Quand Stérin vient troubler nos fêtes locales

La torpeur (à défaut de sérénité) estivale basque a été troublée par la mise en lumière d’une tentative d’infiltration de 4 fêtes locales pour une association liée au milliardaire (et exilé fiscal) d’extrême-droite, Pierre-Edouard Stérin, déjà propriétaire du Biarritz Olympique. Cette association « Les Plus Belles Fêtes de France » (LPBFF) décerne un « label » et différentes aides contre cotisation, pour promouvoir la « France des légendes et des terroirs ». Elle est, bien sûr, apolitique, loin de toute idéologie.

Depuis quelques mois, Stérin apparaît régulièrement dans la presse nationale en raison de son projet affiché de consacrer ses milliards pour développer l’influence de ses idées libertariennes, catholiques et ultra-conservatrices. Il a été entendu à ce sujet par une commission sénatoriale à ce sujet. Il fait l’objet d’enquête judiciaires sur le financement de candidats RN lors d’élections récentes, en utilisant des prête-noms.

Son détournement de traditionnelles « Fête des voisins » en des « Nuits du bien commun » a également fait l’objet de polémiques et de rejets. Avec notamment un dossier (public) dans Politis début juin : https://www.politis.fr/articles/2025/06/saintete-business-et-extreme-droite-la-galaxie-cachee-de-pierre-edouard-sterin/

Mais l’existence du label LPBFF était restée discrète jusqu’à son apparition le 10 juillet au fil d’une série estivale (pour abonné.es) du journal L’Humanité : dans son n°42, on apprenait que Stérin, via son holding Otium était entré au capital de la société Studio 496, maison-mère de l’association LPBFF (mêmes dirigeants)

Le 25 juillet, un reportage de Politis (mais réservé aux abonné.es) « Pas de fachos dans nos fêtes de village », concernant le rassemblement annuel du MRJC mi-juillet, fait état de l’entrisme de Stérin dans les fêtes locales avec cette labellisation. A l’opposé, le MRJC appelle à défendre le rôle des fêtes de villages dans le lien social et la lutte contre l’extrême-droite.

Enfin le 28 juillet, dans un blog sur Mediapart, un mediateur culturel breton prend la défense du « Festival des filets bleus » à Concarneau, qui a 120 ans d’existence, et se tient en solidarité avec les marins. Il décrit les tentatives de l’association LPBFF de profiter des difficultés financières du festival pour y imprimer sa marque, comme dans un autre festival breton, « les Celtiques de Guérande ». Il dénonce la droite locale, totalement imbriquée avec les courants catholiques conservateurs.

https://blogs.mediapart.fr/yonatan/blog/280725/la-menace-sterin-plane-sur-le-plus-vieux-festival-breton

Au Pays basque

Une enquête fouillée (article payant) dans Mediabask, publiée en fin de journée le 1er août est à l’origine de ces rebonds basques. Mais elle-même, quelle est son origine ? Une veille sur Politis, ou l’Humanité, ou Mediapart ?

Ou encore, un billet qui a circulé le 30 juillet sur la boucle whatsapp du Comité basque de soutien NFP, qui reprenait le blog de Mediapart, et le complétant en révélant les 4 fêtes labellisées LPBFF au Pays basque, avec une capture d’écran du site de LPBFF.. Un post reproduit sur d’autres boucles. Qui a sans doute atteint le maire d’Hendaye via des militants NFP d’Hendaye, ledit maire ayant par la suite expliqué qu’il avait délabellisé sa fête dès le 30 juillet.

Peu importe. Dès le 1er juillet, ville d’Hendaye se désengageait du label, estimant avoir été trompée.

Le 2 août, France Bleu publiait sa propre enquête, fouillée elle aussi.

https://www.francebleu.fr/infos/politique/fetes-basques-labelisees-plus-belles-fetes-de-france-par-une-association-proche-de-l-extreme-droite-hendaye-se-retire-8616753

Le 3 août, Hasparren se retirait à son tour du label. Le 4 août enfin, s’appuyant sur les enquêtes précédentes, Sud-Ouest en faisait sa Une et publiait son propre article.

Les réactions des 4 villes

Ces articles ont permis d’en savoir plus sur les manières de procéder de LPBFF, les motivations des villes pour demander le label, et leur réaction après la publicité (négative) faite début août.

Pour Hendaye (Hiri Besta) : il y avait l’opportunité de récupérer certaines subventions. On ne savait pas pour Stérin. « On s’est un peu fait avoir ». La ville avait vu passer une annonce sur un site officiel, avec des possibilités de subvention : « Les services finances et animation de la Ville ont repéré un appel à projets sur le site Aides et Territoires des services de l’État. Lorsque nos services ont pris contact avec l’association, nous pensions naturellement, puisque nous avions découvert l’appel via un site officiel de l’État, qu’il s’agissait d’un projet sérieux et d’un organisme fiable » (Sud Ouest, 5 août). 

Pour Hasparren (Lehengo Hazparne) : C’est la 2e ville basque à avoir été contactée par LPBFF. A la clé, la promesse du futur guide Michelin des fêtes, 3 200 euros dont 1 200 pour un reportage photo. Mais pas de dispense pour payer l’adhésion. Une fois accordée, cette labellisation avait l’objet d’un article dans Sud Ouest le 25 juillet. Une semaine après, la ville se désengage avant d’avoir touché la subvention promise.

Pour Bidache : les organisateurs en entendent parler dans les médias. Tant qu’il n’y a pas de ligne idéologique imposée, l’arrière cour du label ne pose pas de problème. Les organisateurs se disent rassurés par la caution du Sénat et de Stéphane Bern (!). Pour eux, l’histoire ne se falsifie pas, Bidache n’est pas Puy du Fou. De signaler aussi le soutien de la députée socialiste, Colette Capdevielle.

Pour Espelette : le label est à l’origine du démarchage de la fête du piment. On leur a promis une adhésion gratuite, la réduction des droits à verser à la SACEM, une subvention de 2 000 euros, incluant un reportage photo et video pour 1200 euros, et la mention dans un futur guide Michelin des fêtes. In fine, le maire d’Espelette reconnaît un certain malaise : « ça ne me plaît pas du tout ».

Selon France Bleu, « la fête du piment fait alors partie des 12 premiers labellisés, avec la fête de Jeanne d’Arc d’Orléans ou encore le carnaval de Grandville dans la Manche. Le label est décerné début juin dans un salon du Sénat à Paris, lors une cérémonie à laquelle assiste Romain Casemajor. ».

Le lancement officiel du label le 2 juin au Sénat

Tous les détails sont dans ce communiqué officiel :

https://www.lesplusbellesfetesdefrance.fr/actualites/les-plus-belles-fetes-de-france-celebrees-au-senat

L’initiative est organisée par Laurence Garnier, sénatrice LR de Loire-Atlantique, qui coche toutes cases de la catho réac (anti-IVG, anti mariage pour tous, etc), pour laquelle le front républicain était une entreprise de confiscation démocratique. Ce lancement a bénéficié d’un reportage enthousiaste du site d’extrême-droite Boulevard Voltaire.

Si l’on en croit la majorité des 12 premières labellisation, les distributeurs du label semblent apprécier les reconstitutions historiques et les traditions gastronomiques. Plus largement, les 4 fêtes du Pays Basque retenues sont dans ce cas, comme les 60 labellisées dans cette première vague.

En période de vaches maigres les candidatures ont été nombreuses.

Selon le site officiel du label, https://www.lesplusbellesfetesdefrance.fr/ tout est lisse, désintéressé, neutre politiquement, pour sauvegarder notre patrimoine immatériel…

Officiellement le label a été lancé en 2024 pour « soutenir les fêtes locales, valoriser l’investissement des bénévoles et les savoir-faire locaux ». L’adhésion annuelle est de 150 eurs contre fournitures de services (formations, communication, signalétique, billeterie, visibilité,…) plus une éventuelle subvention jusqu’à 6 000 euros

L’association a 100 adhérents. Sur les 60 labels, dont 7 en Bretagne et donc 4 au PB. Dans l’agenda aussi, il y a le « toro de fuego » à Biarritz, mais non labellisé.

