piscine fluviale, comme projeté à Paris, et comme il en existe justement une… à Zurich, ville de Güller & Güller. Pour le lien entre les deux rives, un post parle de relancer en 2024 la navette entre la mairie et Boucau, supprimée cette année faute de passagers (en réalité un problème d’intégration très insuffisante dans le schéma de déplacements collectifs de l’agglo). Pour une liaison directe entre les deux rives, on pourrait imaginer une passerelle pour piétons et vélos, ou une télécabine (comme à Toulouse), ou une simple barge avec un câble électrique…

Pour la végétalisation (et ses conséquences sur le climat et la biodiversité), dans les posts, cela reste dans le flou usuel : si on doit couper des arbres (inévitable bien sûr), on les replantera. Vu les friches, on peut supposer que la réalisation de ce quartier passera par de l’artificialisation supplémentaire. Où est une réflexion globale ? Plus profondément, cela renvoie à la conception de la nature, pour son usage social ou pour elle-même, au travail de Gilles Clément notamment.

Pour le risque d’inondation, la CAPB tiendra évidemment compte du PPRI. Et le bureau d’études Egis, partenaire de Güller & Güller va s’atteler à la modélisation. On attend donc le résultat de ce travail. Mais on ne peut qu’être dubitatif quand à la mise en pratique par la CAPB, quand on voit la situation de l’îlot Bergeret au bord de l’Adour à Saint Esprit, qui n’est même pas officiellement en zone inondable, où la construction dans la nappe phréatique n’a pas été maîtrisée.

En se présentant comme des réponses à des FAQ, les posts du facebook officiel du projet RDA n’ont pas manqué – y compris par les non dits – de provoquer d’autres interrogations. Peut-être en saura-t-on plus à l’atelier du 13 septembre ? Mais en l’absence de retour écrit des bureaux d’études, cela risque de manquer de substance.

Patrick Petitjean, 3 septembre 2023

Zubi Mayou à Bayonne : un projet exemplaire. Vraiment ?

(grue effondrée vue d’un 8e étage)

Un projet de résidence sociale participative pour seniors en questions

Le Collectif 22-Bergeret a été formé par des riverains en mars 2022 au lendemain de la chute de la grue, moins de 24h après son installation sur le chantier, qui a provoqué la mort du grutier, Mohamed Kichouhi.

Depuis, on a l’impression que les responsables (Ville, COL, Domofrance, Association) veulent « annuler » cette mort et les traumatismes collatéraux.

Sur cette parcelle, entre le quai Bergeret et le boulevard Alsace-Lorraine, devait être construits deux immeubles de 30 et 15 appartements, en accession sociale de type BRS. Le chantier est à l’arrêt depuis l’accident du 9 mars 2022.

(grue effondrée sur le boulevard)

Conférence de presse

Le Collectif a tenu une conférence de presse le 26 juin à Bayonne pour faire le point sur ses activités et sur la situation, alors qu’on s’approche du début des réparations de l’immeuble voisin, le Carré Saint-Esprit, sur lequel était tombée la grue, détruisant intégralement le dernier étage. Un échafaudage doit être installé cet été le long de l’immeuble, pour une durée de 4 ou 5 mois. L’expertise judiciaire étant conclusive sur les responsabilités, les assurances n’ont eu d’autre choix que d’avancer le financement des travaux, sans attendre le jugement définitif. Il faudra attendre encore pour que justice soit rendue à Mohamed Kichouhi et aux victimes collatérales.

Le terrain du chantier, proche de l’Adour, a la particularité d’être inondé en permanence, avant même la tentative d’installation de la grue. Aujourd’hui, c’est une mare aux canards, et aux poissons rouges. Le Collectif demande les expertises de sols, préalables aux travaux, ainsi que celle réalisée quelques mois après l’accident, sans les obtenir.

(grue dans mare)

(mare aux canards)

Le Collectif a rencontré le maire le 5 juin pour redire son opposition à la reprise du chantier tel que, et pour demander la suspension du permis de construire afin de revoir le projet en tenant compte des attentes des habitants du quartier. C’est peu dire qu’il n’a pas été entendu

Volonté d’effacement, indifférence et absence d’empathie

La Ville et les opérateurs immobiliers (le COL et Domofrance) veulent avant tout effacer l’accident et rependre le chantier comme s’il ne s’était rien passé. Aucun n’était présent lors de l’hommage rendu à Mohamed Kichouhi le 9 mars de cette année.

(hommage 9 mars 2023)

(chaîne à l’endroit où la grue était tombée sur le boulevard)

Un an après la chute de la grue boulevard Alsace Lorraine, hommage au grutier décédé dans l’accident. Rassemblement sur le tracé de la chute de la grue. Bayonne. 9 mars 2023.