Les labels sont accordés par un comité d’experts (journalistes, élus, etc) réputé plein de cathos conservateurs, mais très opaque sur sa composition nominale.

Pour en savoir plus, et notamment sur la galaxie Stérin, il faut revenir sur les articles de Mediapart, Politis et l’Humanité.

Selon Thibault Farrenq, le fondateur du label, c’est « la première franchise des fêtes traditionnellese France ». Celui-ci a été suppléant lors des dernières législatives d’un candidat ciottiste/RN en Vendée. Politiquement neutre ?

Parmi la centaine de compagnie de la galaxie, on trouve Studio 496, maison-mère de l’association, fondé également par Farrenq. Otium est entré au printemps au capital de Studio 496. La compagnie se présente comme prestataire « évènementiel » pour le label. Mais une recherche de Radio France sur linkedln a mis en évidence que les collaborateurs du label sont aussi membres de Studio 496pour beaucoup.

Le label, à ses débuts, avait la même adresse que « Le Bien commun », pilier du mécénat d’inspiration conservatrice de Stérin.

Parmi les partenaires du label, on trouve aussi Neo.tv qui est la maison mère de Lou Media, financé par Stérin

Vigilance

Il faut vouloir débusquer des éventuels projets politiques derrière des actions de mécenat, particulièrement attirantes (les aides financières et la communication) quand les ressources financières habituelles s’amenuisent.

Stérin et ses amis choisissent des thèmes consensuels (l’éducation, la culture, la convivialité avec la Nuit du bien commun et les Fêtes de village), voire même populaires. Plus la façade se dit apolitique, plus la vigilance s’impose.

Mais il est des reconstitutions historiques, ou des célébrations, dont la neutralité politique n’est qu’un mince rideau. Comme l’écrit l’Humanité, « Des centaines d’événements labellisés, des dizaines d’autres sous franchise, des banquets franchouillards au pinard-saucisson… Avec ses billes dans Studio 496 et le Canon français, le financier du plan Périclès visant à faire gagner les droites extrêmes entend souffler la naphtaline sur les passions et émotions collectives. Mais quand le milliardaire articule ses investissements avec les objectifs idéologiques, politiques et électoraux décrits dans son plan Périclès, ce petit talent individuel tourne au grand danger public ».

Les méthodes suivies sont aussi révélatrices de l’existence d’une face cachée : dissimulation derrière de l’institutionnel (le Sénat, le site gouvernemental Aides et Territoires, la Gazette des Communes, etc). Comment être plus légitimé ? Appuis sur le guide Michelin aussi. Le récit du lancement du label au Sénat est exemplaire de ce point de vue

Tout est bon pour se créer des réseaux d’amis et attirer dans les filets de Stérin, avec l’influence idéologique qui va avec, que ce soit de manière camouflée ou plus directe.

La vigilance démocratique et indispensable, elle l’a encore montrée dans cette affaire.

Patrick Petitjean, 5 août 2025

Extraits du dossier de Politis en juin 2025

L’entourage du maire de Lyon, lui, décrit la stratégie du milliardaire : « Un vernis bienveillant qui cache une tentative de structurer un réseau conservateur. » « La philanthropie est le cheval de Troie parfait. Et, en France, son lien avec l’extrême droite est très peu documenté », regrette, de son côté, l’entrepreneure sociale, Alice Barbe. La Nuit du bien commun souhaite « engager la société, de façon ouverte, apolitique et aconfessionnelle, au service du Bien Commun », un camouflage.

« Nous avons compris qu’il y avait cette intention de truster le monde associatif en profitant de la précarité économique de ce secteur », dénonce Yoann Garreau, directeur de la Ligue de l’enseignement de l’Indre-et-Loire. Lors de l’édition de l’année dernière, une dizaine d’associations réunies au sein de cette fédération ont été approchées par la structure stérinienne. C’est à ce moment-là que la Ligue de l’Enseignement du département a sonné l’alerte.

Pour Yoann Garreau, l’objectif des Nuits du bien commun est « de créer au sein des associations lauréates un effet de dépendance avec des personnalités issues de l’écosystème Stérin ». Un point de vue fondée sur de la « spéculation », rétorque Thomas Tixier. « Périclès et la Nuit du bien commun n’ont aucun lien », affirme-t-il.

« Le monde associatif selon Stérin, ce sont des philanthropes qui décident de qui mérite d’avoir des donations », regrette Céline. Le tout, selon des critères très flous. Retenus sur dossier, les candidats doivent ensuite passer « un grand oral » devant un jury composé du comité de soutien de chaque ville partenaire, lequel est constitué d’entrepreneurs, d’élus locaux, etc. Jetant le trouble dans plusieurs villes sur le parcours politique de ces membres.

Une nouvelle stratégie d’entrisme pour celui qui veut faire gagner au moins 1 000 mairies à la droite et à l’extrême droite aux municipales l’an prochain et un nouveau volet de sa charité, à l’image des Nuits du bien commun. Ici, il s’agit de voler au secours des fêtes populaires qui disparaissent progressivement et manquent de soutien financier, grâce à un label qui promet 10 000 euros à la clé d’un processus de sélection.

La forêt humide du Habas, un discret joyau de Bayonne

La forêt humide du Habas, au nord de Bayonne, entre la cité populaire Habas La Plaine et Tarnos, est un des rares vestiges des espaces agricoles et boisés qui couvraient les collines au nord de l’Adour, à Bayonne et Boucau. Comme le bois Guilhou, son homologue au Boucau, elle est classée comme « espace naturel sensible » par le Département 64. Une réserve de biodiversité et de paysages, à préserver et à redécouvrir. Et à mettre prudemment en valeur.

Les espaces naturels sensibles sont des espaces protégés, placés sous la compétence du conseil départemental. Acquérir, gérer et mettre en valeur ces espaces, sont une mission assurée par le CD, en partenariat avec les CPIE (Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement). Deux CPIE sont labellisés au Pays basque, celui de Baïgorry et celui d’Abbadia. Ils organisent des sorties « Natures et Patrimoines », dont des ballades découvertes dans la forêt humide du Habas.

http://cpiepaysbasque.fr/

https://cpie-littoral-basque.eu/

Le Séqué est le nom générique utilisé pour désigner l’espace intermédiaire entre la zone dépressionnaire des Barthes de l’Adour, du Seignanx au Boucau, et les plaines de la zone littorale au nord. Il se compose de collines, encore boisées, de zones humides, de champs. Il offre une diversité faunistique et floristique imortante. Le Séqué a donné son nom à un quartier de Bayonne que le maire s’obstine à urbaniser.

Le CPIE du Pays basque a organisé le 6 mai dernier une ballade découverte de la forêt humide du Habas. Cette forêt se distingue par sa diversité écologique et ses paysages variés. Elle porte la trace des intervention humaines, notamment agricoles. Nombre de chemins, aujourd’hui en bonne partie cachés dans des sous-bois, en sont les traces.

Les parties basses, humides, abritent une flore et une faune riches, tandis que les reliefs offrent des points de vue panoramiques sur les environs. Cet espace naturel est aujourd’hui constitué en majorité de propriétés privées (plus ou moins entretenues),issues des anciennes fermes.

Il couvre 94 ha, dont la ballade a permis de découvrir une partie limitée, laissant de côté le moulin et l’étang de Habas au sud, ainsi que le domaine de Ségur à l’est.

Le Moulin du Habas (photo Le monde de Cathy)

Ballade en photos

Le point de départ se situe dans le secteur de Bellecave, au bout du chemin de Laduché, à côté des serres municipales et d’une ancienne ferme (Chirroy?). Là aussi où sont stockés les toros avant les corridas.

Serres municipales Bayonne Bayonne le 12/05/2023

On descend par un sentier qui porte les traces du « labourage » par des sangliers.