L’indifférence par rapport aux victimes se double de l’impatience réaffirmée de prendre le chantier au plus vite. Reprise d’abord annoncée pour ce printemps maintenant pour cet automne. Ils veulent profiter des travaux sur le Carré pour reprendre leur construction en parallèle, même si la coexistence d’un échafaudage et d’une grue semble techniquement problématique.

Le Collectif n’a pas perçu la moindre empathie de leur part depuis l’accident. Les victimes, ce sont d’abord le grutier et sa famille, ce sont aussi des femmes, des hommes, du Carré et du voisinage, ce n’est pas le COL, Domofrance ou Lapix qui se plaignent des coûts dus aux retards

Le Collectif refuse un tel effacement et défend la mémoire du grutier.

C’est la raison essentielle pour laquelle il refuse la reprise du chantier et défend une révision complète du projet, et donc des modifications du PC. Il est tout-à-fait possible d’allier jardin de la mémoire, espaces vers et logements (vraiment) sociaux. Cela correspond d’ailleurs aux attentes des habitants telles que recueillies par le Collectif dans un sondage en cours

Avant d’en venir au COL, deux bizarreries de Domofrance

Si l’on en croit le PC officiel, affiché depuis 3 ans, Domofrance est le titulaire principal : 45 logements, en accession, sous le titre La Psyché.

(photo PC modificatif)

Ce qui nous interroge sur la manière dont le PLU a été appliqué par la mairie. Avec ce nombre de logements, 45, il aurait eu y avoir, selon le PLU, du locatif social, pas seulement de l’accession sociale. Ce n’est pas le cas à notre connaissance. Comme il y a 2 bâtiments, un de 30 logements pour Domofrance, et un de 15 pour le COL, faut-il en déduire que l’application du PLU peut-être fractionnée sur chaque bâtiment ? Cela mériterait des explications de Domofrance et du maire.

Sur le site de Domofrance, depuis le 23/6/21, une page est consacrée à la promotion des BRS et à leur commercialisation par sa filiale ExterrA. Une première opération exemplaire était mise en exergue, avec une présentation complète : La Psyché. Curieusement, depuis quelques mois, la page BRS du site a été « purgée » de toute mention de La Psyché. Pourquoi cette disparition ?

Zubi Mayou

Confié par le maire de Bayonne à l’association « Âge et partage 64 », le partie COL du projet comporte 15 appartements en BRS pour une « résidence sociale participative seniors ». Cette résidence, Zubi Mayou, est défendue comme social et exemplaire. Mais suscite une méfiance de plus en plus grande, voire maintenant un rejet, de la part des riverains.

Le Collectif 22-Bergeret en est venu à s’interroger sur les origines et sur l’exemplarité du projet. Il a été particulièrement échaudé par un entretien donné par l’association à Sud Ouest le 5 juin, le jour même où le Collectif rencontrait le maire de Bayonne, pas un hasard.

L’Association avait disparu depuis l’accident, et n’avait jamais manifesté la moindre empathie enver les victimes. Elle avait été absente lors de la commémoration en mémoire du grutier le 9 mars 2023. Là, elle réapparaît pour annoncer la reprise prochaine du chantier de construction, en se faisant photographier devant une palissade du chantier comme pour dire : Nous sommes de retour, nous sommes chez nous, nous prenons possession du lieu. Les riverains ont été choqués par cette volonté d’effacement de ce qui s’est passé depuis 15 mois, par ce cynisme « Âge et partage 64 » n’est pas concernée a-t-elle déclaré au journaliste.

(la palissade qui a servi de toile de fond pour l’entretien de l’Association le 5 juin)

Des BRS pour propriétaires ?

A la lecture de l’entretien avec « Âge et Partage 64 » dans Sud Ouest du 5 juin 2023, le Collectif a appris que les membres de l’Association étaient déjà des propriétaires, même si leurs revenus restent sous le plafond d’accession aux BRS.

Les BRS sont en principe faits pour les primo-accédants, sans que ce soit une obligation. Ils sont considérés comme du logement social dans la loi SRU, même si ce n’est pas ce que demandent les 5000 inscrits à Bayonne pour avoir un logement locatif social. Les besoins, dans notre quartier comme ailleurs sont de la location sociale, pas de l’accession,même sociale.

Des BRS pour des déjà-propriétaires, c’est autre chose. Parler de logement social pour Zubi Mayou, avec des déjà-propriétaires, est donc assez mystificateur, voire provocateur envers les demandeurs de logement.

Dans sa communication, le COL dit que le « parcours résidentiel » typique fait que se libère un locatif social lorqu’il construit un BRS. Ce n’est pas le cas avec les déjà-propriétaires de Bizi Mayou. Que reste-t-il alors de la légitimité « logement social » du projet du COL dans ces conditions ?

Ni coopérative, ni habitat social, une copropriété

Lors de la constitution du groupe d’habitants en septembre 2017, si l’on en croit un article de Sud Ouest le 27.9.17, référence était faite à des projets similaires pour seniors comme Chamarel à Vaux-en-Velin (livré en 2017), Boboyakas à Bègles : mais ce sont des coopératives, de la propriété collective, solidaire. Les Babayagas à Montreuil étaient aussi mentionnées : mais c’est de la location sociale. A ‘époque donc, le choix d’un modèle par l’Association semble encore ouvert.

Une coopérative, c’est un choix intermédiaire entre la propriété et la location. La propriété est collective, chaque famille achète des parts sociales en fonction de ses moyens, et possède une voix dans la coopérative. Elle paie une redevance à la coopérative en fonction de ses parts sociales.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2016/02/22/la-maison-des-babayagas-l-anti-maison-de-retraite-a-montreuil_4869520_3224.html

Le Collectif Bergeret défend aussi ces projets participatifs pour seniors prioritairement en coopérative.

Mais Zubi Mayou, ce n’est pas cela. C’est de la copropriété individuelle.

Pourquoi ce choix final par le COL beaucoup moins social, de propriétaires individuels ? Sans mixité sociale ni mixité intergénérationnelle ? Alors qu’en 2017, l’Association semblait hésiter entre les différents modèles, et ne pas écarter un mélange.

Pourquoi un projet en copropriété ? Sans location sociale ? Pourquoi pas en coopérative ? Pourquoi pas intergénérationnel ?

Sortie du portage foncier, mais pas de l’EPFL. Le prix du m².

Le conseil municipal de Bayonne a pris le 18 juillet 2019 une délibération pour clôturer le portage du foncier par l’EPFL de l’îlot Bergeret, et en fixer les modalités de sortie. Le foncier restera rpriété de l’EPFL et sera remboursée des annuités versées depuis 2016 à l’EPFL. C’est donc Bizitegia, l’OFS de l’EPFL (et donc de la CAPB en dernier ressort), qui conclura les BRS avec les propriétaires des appartements construits par le COL et Domofrance. Le foncier ne sera pas rétrocédé au COL ou à Domofrance. Cela donne à Bizitegia le pouvoir de vérifier que les postulants répondent bien aux critères des BRS et de définir ce qui se passe en cas de décès pour maintenir la définition « résidence seniors ».

La délibération du conseil municipal a fixé le montant de la redevance (1,5 euros par mois et par m²) pour le foncier, sa durée (60 ans), qui est indexée sur l’indice de la construction. Il a surtout fixé le prix des appartements : 30 % en dessous du prix du marché.

Pour des déja-propriétaires, cela pose question. Selon l’association (Sud Ouest, 5.6.23) le prix a été fixé par le COL à 2600 euros du m². En zone tendue, nous sommes dans des prix spéculatifs : avec vue sur l’Adour, à côté du futur Zubi Mayou, le prix atteint près de 6000 euros le m². À côté, le prix proposé par le COL, c’est cadeau. D’autant plus que pour acheter avec un BRS, les déjà-propriétaires devront vendre leur résidence actuelle. A des prix du marché…

(maquette du futur Zubi Mayou)

Attribution discrétionnaire : quel mode de décision et annonce publique?

Quand d’autres villes attribuent du foncier public à des groupes d’habitants déjà constitués, c’est sur la base d’appel à projets. Ainsi, la ville de Paris, pionnière en la matière, a lancé en 2013 un appel à projets pour 3 parcelles. Il y a eu une trentaine de groupes candidats.

Pour Bayonne, un tel appel à projets pour une résidence seniors a-t-il existé pour la parcelle du 22 quai Bergeret ? Il n’y en a pas trace, ni dans les arhives de Sud Ouest, ni dans la mémoire des habitants de Saint-Esprit. S’agit-il d’une attribution discrétionnaire par le maire de Bayonne, tant Zubi Mayou était exemplaire ?

On peut le craindre. Dans le 1er article, fin septembre 2017, l’Association dit ne pas encore avoir de foncier pour son projet et annonce des rencontres avec les maires d’Anglet, Bayonne et Biarritz. Mais dans le 2e, le 3 octobre 2018, tout semble réglé. La ville de Bayonne leur a proposé le terrain du 22 quai Begeret, et le COL s’est engagé derrière l’association pour la construction. Le permis de construire pour Zubi Mayou aurait même été déposé (en fait, comme le bâtiment prévu n’était pas conforme et nécessitait une révision préalable du PLU, qui aura lieu en 2019, et le PC n’a pu être déposé qu’en décembre 2019). Dans le Sud Ouest du 3.10.18, les animatrices de l’Association se font photographier devant la maison basque du 22 quai Bergeret destinée à être démolie.