Le début du sentier
Les sangliers sont passés par là

On passe à côté d’une parcelle ex-agricole laissée en prairie entretenue, avant de traverser le ruisseau Osteys qui se jettera dans l’Adour

prairie
Pont sur l’Osteys

Le sentier remonte ensuite à l’arrière des fermes Pintan et Laporte (fruits rouges) donnant sur le chemin de Hargous. Entre Laporte et la forêt un ancien champ de maïs toujours cultivé (en légumes)

Au fond, la ferme Laporte. Au premier plan culture de légumes (ex-champ de maïs)

Côté forêt, un arboretum de l’INRAE (Institut National de l’Agronomie et de l’Environnement), où sont étudiées les maladies des bois consécutives du réchauffement climatiques. Il y a 800 arbres de 40 espèces. Les études ont débuté il y a 14 ans. Il fait partie d’une chaîne d’arboretums à proximité du littoral : l’étude doit durer 15 ans minimum, et les résultats d’ensemble sont attendus l’année prochaine, en principe.

Arboretum (photo Le monde de Cathy)

Le sentier redescend le long de l’arboretum, remonte vers un point haut, où se trouve un arbre singulier dans cette forêt : un chêne liège évadé des Landes

En contournant l’arboretum, le sentier redescend
Une chêne liège incongru

Au milieu des sous-bois, un tronc refuge de mousses et une grenouille agile

Mousses sur tronc, refuge d’insectes
Grenouille agile (mais pas trop)

On redescend vers un autre ruisseau, puis longeons l’autre côté de la prairie vue au début du circuit.

Autre ruisseau
prairie avec iris d’eau

Le circuit s’achève aux serres municipales avec vue sur la cité voisine Habas La Plaine.

Serres municipales
La Cité Habas La Plaine

Les forêts telles celles du Habas et du Bois Guilhou sont un trésor pour l’agglo et au-delà. Tant pour la préservation de la biodiversité, la lutte contre les inondations et le ressourcement des habitants. Comme patrimoine et comme richesse, ce sont des zones aussi à découvrir, à mettre en valeur. La forêt du Habas gagnerait à être davantage ouverte aux habitants et, notamment, aux scolaires. A ouvrir, mais sans la mettre en danger, de manière limitée donc.

La pression des bétonneurs n’a pas disparu

Les dernières zones naturelles sont toujours menacées à Bayonne. Elles sont souvent encore considérées par les élu.e.s comme de simples « réserves foncières », en général inscrites en zone 2AU (à urbaniser dans un futur plus ou moins lointain). C’est le cas d’un secteur végétal entre la cité Habas La Plaine et la forêt.

C’est aussi le cas du secteur Pinède, entre le Séqué et Arroussets : son urbanisation était annoncée dans les journaux il y a une quinzaine d’années. Cela semble ne plus être d’actualité heureusement. Le prochain PLUi permettra de connaître les intentions du maire.

Mais, dans le PADD (plan d’aménagement et de développement durable), un document déjà adopté par le conseil municipal, et qui donne les grands choix politiques du PLUi, deux urbanisations majeures restent programmées : celles des Séqué 3 et 4 (déjà constructible) et celle du Prissé-Lana (encore en zone 2AU).

Sur la base d’orientations d’aménagement datant de 2007, le grignotage des zones végétalisées s’est poursuivi sans relâche ces deux dernières années sur ces collines : centre d’oncologie, citadelle militaire, clinique Amade, …

Ce billet s’est concentré sur la rive droite de l’Adour. Mais entre Nive et Adour, les problématiques sont les mêmes. La plaine d’Ansot est l’autre Espace Naturel Sensible de la ville de Bayonne. Il est beaucoup plus aménagé, avec le jardin botanique, des sentiers et différentes installations très différent donc de la forêt du Habas.

De part et d’autre de l’avenue Duvergier de Hauranne, des espaces boisés sont menacés, ou ont déjà été détruits : le parc de Cantegrit et ses alentours (entre Belharra et le Chemin de Frais) en descendant vers l’Adour, et le domaine de Lana, au début de la rue qui descend vers la Nive et la plaine d’Ansot.

Dans la toponymie de Bayonne, nombreuses sont les traces de l’histoire des collines de la rive droite de l’Adour : moulins, chemins, ruisseaux, étangs, fontaines, fermes (il en reste quelques unes), pépinière. Cela peut être davantage que des traces : un patrimoine à faire vivre, à mettre en valeur. Mais surtout, il est urgent d’arrêter l’urbanisation de ces collines, de protéger les forêts subsistantes et de les mettre en valeur, de faire revivre d’anciens espaces agricoles. Face aux risques climatiques et à l’insécurité alimentaire, refaire une ceinture potagère de Bayonne est une nécessité.

Dans les prochains mois, le PLUi (qui couvre Bayonne et 4 villes de l’agglomération) va venir dans le débat public : d’abord au conseil municipal de Bayonne le 5 juin, puis au conseil de l’agglo le 21 juin. Une enquête publique aura lieu cet automne.

Le PLUi a de très nombreux enjeux essentiels, notamment sur le logement, les mobilités, les équilibres territoriaux. La sauvegarde des espaces naturels, forestiers et agricoles (ENAF) et de la biodiversité, en en est un des plus importants. Il s’agira d’obtenir un maximum de reclassement de zones 2AU vers des zones ENAF, et d’ouvrir la possibilité de reprendre des activités potagères sur d’anciennes terres agricoles.

Patrick Petitjean, le 24 mai 2025

La ZFE, c’est non

Le 1er juin, des restrictions de circulation vont être mises en place sur la bande littorale basque, suite à l’instauration d’uns Zone à Faibles Emissions (ZFE) par la CAPB. L’objectif affiché est de diminuer la pollution atmosphérique générée par la circulation automobile. Son efficacité est controversée. Mais son injustice sociale reconnue. Ses supposées vertus « écologiques » sont plus que largement effacées par le rejet de l’écologie qu’elle provoque. Pour des écologistes, c’est donc non.

Ces ZFE viennent d’une politique commune des différents états européens. Un double effet bénéfique est escompté, pour les habitants avec une meilleure qualité de l’air, et pour le climat avec une incitation à l’électrification du parc automobile. Il en existe déjà dans plusieurs agglomérations en France, ainsi que chez nos voisins basques du sud.

Une concertation publique – obligatoire – avait eu lieu à l’automne dernier. La plupart des avis avaient été négatifs, que ce soit lors de réunions d’informations ou sur le registre dématérialisé. J’en avais rendu compte dans un premier billet, qui concluait sur la nécessité d’un moratoire : https://lepimentbayonnais.fr/2024/12/01/bayonne-pour-un-moratoire-sur-la-zfe/

Le bilan de la concertation et la décision effective de la créer sont venus à l’ordre du jour du conseil communautaire du 15 février. La décision a été prise de reculer la mise en œuvre de la ZFE du 1er avril au 1er juin, une concession a-t-il été dit. Sa durée sera de 5 ans.

Salle du Conseil le 15 février

De belles envolées ont été entendues, souvent hypocrites, où, parfois, le discours pro-voitures se cachait mal derrière une dénonciation de l’injustice sociale. Mais, globalement, les critiques ont été les mêmes que celles recueillies lors de la consultation. La ZFE est passée de justesse : 96 votes favorables, 47 opposés avec 64 abstentions. Les différentes appartenances politiques se sont éclatées lors des votes.

Philippe Aramendy, maire EH Bai d’Urrugne : très critique, mais vote pour

La discussion se trouve sur la chaîne youtube de la CAPB. Il dure une heure, entre la 46′ et 1h53′ :

Un nouveau conseil communautaire est à venir le 29 mars pour définir les modalités spécifiques de la ZFE dans la CAPB : aides financières pour l’achat d’un véhicule, exemptions possibles, aide « personnalisée » pour en bénéficier…

C’est quoi la ZFE

En fonction de leur ancienneté et du carburant utilisé, les véhicules se voient attribuer une vignette nommée Crit’Air, avec un numéro de 1 à 5, du moins au plus polluant. Certaines agglos excluent dès le n°4 voire 3.