La date de livraison des appartements est pour le 1er semestre 2021…

(maison du 22 quai Bergeret avant démolition)

Parachutage à Saint Esprit

En général, pour l’habitat participatif, les bailleurs constituent eux-mêmes les groupes d’habitants, en organisant des réunions d’habitants candidats dans le quartier concerné. Ils n’aiment pas trop, en général, les groupes déjà constitués en dehors d’eux. HSA a procédé ainsi avec un appel public pour son habitat participatif au Prissé. Le COL lui-même a procédé ainsi pour son habitat participatif de l’îlot Vigilant, à Saint Esprit, à quelques rues de l’îlot Bergeret. Après ces appels publics HSA et le COL constituent les groupes.

Mais pour Zubi Mayou, les riverains n’ont pas souvenir d’un appel public dans le quartier pour ce projet, ni même d’une simple réunion d’information pour le leur présenter. « Âge et partage 64 » a été constituée à Anglet, pourquoi pas, elle est légitime à venir s’installer à Bayonne, Mais cette manière de le faire ressemble à du parachutage, au nom de l’exemplarité du projet.

Quel objectif pour le COL ?

Reste la question de la stratégie du COL et de ses relations avec l’Association. La présidente de l’Association est une ancienne présidente du COL, toujours membre de son conseil d’administration, également représentante du COL au conseil d’administration de l’union des coopératives HLM, de plus présidente de l’association des coopérateurs du COL. Le moins que l’on puisse dire est que l’Association est organiquement liée au COL. Faut-il y voir l’origine de la volonté du COL de mener coûte que coûte ce projet, de son mode parachutage qui tranche avec d’autres projets soutenus par le COL ? L’origine de l’attribution discrétionnaire du terrain par le maire de Bayonne ?

On peut s’interroger aussi sur ce qui a conduit au modèle d’une copropriété et non d’une coopérative ou d’une mixité ? C’est sans doute plus simple et plus reproductible pour le COL. Faut-il alors y voir une stratégie de développement du COL sur le créneau des résidences sociales pour seniors, en utilisant Zubi Mayou comme un produit d’appel ? Entre les EHPAD et les Senioriales (inaccessibles aux personnes modestes), il y a nécessité de modèles accessibles, plus humains, plus respectueux des personnes âgées. Et des résidences participatives en BRS, promues par le COL jusqu’à Toulouse, peuvent y contribuer.

D’autres modèles exemplaires de résidences seniors participatives

Plus haut, ont été mentionnées les coopératives Chamarel à Vaux-en-Velin et Boboyakas à Bègles (cette dernière ayant le soutien et la garantie financière du COL). Egalement la réalisation de la maison des Babayagas à Montreuil, en locatif social.

Au Pays basque même, l’association Gurekin promeut un habitat participatif pour personnes âgées, sous forme d’appartements à louer dans une maison partagée, avec des locaux communs, à l’intérieur ou dans un bâtiment annexe. Un partenariat avec le COL, avec à côté des appartements en BRS, permet une mixité intergénérationnelle. A Urt, une telle résidence vient d’être livrée. Une autre va voir le jour à Hasparren.

Un projet de coopérative d’habitants est en cours à Irissarry, avec la construction d’appartements dans une ancienne ferme, qui peine à obtenir le soutien de la CAPB : le modèle « coopérative d’habitants » n’a pas encore fait son chemin dans cette institution.

Pour conclure

On peut regretter qu’un projet de résidence seniors participative qui aurait pu être exemplaire ait pris cette direction et ait perdu sa légitimité. Comme l’ensemble du projet, elle doit être remise en cause

Le Collectif a demandé lors de la rencontre du 5 juin avec le maire, et persiste à le demander, la mise en œuvre à court terme d’un processus de concertation sur l’avenir de l’îlot Bergeret analogue à celui que la CAPB conduit pour le projet voisin « Rive droite de l’Adour », partant des attentes des habitants et débouchant sur des propositions de modification du PC. Ceci, en préalable à la reprise du chantier.

En tout état de cause, le Collectif n’accepte pas l’« annulation » de l’accident mortel et de ses conséquences par les promoteurs de cette opération.

Patrick Petitjean, 3 juillet 2023

Annexes

Synthèse de la chronologie

– Des préemptions de l’EPFL pour la ville entre 2015 et 2016

– Une association pour une « résidence sociale seniors » déclarée le 3/8/17 et constituée fin septembre 2017 à Anglet

– Avril 2018, une modification du POS est lancée pour l’adapter aux projet Bergeret (aau lieu que ces projets s’adaptent au POS. Curieuse politique municipale. C’est la 16e modification du POS de Bayonne). Elle donne lieu à une enquête publique en juin-juillet 2019. Le rapport du commissaire enquêteur mentionne le projet de résidence seniors du COL comme motif de la modification du PLU.

– Entre temps, le 18 juillet 2019, le Conseil municipal de Bayonne décide de clôturer le portage foncier et en définit les modalités : voir plus haut.

– Cette modification est adoptée le 9/11/19 par le Conseil de la CAPB, et le PC déposé conjointement par le COL et Domofrance dans la foulée le 6/12/19. L’immeuble Zubi Mayou avait été défini bien avant ce dépôt.

– Le PC a été accordé le 29/5/20, et les travaux engagés dans la foulée.

– Le 15 avril 2022, de légères modifications sont accordées au PC

– Le 9 mars 2022, la grue est tombée, Mohamed Kichoui est mort, et le chantier est arrêté.

Glossaire

BRS : Bail Réel Solidaire

CAPB : Communauté d’Agglomération du Pays basque

COL : Comité Ouvrier pour le Logement (coopérative HLM)

Domofrance (bailleur social)

EHPAD : Etablisement Hospitalier pour Personnes Âgées Dépendantes

EPFL : Etablissement Public Foncier Local

HSA : Habitat Sud Atlantique (bailleur social de la CAPB)

OFS : Office Foncier Solidaire

PC : Permis de Construire

PLU : Plan Local d’Urbanisme

SRU : Solidarité et Rénovation Urbaine (loi pour forcer la construction de logements sociaux)

Articles antérieurs sur le sujet

https://lepimentbayonnais.fr/2023/05/26/bergeret-a-saint-esprit-2/

https://lepimentbayonnais.fr/2023/05/26/bergeret-a-saint-esprit/

https://lepimentbayonnais.fr/2023/05/26/bergeret-a-saint-esprit-4/

Plateau urbain débarque à Bayonne

(entrée de l’hôpital Saint Vincent de Paul à Paris)

Une future occupation transitoire très cadrée

Parmi les 4 marchés passés pour aider la CAPB dans les débuts du projet « Rive Droite de l’Adour », l’un est intitulé « définition d’un projet d’occupation transitoire sur le site du projet RDA ».

A la demande d’avoir le cahier des charges pour un éventuel appel d’offres pour ce marché, l’administration a répondu que le marché avait juste été attribué à Plateau Urbain sur la base d’un devis, qu’elle a communiqué. Officiellement donc, pas d’appel d’offres, pas de choix alternatif. La notoriété de Plateau urbain écrasait une éventuelle concurrence.

L’intervention de Plateau urbain est facturée 22 150 euros HT. Ce marché avait été signé dès le printemps 2022.

Selon le président-maire lors de l’atelier du 25 mai, où Plateau Urbain (peut-être présent) ne s’est pas exprimé, leur intervention était déjà en cours.

Les différentes fonctions de Plateau urbain

https://www.plateau-urbain.com/

C’est une agence de création récente (2013), célèbre surtout par l’animation du site de l’hôpital Saint Vincent de Paul à Paris 14e entre 2015 et 2020. Son développement est fulgurant ces dernières années.

(Une des cours à l’entrée de l’hôpital Saint Vincent de Paul)

Il y a deux branches principales : Etudes et conseils, et gestion transitoire de lieux.

C’est cette 2e branche que Mauritzia qualifiait de R’Bnb de l’urbanisme transitoire. Plateau Urbain gère plusieurs dizaines de lieux, en attente de projets définitifs, dans de nombreuses villes. Cela va d’un petit bâtiment (un garage par exemple) à une ancienne université (ex-Censier à Paris), et peut donc concerner quelques structures à près de 200. Lesquelles sont louées, après un appel d’offres.

Les réalisations en cours sont ici : https://www.plateau-urbain.com/cesure

Pour les études, on en compte une cinquantaine, dont la majorité encore en cours. Celle pour la CAPB n’eset pas à ce jour répertoriée sur leur site : https://www.plateau-urbain.com/copieetudes

Les modalités de leurs interventions y sont décrites

(Sur le site des Grands Voisins, hôpital Saint Vincent de Paul)

Plateau urbain à Bayonne

Le devis à la base du marché consiste en une simple page, à télécharger si dessous.

(page devis)

La première phase de l’intervention (1/4 du devis) est la formation des élus et techniciens de la ville et de la CAPB aux problématiques de l’urbanisme transitoire.