L’interdiction de circulation dans notre ZEF touchera les véhicules Crit’Air 5 et non classés. Elle s’étend sur pas moins de 11 communes littorales : Tarnos, Boucau, Bayonne, Biarritz , Anglet, Bidart, Guéthary, Saint-Jean-de-Luz, Ciboure, Urrugne, Hendaye.

Premier bug, relevé par tout le monde : l’exclusion de l’autoroute A63 de la ZFE, ce qui favorise le transit de 12 000  camions en moyenne par jour. Il paraît que c’est l’Etat qui le veut.

Quels objectifs anti pollution ?

Les ZFE visent à améliorer la qualité de l’air en réduisant les émissions de microparticules et des oxydes d’azote (NOX) afin de préserver la santé des habitants. Pour ce faire, elles interdisent la circulation des véhicules jugés les plus polluants.

Deuxième bug : Ces critères sont peu efficaces pour diminuer les émissions de particules car ils ne prennent pas en compte le poids du véhicule, les particules dues au frôtement des pneus.

Troisième bug : Les mêmes polluants atmosphériques, mais provenant d’autres sources locales, ne sont pas pris en compte : l’aéroport de Biarritz, le Port de Bayonne (avec ses accès en trains au diesel),… De plus les émissions C02 ne sont pas prises en compte comme pollution atmosphérique !

Quels véhicules sont concernés, et combien sont-ils ?

Cette mesure touche officiellement 13 234 véhicules recensés sur le territoire de l’Agglomération Pays basque, soit 5 % du parc automobile global. Pour les 2/3, ce sont des voitures, le reste étant constitué de véhicules utilitaires légers et de camions, des 2 roues motorisés. 5 505 véhicules seulement se trouvent sur le périmètre de la ZFE (Tarnos inclus donc).

Cela concerne les voitures et camionnettes essences immatriculées avant le 1er janvier 1997, les voitures et véhicules utilitaires diesel immatriculés avant le 1er janvier 2001, les poids lourds immatriculés avant le 1er octobre 2006 et les deux roues motorisés immatriculés avant le 1er juin 2000. Le nombre de véhicules concernés semble faible, ce qui est utilisé par la CAPB pour « vendre » sa ZFE.

L’arrêté voté par le conseil communautaire pour mettre en place la ZFE comporte de nombreuses exemptions. Il rappelle les exemptions obligatoires nationales et les complète pour tenir compte des spécificités locales.

Nationalement, cela concerne les véhicules « régaliens » (armée, police, etc.), les véhicules de secours, et, sous certaines conditions, les personnes en situation de handicap ou les transports en commun.

Comme pour toutes les ZFE, la CAPB était autorisée à permettre des exceptions supplémentaires, pour l’adapter localement.

Exemptions locales

La ZFE est supposée ne pas dresser d’obstacles à certaines activités économiques, et de facilité l’accès au travail. Une des avancées les plus significatives depuis la consultation est d’avoir limiter la plage horaire des interdictions entre 6h et 20h, et non pas 24h sur 24h. Et cela favorise aussi les sorties en soirée…De même, les véhicules et engins agricoles sont exemptés.

Mais la liste locale concerne aussi notamment les services d’aide à domicile ou d’accompagnement aux personnes handicapées, les commerçants non sédentaires, les livreurs de denrées périssables, etc. La liste complète est publiée sur le site de la CAPB.

Ensuite, a été introduite la notion de « petits rouleurs », effectuant moins de 8 000 km par an. Comme demandé lors de la consultation, ils et elles seront exempté.es. Par contre, la demande d’exemption les week-ends n’a pas été retenue.

Enfin, un pass ZFE de 24h, pouvant être délivré jusqu’à 24 jours dans l’année a été instauré, la concertation ayant permis d’allonger un peu le nombre de jours.

Une injustice sociale reconnue, mais une mobilisation en demi-teinte

En 2019, au niveau de l’hexagone, 38% des ménages les plus pauvres avaient un véhicule classé Crit’Air 4 ou 5, contre 10% des ménages les plus riches.

Dans la CAPB, ce sont des milliers de travailleurs qui effectuent la navette entre la côte et les communes du Pays Basque périurbain et rural ou des Landes pour se rendre sur leur lieu de travail. Pour la grande majorité des habitants, prendre la voiture est une nécessité. En l’absence d’alternative adaptée par les transports collectifs, la voiture représente bien souvent le dernier moyen pour se rendre au travail et accéder à des services essentiels.

Si le rejet des ZFE semble important dans plusieurs agglos, la mobilisation semble rester modeste au Pays basque. Lors de la concertation préalable, on avait surtout remarqué le lobby des collectionneurs de voitures (dont une partie relève des « non classés ».

Lors du conseil communautaire du 15 février, deux ou trois dizaines de manifestants sont venus interpeller les élu.es, en majorité des « motards en colère », dont on connaît la détestation d’être assimilés aux voitures pour les contrôles.

Enfin une pétition a été lancée par la France insoumise pour dire non à la Zone de Forte Exclusion. Elle avait recueilli 407 signatures le 21 février, au bout de 6 semaines. On peut toujours la signer ici : https://www.change.org/p/non-%C3%A0-la-zone-%C3%A0-forte-exclusion-dans-la-communaut%C3%A9-pays-basque-1d789d14-0cec-4e75-a9c6-fbfdff7aef73

Il faut signaler aussi des (tout) petits rassemblement hebdomadaires devant la mairie de Bayonne le samedi.

Les aides financières

Au niveau national, il s’agit de doper le marché de la voiture électrique, avec des aides à l’achat : une prime à la conversion, une surprime pour les habitants dans une ZFE, un bonus écologique, une aide à l’installation de bornes électriques de recharge, et une possibilité de prêt à taux zéron dans les ZFE. Et ce, même si le bilan écologique des véhicules électriques est plus que discutable. Quelques mauvaises langues, un peu complotistes, disent que les ZFE sont faites pour les constructeurs de voitures électriques, pas pour des questions de santé publique.

Ces aides sont cumulables avec celles que la CAPB a décidé d’ajouter au niveau local, sans doute pour tenir compte de l’injustice sociale. Elles seront précisées, ainsi que leurs modalités d’attribution, lors du prochain conseil communautaire le 29 mars.

Cette aide concernera les ménages aux revenus les plus modestes (il y aura des conditions de revenu) et les plus petites entreprises. Elle sera conditionnée à la vente ou à la mise au rebut (au contraire des aides nationales qui ne concernent que l’achat) d’un véhicule concerné par les restrictions de circulation sur la ZFE.

Pour les particuliers, l’aide de la CAPB portera sur l’acquisition ou le rétrofit (on garde la carcasse de la voiture et on remplace le moteur « old style » par un moteur électrique) d’une voiture, d’un utilitaire ou d’un deux-roues motorisé, Crit’Air 0, 1, 2 ou 3, neuf ou d’occasion (pas uniquement électrique). L’acquisition d’un vélo à assistance électrique ouvre aussi le droit à une aide spécifique.

Il y aura aussi des conditions de résidence, et une seule aide possible par foyer fiscal.

Martine Bisauta lors du Conseil du 15 février

Martine Bisauta, Vice-Présidente en charge de la transition écologiques à la CAPB, s’y était engagée lors de la concertation : il y aura bien un accompagnement personnalisé pour toutes les demandes d’aide, les exemptions, le pass, et, plus largement pour des conseils au changement de modes de déplacement pour les automobilistes soumis aux restructions, avec un entretien « mobilité » en présentiel. La participation à un tel entretien conditionnerait d’ailleurs l’octroi des aides.

Les transports collectifs comme alternative aux voitures les plus polluantes.