La deuxième phase est « l’identification des opportunités spatiales et temporelles en vue d’une occupation temporaire à travers une analyse capacitaire du site », avec essentiellement des visites du site et des entretiens avec les gestionnaires et occupants actuels, ainsi que l’identification des « besoins et attentes programmatiques pour le site », avec des entretiens avec « les têtes de réseaux des champs de la culture, action sociale, vie économique, artisanat, évènementiel,… »avec enfin une analyse du marché locatif alternatif.

La dernière phase consistera en la définition des intentions stratégiques secteur par secteur, bâtiment par bâtiment se concluant par la présentation de plusieurs scénarios d’orientations. En plus des réunions de pilotage régulières, l’intervention se conclura avec un atelier de « définition de l’occupation temporaire avec les parties prenantes »

Au total, 8,5 de travail pour le directeur du projet, et 14 jours pour son adjoint. La durée de la mission n’est pas précisée. Même si des entretiens avec des acteurs locaux sont en principe au programme (on verra leur effectivité), cette intervention semble très fermée sur le commanditaire, et peu ouverte vers des acteurs potentiels plus éloignés de l’appareil municipal. Encore une occasion ratée.

(Grands Voisins sur le facebook de RDA))

La présentation officielle de l’intervention de Plateau urbain à Bayonne se trouve sur la page facebook « Rive droite de l’Adour » du 6 juin :

« Projet « Rive Droite de l’Adour » : urbanisme temporaire | Entre conception, études préalables, délais d’instruction des permis de construire, marchés publics de sélection des entreprises de travaux… un projet urbain comme le #projetrivedroitedeladour sera long à se concrétiser.

👉 D’ici là, la Ville de Bayonne et la Communauté d’agglomération Pays Basque ne laisseront pas les terrains vacants et inutilisés. Elles ont confié à la coopérative Plateau Urbain la tâche de développer un programme « d’urbanisme transitoire ». Il s’agit d’ouvrir au public des espaces d’expérimentation et de préfiguration du quartier à venir. Concrètement, le site sera mis à profit pour apporter temporairement de nouveaux services ou offres, culturelle par exemple. Cette programmation est encore en cours d’élaboration. Que proposeriez-vous ? »

Sans doute faut-il prendre au 1er degré la fin du post, et non comme de l’ironie. Mauritzia a proposé une occupation intercalaire en squattant le 16 rue Sainte Ursule, complètement dans l’otique « social et solidaire » affichée par Plateau urbain et la CAPB. La réponse fut l’envoi de la police pour les déloger.

On pouvait espérer un meilleur départ de l’intervention de Plateau urbain. Mais au regard des ambitions affichées il y a 10 ans, leur intégration au jeu de l’urbanisme libéral est complète.

Patrick Petitjean, 25 juin 2023

Zubi Mayou veut la reprise du chantier Bergeret

(photo : fresque par des habitants sur les palissades du chantier)

Billet d’humeur

Zubi Mayou est le nom du projet d’habitat participatif qui devait prendre place sur l’îlot Bergeret. Il est porté par l’association Âge et partage 64. Le jour où le collectif Bergeret, formé par les riverains au lendemain de l’accident de grue qui avait coûté la vie à Mohamed Kichoui en mars 2022, devait rencontrer le maire de Bayonne pour discuter de l’avenir du chantier, le journal Sud Ouest publie un article sur Zubi Mayou où l’association annonce la reprise du chantier en septembre. Difficile d’y voir un hasard.

Ce que raconte l’association est totalement indécent.

Indécent, parce que l’association est restée silencieuse depuis l’accident et la mort du grutier. pour avoir disparu depuis l’accident et la mort du grutier. Elle n’a jamais manifesté de solidarité ou de compassion, elle était absente lors de l’hommage en mars dernier.

Indécent, pour être venue, au bout de 15 mois, se faire photographier (photo de Sud Ouest) devant la palissade de l’ex-chantier devenu une friche, comme pour prendre possession du lieu et pour dire « c’est à nous ». En plus, devant la fresque réalisée par des riverains pas très favorables à la reprise du chantier (celle de la photo de Une du billet). Une provocation ?

Indécent, et plus encore si c’est possible, pour se plaindre des maigres revenus des membres de l’association (à peine2000 euros par mois), en même qu’ils/elles avouent être tous/toutes propriétaires de leurs logements. Le niveau de retraite doit être évalué à leur absence de loyer à payer… Des propriétaires qui bénéficient d’un logement social. Le logement social contre le mal-logement de propriétaires ? On rêve.

Indécence du COL (pour la fixation du prix de vente) et de l’association (pour se plaindre de l’augmentation depuis 2 ans : 2600 euros le m², alors que le jour même, le prix moyen du neuf dans le quartier était évalué dans le journal autour de 4000 euros, certainement beaucoup plus pour des appartements sans vis-à-vis, avec vue sur l’Adour et la rive gauche, donnant sur le sud.