C’est le refrain martelé par la CAPB depuis la concertation. Chaque fois qu’un habitant concerné par les restrictions expliquait ses difficultés, il lui était opposé l’amélioration du service de TxikTxak à venir et advenue en janvier. Les pistes cyclables et le vélo électrique sont également appelés à la rescousse. Même si des efforts de rattrapage ont été fait, la CAPB est encore très à la traîne pour les transports collectifs, les T1 et T2 étant très utiles, mais servant beaucoup des vitrines.

Les solutions alternatives sont aujourd’hui insuffisamment développées pour assurer les déplacements du quotidien. Le multimodal reste difficile, peu commode. Les temps de trajets parfois rédhibitoires. De ce point de vue, la conception élargie à la mobilité de l’entretien mis en place par la CAPB sera utile.

Tout cela pour ça ?

Le dossier ZFE est sans conteste un dossier délicat pour des écologistes. Peut-on s’opposer à un mesure de diminution, même minime de la pollution, dont les effets sur la santé de chacun sont connus ? Comment s’y opposer sans conforter les populistes et les inconditionnels de la voiture ?

Mixel Esteban, conseiller EELV, lors de la séance du 15 février. A voté pour

La CAPB a fait des efforts pour des compensations sociales, on ne peut le nier. Compenser, c’est bien, mais les milieux populaires restent les principales cibles d’une ZFE dans le monde réel, pas dans celui de l’administration. Un gros SUV électrique pollue-t-il vraiment moins qu’une voiture à essence, âgée de plus de 20 ans, qui a passé tous ses contrôles techniques ?

Mais pourquoi s’obstiner à la mettre en place et se plier aux injonctions de l’Etat ? Une ville comme Montpellier a repoussé sine die sa ZFE.

Cette ZFE est non seulement injuste, elle est aussi absurde, pour toutes les sources de pollution, automobile ou autre, qui ne sont pas prises en compte. Elle l’est encore par le fait d’édicter des règles, et de multiplier les cas d’exemptions qui les contredisent.

Avec un paradoxe final : avec toutes ces exemptions, qui doivent faciliter l’acceptabilité de la ZFE, quel sera l’effet résiduel en matière de réduction de la pollution atmosphérique, et l’effet sur la santé ? Déjà que les niveaux de pollution avaient tendance à baisser spontanément, même si (en sens contraire), l’OMS va demander des normes plus contraignantes. Tout cela pour ça ?

Sans doute, les aides sociales et la multiplication des exemptions ont pu contribuer à limiter les mobilisations locales. Mais cette ZFE ne se justifie pas, même si la CAPB la fait de manière douce.

Patrick Petitjean, 23 mars 2025

Bayonne : Pour un moratoire sur la ZFE

Une consultation a eu lieu en novembre sur le projet de créer une Zone à Faibles Emissions (mobilités) sur l’agglo de Bayonne. La très grande majorité des contributions est hostile. Les propriétaires des véhicules anciens seront les plus touchés par ces restrictions de circulation. Les effets bénéfiques pour la santé semblent faibles au regard du caractère « punitif » envers les milieux populaires. L’entrée en vigueur est annoncée pour avril 2025, après une finalisation du projet lors d’un conseil communautaire en début d’année. Un moratoire serait bienvenu pour une ZFE plus juste.

Les Zones à Faibles Emissions

Des vignettes pour tous

Le principe d’une ZFE est, comme son nom l’indique, un périmètre où les véhicules les plus polluants ne sont pas autorisés à circuler. Elles sont obligatoires. Elles sont mises en place à l’échelle européenne. Il y en a déjà une douzaine en France. Au Pays basque, des ZFE se mettent en place à Bayonne, Irun, Donostia et Bilbao. Les pollutions concernées sont le dioxyde d’azote (NOx), les particules fines de catégorie PM10 (diamètre de 10µm) et PM2,5. L’émission de CO2 et de gaz à effet de serre n’est que très marginalement concernée.

En fonction de son ancienneté et de son carburant, chaque véhicule se voit attribuer une vignette « Crit’Air », avec un numéro classé de 0 à 5, du moins au plus polluant. Certains véhicules anciens ne sont pas classés. Cette vignette est obligatoire pour tous les véhicules circulant dans une ZFE.

L’objectif est de diminuer la pollution atmosphérique dont une grande partie provient du trafic routier, une contribution estimée à 61% au Pays basque pour le NOx. Les effets de cette pollution sont connus, avec plus de 40 000 décès prématurés par an en France.

L’Organisation Mondiale de la Santé définit des niveaux maximums de pollution, supposés être compatible avec la santé, bien que la pollution ne soit jamais sans effet. Il est prévu que l’OMS diminue ces seuils en 2030. Les organismes sanitaires européens (et français) s’adaptent et s’adapteront aux préconisations de l’OMS. Ces seuils sont peu dépassés dans l’agglo bayonnaise, mais le seront davantage en 2030, si la baisse de la pollution n’est pas avrée, bien que la pollution soit déjà tendanciellement en baisse : désindustrialisation, et amélioration de la qualité des automobiles.

Il ne reste aujourd’hui en France que 2 agglos (Paris et Lyon) avec des dépassements réguliers des seuils réglementaires. Il y en avait 15 en 2016 et 5 en 2020. Pour ces agglos, les ZFE sont dites « effectives » et plus contraignantes. Les restrictions vont jusqu’aux Crit’Air 3. Les autres ZFE sont dites « de vigilance ». Le calendrier de mise en place a été assoupli, mais reste officiellement fixé au 1er janvier 2025.

Dans l’agglo bayonnaise, les véhicules qui ne pourraient pas circuler dans la ZFE seraient les véhicules sans vignette Crit’Air ou avec un vignette Crit’Air 5. L’idée d’y ajouter les Crit’Air 4, un temps envisagée, n’a pas été retenue. Il n’y a pas obligation d’aller au-delà.

La ZFE de l’agglo bayonnaise

Le dossier général, et les modalités bayonnaises, se trouvent ici : https://www.communaute-paysbasque.fr/transports/la-zone-a-faibles-emissions-mobilite-zfe-m-pays-basque

Le périmètre retenu par la CAPB concerne les communes du littoral, d’Hendaye à Tarnos, incluant Bayonne et Boucau, à l’Est de la A63. Les autoroutes ne sont pas concernées, et les restrictions ne s’appliqueront pas aux accès vers les parkings relais.

Ce périmètre a été défini en tenant compte de plusieurs critères : « obligations réglementaires liées à la loi Climat et Résilience ; données socio-économiques du territoire ; localisation des personnes exposées au-dessus des seuils de protection de la santé ; cohérence de politique de santé sur l’ensemble du littoral ; enjeux de lisibilité et de compréhension pour les usagers ; nécessité de maintenir des axes hors de la ZFE-m pour le transit et l’accès à certains parcs relais ». Au final, la ZFE s’étend sur 125 km².

Les véhicules qui ne pourraient pas circuler dans la ZFE sont notamment :

  • les voitures et camionnettes essence immatriculées avant le 1er janvier 1997 ;
  • les voitures et camionnettes diesel immatriculées avant le 1er janvier 2001 ;
  • les deux roues motorisés immatriculés avant le 1er juin 2000.
  • les véhicules dont le certificat d’immatriculation porte la mention « collection »

Au total, cela représenterait 5% des véhicules immatriculés au Pays Basque selon le dossier de la CAPB, mais seulement 3% des voitures particulières des communes ZFE, soit exactement 3 956 voitures.

Le tableau ci-dessous, extrait du dossier, donne la composition du parc véhicule de l’agglo bayonnaise en 2022 en fonction de leur classement Crit’Air.

Entre 2011 et 2022, le nombre de véhicules classés Crit’Air 5 a diminué de 68%, et celui des « non classés » de 88%. Ces chiffres servent à la CAPB pour laisser entendre qu’il ne s’agit aujourd’hui que d’un nombre résiduel de véhicules concernés, qu’il va continuer à diminuer, et que de moins en moins de monde sera touché. Au point qu’on peut se poser la question : tout ça pour ça ?