Et toujours cette question lancinante : alors que pour des projets de logement participatif social en BRS, comme celui d’HSA au Prissé ou du COL lui-même pour l’îlot « Vigilant » à Saint Esprit, font des appels publics à candidatures, réunissent les candidat.e.s, soupèsent leurs motivations et solidité, comment le choix des adhérent.e.s d’Age et partage 64 a-t-il été fait ? S’agit-il de relations amicales entre le COL la mairie de Bayonne et la présidente de l’association, ancienne présidente du COL et toujours présidente de l’association des coopérateurs COL ? L’opacité serait à lever

On nous dit aussi que c’est un beau projet social : un habitat participatif pour personnes âgées. C’est vrai, mais qui, pour des propriétaires, ne devrait pas ressortir pas du logement social et de financement public. Les aides pour l’accession sociale sont en principe dirigées vers les primo-accédants et non des déjà-propriétaires. Argumenter du besoin en logements sociaux à Bayonne pour justifier ce projet est honteux.

Patrick Petitjean, 6 juin 2023

Bergeret à Saint Esprit (4)

Quel avenir pour l’îlot Bergeret ?

Ce printemps, canards et poissons rouges colonisent la mare

Pour les riverains, c’est l’humain d’abord. Et de ce point de vue, l’absence de représentants de la municipalité lors de l’hommage du 9 mars est scandaleuse. Mohamed Kichouhi était un habitant de la ville, et on pouvait s’attendre à un minimum de compassion du maire. Quel soutien la mairie compte-t-elle apporter à sa famille ?

La demande générale, c’est l’installation d’un jardin mémoriel sur le site. Une demande déjà formulée par le « collectif 22 Bergeret » lors d’une réunion publique en janvier, où le maire était présent. Impossible avait-il dit.

Revoir une grue sur les lieux de l’accident serait vécu comme une provocation. Parler, comme le font le COL et le maire, de reprendre les mêmes travaux dès ce printemps, en considérant l’accident comme une simple parenthèse, c’est non seulement un manque de sensibilité, mais de l’aveuglement quand à l’absence des conditions requises : l’enquête judiciaire (en cours) sur l’accident, l’expertise sur l’état du « Carré Saint-Esprit » sur lequel est tombée la grue, les indemnisations éventuelles.

Et surtout la question des analyses de sols géohydrauliques préalables au chantier (si elles ont existé) et reprises ce mois-ci : il serait inacceptable qu’elles ne soient pas présentées et discutées publiquement.

maquette de l’immeuble Zubi Mayou du COL qui aurait du être construit quai Bergeret

Garder le même projet n’est pas acceptable, d’autant plus que l’arrêt du chantier rebat les cartes. Les conceptions d’urbanisme en œuvre dans ce projet sont celles du Plan Local d’Urbanisme (PLU), adopté en 2007. Elles sont archaïques. Elles voulaient faire des continuités des façades et des hauteurs sur le boulevard Alsace Lorraine et le quai Bergeret. Ce PLU est caduque, mais le nouveau PLUi est à l’arrêt depuis 2016, semble-t-il en raison de la difficulté à y intégrer les obligations de la loi sur le « Zéro Artificialisation Net » (ZAN).

Le projet COL / Domofrance est un avatar tardif du vieux PLU. Il n’est plus adapté aux conditions actuelles : accentuation de la crise climatique et donc accélération nécessaire de la transition écologique. La canicule est aussi passé par là. La municipalité se devrait en mettre en pratique son affichage pour la transition. Elle a publié l’été dernier un « guide des bonnes pratiques » en matière d’îlots et de couloirs de fraîcheur : la bétonisation du quartier Saint-Esprit est typique des mauvaises pratiques à abandonner. Et la végétalisation sur dalle et sur terrasse prévue à Bergeret, c’est différent du végétal en pleine terre.

Coup de chance ? En l’absence de travaux pendant un an sur un chantier, il pourrait y péremption du Permis de Construire. C’est le cas pour l’îlot Bergeret. Il y a un enjeu d’interprétation : le délai d’un an s’applique-t-il pendant la durée du PC ; ou à la fin seulement ? Domofrance et le COL doivent demander la prolongation du PC, ce que le maire peut refuser. Il y a l’opportunité d’élaborer avec les habitants un autre aménagement de l’îlot qui, au-delà de l’aspect mémoriel, permette au quartier de mieux respirer, notamment en cassant le mur de béton (photo) que constitue le côté sud du boulevard Alsace-Lorraine. Qui traduise aussi la place de l’eau à côté de l’Adour. Les canards ne s’y sont pas trompés, qui se sont appropriés la mare qui occupe le trou Bergeret (voir photo) et ont fait leur le « ZAN »….