Les modalités dans le projet d’arrêté

Il y aura des dérogations et des exemptions, concernant les véhicules d’« intérêt général » et d’autres pour des raisons économiques ou sociales. Certaines sont des obligations nationales. Mais plusieurs autres sont des « cadeaux » de la CAPB, détaillés à l’article 6 du projet de décret. Elles concernent principalement les professionnels.

Une question a été posée dans les contributions sur un point sensible : si les véhicules professionnels utilisés par les services d’aide et accompagnement à domicile sont clairement exemptés, ainsi que les véhicules affectés aux structures d’insertion par l’activité économique, qu’en est-il des véhicules personnels, souvent utilisés pour ces mêmes objectifs ? C’est le cas en particulier des infirmières et médecins.

Une autre dérogation locale (mais pas spécifique au Pays basque) est l’existence d’un « Pass24 », c’est à dire de la possibilité de circuler pendant 24h dans la ZFE. Leur nombre est limité à 24 par an.

Cett dérogation, comme toutes les autres doivent fait l’objet d’une demande motivée avec justificatifs. Il est annoncé que la liste et les modalités de ces dérogations sont susceptibles d’évoluer après la consultation, dans l’arrêté final.

Enfin, il y a les aides pour l’achat d’un véhicule électrique : bonus écologique, prime à la conversion, prime au retrofit. Les aides nationales sont en baisse.

La CAPB explique que les aides nationales et locales sont cumulables, et que cela peut dépasser 10 000 euros, un coût final qui reste quand même difficilement atteignable pour les personnes à faibles revenus.

Quant aux aides locales, le dossier précise « En complément des mesures financières nationales existantes et dans sa volonté de garantir le droit à la mobilité pour tous, des mesures d’accompagnement de la CAPB sont en cours de conception ». De quoi rassurer ?

La consultation sur le projet d’arrêté

Le dossier complet, notamment l’étude de pollution atmosphérique par l’Atmo, est accessible sur le site de la CAPB. On pouvait aussi mettre des contributions sur un registre dématérialisé pendant un mois. Les contributions étaient librement consultables. Il est aujourd’hui fermé, donc inaccessible, jusqu’au bilan officiel. Il y a eu 165 contributions sur ce registre.

Il y a eu deux réunions publiques, avec, à chaque fois, plusieurs dizaines de personnes, à Bayonne et Ustaritz. Les participants étaient en grande majorité opposés à la création de la ZFE.

Les 165 contributions montrent en général beaucoup d’inquiétudes. Au diapason de la question que chacun et chacune se pose, quand on a une voiture d’une certaine ancienneté : Vais-je pouvoir circuler encore ? Toutes les raisons sont bonnes pour demander davantage d’exemptions, et, même, refuser la ZFE.

C’est cette inquiétude qu’il faut voir dans des contributions parfois un brin complotiste (le Forum de Davos avec son agenda 2030 supposé vouloir tuer le petit commerce et exclure les pauvres), ou hors sujet (l’emprunte carbone). Mais aussi, il y a souvent des propositions pour amender les dérogations.

Les noirs desseins de la CAPB

La CAPB serait moins motivée par la santé des habitants que par le déficit du Trambus à combler : « Le tram-bus coutant plus cher qu’il ne rapporte, il faut donc inciter les citoyens, généralement ceux dont les moyens ne permettent pas d’acheter un véhicule électrique, d’abandonner leurs « vieux » matériels pour emprunter les transport publics. Assez pervers, non ? Et pendant ce temps, des véhicules SUV électriques de plus en plus massifs auront toute latitude pour occuper les espaces libérés par nos vieux carrosses puants… Soupçonnons donc un étrange et sinistre projet politique. D’autant que d’autres urgences se font jour. la dégradation de la côte basque et l’effondrement des falaises, la disparition des services publics à laquelle se substituent des services informatiques dématérialisés et dépersonnalisés, les problèmes cruciaux de santé publique, etc, etc. »

Véhicules de collection et modèle palois

Les propriétaires de tels véhicules, très présents lors des réunions, sont aussi très nombreux parmi les contributaires, avec souvent des arguments stéréotypés, visiblement repris d’un modèle fourni par l’association « Soupapes et Pistons ». Il s’agit d’élargir la dérogation à tous les véhicules d’un certain âge, qu’ils aient ou nom la vignette « collection », au nom de la défense du patrimoine.

Mais pas seulement, ce sont des contributions positives, qui proposent de prendre le modèle de la ZFE (en cours de finalisation) de Pau pour élargir l’ensemble des dérogations :

«  Egalité des citoyens par rapport au projet de ZFE de Pau ; Dérogation aux citoyens ayant un quotient familial inférieur à 750 € ; A tous véhicules VL Crit’Air 5 et non classés après le 31/12/1996 ; Pendant la période de 18h à 9h en semaine ; Les samedis, dimanches et jours fériés ; Aux petits rouleurs parcourant moins de 8 000 kms/an ; Par an, 52 « pass » journaliers permettant l’accès aux commerces, loisirs, vie sociale et sanitaire ; A tout véhicule de plus de 30 ans puisque faisant partie du patrimoine automobile ».

D’autres contributions reprennent certaines de ces demandes, notamment l’exemption des petits rouleurs. Et aussi, une exemption des deux-roues, qui seraient un mode écologique de déplacement, puisque limitant les embouteillages. Et encore, l’exemption des voitures en co-voiturage.

Ségrégation par l’argent

Au-delà d’argumentaires détaillés, cela relève d’une perception générale des ZFE, répandue partout, à partir du constat (largement factuel) que ce sont les personnes les plus modestes qui gardent leurs véhicules le plus longtemps, et qui sont donc les plus touchées par les ZFE. Tous les registres de l’indignation sont donc mobilisés pour dénoncer l’injustice perçue : « Sanction contre ceux qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts ; mesure discriminatoire envers les moins fortunés ; mettre à pied des population en grande difficulté ; injustices ; approche qui génère des inégalités ; stigmatise une partie de la population ; privilèges des habitants du centre de la CAPB qui ont davantage de transport ; ségrégation par l’argent… ». Et plusieurs fois « liberticide ».

En arrière-fond, cependant, on devine le non-dit du « touche pas à ma voiture » : pas besoin de mobiliser ouvertement cet argumentaire

Mise en doute de la pertinence d’une ZFE

De nombreuses contributions se scandalisent de la mise hors ZFE des autoroutes. Lors des réunions publiques, la CAPB s’est réfugié derrière l’obligation nationale de fournir un itinéraire de substitution, et donc inopérant contre la pollution.

Plus généralement, c’est la non-prise en compte des autres sources de pollution atmosphérique qui provoque l’incompréhension de contributeurs quant à la pertinence de la ZFE. Même si le dossier de l’Atmo argumente sur ce point.

Autre argument, l’idée que « ce territoire, de Tarnos à Hendaye, n’est pas une zone urbaine mais une zone rurale avec des communes, qui plus est en bande côtière et ouverte aux quatre vents ».

L’Atmo

Cet organisme, est chargé de surveiller et mesurer à l’échelle de la Nouvelle Aquitaine la pollution atmosphérique. Au sein de chaque station, l’ensemble des mesures est ensuite classé selon l’influence prédominante

concernant le polluant : influence industrielle (I) ; influence du trafic (T) ; ou influence de fond (F).

Trois d’entre elles se situent dans le périmètre d’étude et sont ainsi spécialisées :

▬ la station périurbaine de Biarritz – Hippodrome, qui mesure le NOx, les PM10, les PM2,5 et l’O3. Influence de fond (F) ;

▬ la station urbaine de Bayonne – Saint-Crouts, qui mesure le NOx les PM10 et l’O3. Influence de fond (F) ;

▬ la station urbaine d’Anglet – BAB, qui mesure le NOx et les PM10. Influence du trafic (T).

Le dossier présente un diagramme qui répartit ces différentes pollutions en fonction des sources émettrices. Le NOx vient principalement des transports. Les PM10 et PM2,5 davantage de l’agriculture, de sources naturelles, du parc résidentiel et tertiaire, et un peu des transports routiers.

La méthodologie de l’Atmo est fortement contestée dans plusieurs contributions : le faible nombre de stations de mesures et leur implantation, qui servent de base à des modélisations. Tout cela suscite du scepticisme. Il y a demande d’une plus grande transparence sur les mesures de pollution, de mesures plus fines, plus discriminantes. Quel crédit accorder par exemple à la carte des émissions simulées ci-après ?

Une contribution insiste particulièrement sur ces points. Elle émane d’un habitant de Bidart, Manuel Cervera-Mazal, qui doute que l’on puisse dresser une cartographie exhaustive de la pollution de l’air avec ces seules 3 stations, dont aucune près de l’autoroute. Il souligne que Météo-France dispose de davantage de stations, et d’une puissance de calcul importante pour des modélisations. Il en profite pour revenir sur la pollution industrielle, notamment au port de Bayonne, où il n’y a pas de station de mesure. Et de souligner le trafic routier des camions vers le port, les diesels des chemins de fers, le trafic maritime… Sans parler, mais c’est un autre problème des odeurs sulfurées dans la zone du Lazaret à Anglet.

Manuel Cervera-Mazal est par ailleurs sociologue, professeur de sociologie à l’université de Liège, spécialiste de la France insoumise et des nouveaux mouvements de contestation. Voir: https://www.youtube.com/watch?v=yy3fEwcTCMI

Txik Txak

La principale compensation avancée par la CAPB, dans le dossier comme dans les réunions publiques, est le développement de l’offre de transports publics, à travers les nouveaux itinéraires et horaires à compter de janvier prochain : une augmentation chiffrée à 30%. Avec une tarification unique sur l’ensemble du réseau, dont une solidaire selon le quotient familial.

Le dossier insiste sur la complémentarité avec le futur RER basco-landais, avec les différents services offerts par l’application TixkTxak (calculateur d’itinéraire notamment). Et surtout, avec le développement des parkings relais.

En bref, c’est tout un dispositif de réduction de la circulation automobile, donc de la pollution, dans lequel la ZFE prend place.

Les contributeurs qui en parlent semblent apprécier cette perspective, mais certains semblent pas convaincus par cette alternative à leur voiture. D’autant plus que le RER basco-landais n’est pas pour demain, que les principaux parkings relais ne sont pas pour tout de suite, et qu’ils attendent de voir l’amélioration des transports collectifs

Tout ça pour ça

Si l’on en croit la conclusion de l’enquête Atmo : « l’agglo de Bayonne ne présente pas d’enjeux majeurs pour la qualité de l’air ». La ZFE n’est-elle qu’une mesure préventive pour les futures réglementations de 2030. Quelle urgence ?

Les effets sur la pollution sont limités. Quasiment inexistants pour les PM10 et PM2,5, la réduction pour le Nox est évaluée à -14%, mais seulement à -5,6% si l’on admet une diminution au fil de l’eau (sans ZFE) de la pollution selon la dynamique actuelle. Il y a, en outre, très peu d’habitants dans les zones sensibles, susceptibles de subir des dépassements des seuils. Tout ça pour ça ?

Même si au final, la CAPB assure qu’un nombre limité de véhicules sera concerné, et que Martine Bisauta,vice-présidente de la CAPB en charge de la ZFE a promis un accompagnement personnalisé pour toutes les personnes concernées, lors de la séance du conseil de la CAPB de septembre dernier.

Il est vrai qu’un tel accompagnement est indispensable, au vu de la complexité des procédures pour accéder au « pass 24h » (24 fois par an), de l’obligation (pour l’instant, semble-t-il) de recourir à une plate-forme informatique (ce qui n’est pas toujours compatible avec les pratiques informatiques des propriétaires de vieux véhicules).

Il n’y a pas urgence. Plutôt que « contraindre, interdire, réprimer », mieux vaut un moratoire pour une ZFE plus juste, pour en améliorer les conditions. Sinon, la CAPB resterait dans l’écologie punitive.

Patrick Petitjean, le 1er décembre 2024

Déforestation à la citadelle. Plus que quelques jours pour réagir

Il reste moins d’une semaine – jusqu’au 20 septembre 17h – pour donner son avis lors de l’enquête publique concernant les aménagements projetés dans l’enceinte de la Citadelle Bergé. L’armée refuse un débat public sur la déforestation de 1,43 de forêt urbaine. Le CADE, ATTAC et le Collectif 22-Bergeret (Saint Esprit) donné le 12 septembre une conférence de presse pour appeler les habitants à refuser ce projet, en son état actuel.

Ci-après, voici le texte remis aux journalistes qui fait la synthèse des principales critiques contre ce projet.

Conférence de presse du 12.9.24, CADE, ATTAC et Collectif 22-Bergeret

L’enjeu

Il y a un fort enjeu : disparition d’un morceau de forêt urbaine (1,43 ha, ce n’est pas rien, une perte sèche malgré l’alibi d’un reclassement), et biodiversité (destruction d’habitats d’espèces protégées). Un poumon vert et un élément de modération des températures : nous déplorons cette amputation.

Cet enjeu est à la fois micro-local, dans l’enceinte de la citadelle, local pour la CAPB (il n’y a pas tant de forêt urbaine), et global (lutter contre la crise climatique et la perte de la biodiversité doit s’enraciner dans des situations concrètes, dont l’affaire de la citadelle est un exemple)

Le débat public escamoté

Nous nous attendions, et nous le souhaitons encore, à un débat public à la hauteur de cet enjeu, qui ne se limite pas aux riverains de la citadelle.

Mais : Une enquête publique discrète, pas de réunion publique d’information, pas de consultation des élus, pas de visite du site.

Nous avons fait ces demandes à la commissaire enquêtrice dès sa première permanence. Sans réponse. Plusieurs élus ont écrit de leur côté au Président de la CAPB pour lui demander une visite du site avec les associations

La recherche d’alternatives

La recherche d’alternatives, en matière de localisation des différents aménagements est un point central pour une demande de de déforestation et pour une demande de dérogation à la protection de certaines espèces. Le dossier passe sur ce point en 1/2 page et quelques généralités peu détaillées (la topographie par exemple).

Il nous semble que la réflexion sur une possible utilisation du site de la base navale Adour pour le bâtiment de commandement de la compagnie SAS Nautique aurait, par exemple, mérité plus d’attention.

La non-recherche d’alternatives doit conduire à un rejet du dossier.

Boisements

Le dossier manque des chiffres précis : quelle est la surface totale initiale (classée et non-classée) ? Quelles sont les surfaces non imperméabilisées, etc. Nous nous interrogeons sur la flexibilité de la surface à déboiser : passée de 2,45 ha à 1,43 ha, mais pourquoi ne pas aller plus loin dans la réduction ? – Sur la capacité à trouver 2,76 ha supplémentaires de bois à classer, et pas plus.

Gestion des eaux pluviales

Un projet exemplaire aurait recours à des solutions innovantes, comme de la désartificialisation, de la densification. Et particulièrement une gestion écologique des eaux pluviales, basée sur les zones humides et l’infiltration, comme l’Institution Adour (SAGE) le recommande… pour l’avenir.

Analyses complémentaires

– Nous souhaitons qu’une analyse initiale bactériologique soit effectuée sur la sortie de l’exutoire Adour, à marée basse au lendemain d’un épisode pluvieux.

– Nous souhaitons qu’une véritable étude sur les corridors de bruit soit réalisée

– Nous souhaitons que le suivi des mesures adoptées pour la flore et la faune soit régulièrement effectué par l’Office français de la biodiversité et que des communications soient publiées.

Nous souhaitons que les habitant.e.s prennent la parole pour cette enquête.

– Sur le registre papier du dossier d’enquête à la mairie de Bayonne (Urbanisme)

– Auprès de l’enquêtrice qui tient sa dernière permanence le 20 septembre à la mairie de Bayonne.