Vous avez dit logement social ?

Le principal argument avancé pour refuser la remise en cause du projet COL + Domofrance est le besoin de logements sociaux. De tels logements sont plus que nécessaires, c’est un argument massue.

Mais il y a social et social, et, à Saint Esprit comme ailleurs à Bayonne, les choix de la municipalité ne vont pas dans le sens du droit au logement. Le « locatif social » (LLS) est à la traîne : c’est ce « social »qui permet de loger les personnes avec des revenus moyens ou faibles, les jeunes, les précaires, sans compter celles et ceux qui ne voient pas dans le « « devenir propriétaire » le sens de leur vie. Dans ce qui est reconnu aussi comme logement social, il y a aussi l’accession sociale (AS) à la propriété depuis Sarkozy. Et maintenant, le « Bail Réel Solidaire » (BRS), très prisé par le COL, et que le maire de Bayonne qualifiait en décembre dernier de logement pour les classes moyennes, voire supérieures. Mais des constructions de LLS, à Saint Esprit, il n’y en a pas. Et de cet autre « social », les BRS, il n’y a que les opérations « Bergeret » et « Vigilant »

On trouve au contraire, dans un rayon de 100m autour de l’îlot Bergeret, une bonne demi-douzaine de constructions achevées depuis moins d’un an (photo) ou encore sous forme de friche (photo). Au total, près d’une cinquantaine de logements « libres » à prix de marché.

Si l’on remonte la rue Maubec, sur 500m depuis la gare, c’est encore plus catastrophique, les opérations immobilières en cours, avec plusieurs dizaines de logements, ne proposent que du « libre » : le passage du tram-bus dans cette rue met les appartements à quelques minutes du centre ville, et est un puissant vecteur de spéculation immobilière.

Une exception : à mi-chemin de cette rue, il y a la cité HLM « La Citadelle » : le bailleur HSA y gère 241 LLS. Il va en démolir 89 (voir photo), en reconstruire 89, et va ajouter 79 logements en accession sociale, au nom de la mixité sociale. De quoi faire de beaux projets participatifs en BRS.

Vous avez dit un beau projet ?

Zubi Mayou est le nom du projet que le COL veut construire quai Bergeret. Il est celui d’une association créée en août 2017, « âge et partage 64 ». Il coche toutes les cases d’un « beau projet », pour sa dimension sociale et citoyenne : habitat participatif pour personnes âgées ; bâtiment a été conçu par les futurs propriétaires ; prix au m² réduit par rapport au marché grâce à la dissociation entre le foncier et le bâti que permet le BRS renforçant l’aspect social de l’accession. Beau projet aussi avec un cadre privilégié sur les bords de l’Adour, avec une vue dégagée vers le fleuve et la rive gauche au sud. Ceci dit, Zubi Mayou resterait un beau projet avec une autre localisation à Bayonne (par exemple à La Citadelle, pas plus éloigné du centre ville) voir même à Anglet.

L’immeuble projeté (voir photo) figure depuis longtemps sur le site national de l’habitat participatif : https://www.basededonnees-habitatparticipatif-oasis.fr/?BiziMayou#menu1

Pour ce projet, on se réfère souvent à l’exemple de la maison des Babayagas à Montreuil, qui a vu le jour il y a une dizaine d’années, quand Dominique Voynet était maire. C’est aussi une résidence pour personnes âgées. Mais à mon souvenir, il s’agit de locatif et non d’accession sociale, concernant donc un public avec des revenus modestes.

Zubi Mayou se rapproche plutôt d’un autre projet, à Bègles, Boboyka-la Castagne : un groupe d’amis qui veulent vieillir ensemble, avec des valeurs de partage, d’écologie, de solidarité, d’autogestion. Mais la structure retenue n’est pas de l’accession individuelle à la propriété avec un BRS, c’est une accession collective à travers une coopérative d’habitants. BRS comme coopérative d’habitants viennent de la loi ALUR (Duflot, 2013) et également anti-spéculation. La mise en œuvre du projet de Bègles s’est avérée beaucoup plus longue et compliquée que Zubi Mayou : recherche d’un terrain, financement, emprunts… Semble-t-il, l’instruction du PC est encore en cours, plus de 10 ans après la naissance du projet. Voir le site de l’association et celui de l’habitat participatif.

https://www.basededonnees-habitatparticipatif-oasis.fr/?BoboyakA

L’îlot Bergeret mérite un beau projet. Zubi Mayou en était un, et peut être relocalisé. Une parcelle non construite pour faire respirer le quartier, un espace vert mémoriel, une mare aux canards : les idées ne manqueront pas pour un autre beau projet.

Patrick Petitjean, 15 mars 2023