– Par courriel prefamenagement@pyrenees-atlantiques.gouv.fr (à l’attention de l’enquêtrice)

– Par courriel auprès du Collectif 22-Bergeret : 22bergeret@riseup.net

Et aussi

Mon billet précédent faisait une lecture critique plus détaillée du dossier d’enquête :

Le dossier d’enquête est accessible sur le site de la ville :

ici https://www.bayonne.fr/ma-mairie/enquetes-publiques-et-concertations

A la suite de la conférence de presse, un officier et le maire de Bayonne ont réagi dans le journal Sud Ouest du 13 septembre.

Le lieutenant-colonel Michel Charette, conseiller infrastructures au sein du régiment d’élite, évoque une procédure qui suit son cours. « Le projet qui est présenté est mûri depuis 2016 et a été amendé à plusieurs reprises. Nous avons tout fait pour que l’impact environnemental soit le plus réduit possible », assure celui qui suit le dossier de près.

Il rappelle que le dessein a fait l’objet d’une concertation préalable du public, début 2024. Certaines des opérations envisagées demandant une mise en compatibilité du Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi). « Nous sommes soumis aux mêmes règles d’urbanisme qu’un propriétaire lambda. »

Néanmoins, le centre d’entraînement des forces spéciales étant identifié comme un « point d’importance vitale », celui-ci est dispensé de certaines « démarches ». L’organisation de réunions publiques pour informer le voisinage, en fait partie.

« Le projet envisagé est une opération d’intérêt national, il est donc dérogatoire au droit commun. C’est l’État, et lui seul, qui a la main sur cette opération. La Communauté d’agglomération Pays basque et la Ville de Bayonne ne sont là que pour émettre un avis », expose le maire et président de l’Agglo, Jean-René Etchegaray. Le Conseil municipal devrait rendre le sien, d’avis, au terme de la procédure légale. Toutefois, l’action de la municipalité n’aurait pas été neutre. « Son rôle a été de minimiser l’impact sur les surfaces boisées classées », relève l’édile. De 2,5 hectares, la surface à raser serait ainsi tombée à 1,5 hectare.

Patrick Petitjean 13 septembre 2024

Réaménagements à l’intérieur de la citadelle Bergé

Derrière l’enceinte militaire de la citadelle Bergé, des aménagements (nouvelles constructions et installations, déforestation, gestion repensée des eaux pluviales, …) se préparent dans une relative discrétion, alors que les implications sur l’environnement sont importantes. Une enquête publique vient de débuter le 20 août, pour un mois. L’opportunité, pour les associations comme pour tous les habitants, de s’intéresser à ce qui se passe derrière les grilles de l’enceinte.

L’enquête se fait sous la responsabilité de la Préfecture, représentant l’armée et le régiment 1er RPIMa, maître d’ouvrage. La mairie est chargée de l’organisation concrète. Le dossier (un bon millier de pages) est accessible sur les sites de la Préfecture et de la ville, ainsi que sous forme papier au service d’urbanisme de la ville à la mairie. Un registre papier y permet de recueillir les avis, qui peuvent aussi être envoyés par courriel. Par contre, aucune réunion publique n’est prévue.

Une enquête publique discrète

Le minimum légal

L’information sur cette enquête est restée à son minimum légal : annonces dans les journaux cet été, affichettes à la mairie et au voisinage de la citadelle, information sur le site de la ville. Les petites affichettes jaunes, utilisées pour toutes les enquêtes publiques, sont célèbres pour être en réalité « invisibles » pour les habitants, même riverains.

Pour la citadelle (hormis celles à l’intérieur de l’enceinte), 4 affichettes ont pu être repérées, peu visibles : sur l’entrée (fermée) au bout de l’avenue De Lattre de Tassigny, après une barre de logements HSA) – sur l’entrée (fermée) chemin des Hausses – au carrefour Matras – à l’arrêt Citadelle du tram 2. Mais rien vers Otosokop, ni vers l’Atalante et le quai de Lesseps.

Une bizarrerie : pour la concertation préalable (obligatoire avant toute enquête publique) qui s’est déroulée en janvier dernier, le dossier était aussi accessible au siège, et sur le site, de la CAPB, pas seulement de la ville. Un registre dématérialisé avait été mis en place pour recueillir les avis, ce qui n’est pas le cas pour l’enquête. Il n’y avait pas eu non plus de réunion publique. Pourquoi une telle marche arrière ?

Les plates formes internet sont certainement très insuffisantes, et nombre d’habitants n’en est pas familier. Mais, là encore, au contraire de la concertation préalable, il n’y a même pas de registre dématérialisé pour les remarques et contributions. Il faut venir à la mairie, ou envoyer un courriel. Un registre dématérialisé permettrait de réagir aux différents avis déjà formulés. Cela ne remplace pas les échanges de vive voix, mais permet d’interagir.

Un enjeu pour toute la ville

L’enquête publique aurait du davantage s’adresser à tous les habitants de Bayonne, et pas seulement les riverains immédiats, ou les personnels militaires de l’intérieur de la citadelle. C’est une des ares forêts urbaines de la ville, un poumon vert, dont l’impact sur la biodiversité va très au-delà de l’enceinte

Le déboisement est important (1,43 ha, sur les 13,39 ha d’espaces boisés classés (EBC), plus les surfaces boisées non classées). La citadelle, son architecture et son paysage font partie du patrimoine de la ville dans son ensemble, comme souligné dans le dossier, avec nombre de photos prises depuis la rive gauche de l’Adour.

Cela concerne particulièrement le quartier Saint-Esprit, entre le pont Grenet et le pont du chemin de fer. La citadelle est une partie importante de la continuité boisée avec les collines de l’autre côté de la rue Maubec (Rail bayonnais, Caradoc) et de l’avenue Grenet (Amade).

Bord de la citadelle depuis la rue Maubec – sans doute près de l’endroit du futur bâtiment d’hébergement

Les élus à l’écart ?

Même si cette enquête publique se fait sous la responsabilité du Ministère des Armées, il est difficile de comprendre pourquoi les élus sont à ce point tenus à l’écart, du moins en l’état des informations quand ce billet est publié. Le bilan de la concertation préalable ne leur avait pas été communiqué, comme de coutume pour les enquêtes dont la CAPB a la maîtrise.

Pour l’enquête publique, ni le conseil municipal ni le conseil communautaire, n’ont été associés à l’enquête, ne serait-ce que pour avis. C’est d’autant plus une lacune que la CAPB a la compétence urbanisme. Consultée avec toutes les « personnes publiques associées », la CAPB l’avait d’ailleurs préconisé, de même que le représentant du pôle environnement du contrôle général des armées lors de la réunion des PPA du 5 avril 2004.

Un projet conséquent, voire lourd

Les différentes parties du projet

Elles sont ainsi présentées dans le dossier :

* Aménagement de deux bassins de rétention pour les orages, au Nord Ouest, le long de l’avenue Grenet, avec déboisement de 0,46 ha d’EBC

capture d’écran. 0091 est le stand de tir. En bleu, les futurs bassins de rétention; Au Nord-Ouest

* Construction d’un atelier de réparation des véhicules du régiment et construction d’un bâtiment « multi-technique », au Nord, le long de l’avenue Grenet, avec déboisement de 0,95 ha d’EBC

* Construction d’un bâtiment d’hébergement de 90 places, à proximité de l’entrée Est, avec déboisement de 0,06 ha d’EBC

* Construction d’une structure d’entraînement au combat en site urbain, dans les douves de la citadelle, à proximité des équipements sportifs

* Construction d’un bâtiment de commandement, sur un plateau en point haut de la partie centrale, à l’Ouest de l’étoile historique de la citadelle

* Reconstruction des hangars destinés à abriter des véhicules tactiques, au Nord de l’étoile

* Rénovation d’un bâtiment de formation au coeur de l’étoile

L’opportunité du projet et son adaptabilité

La première question qui devrait être celle des enquêtes publiques, mais qui est rarement posée ouvertement, c’est : quelle est l’opportunité du projet enquêté ? Avec comme corollaire : quelles alternatives ont été recherchées et écartées ?

Le dossier ne cache pas un niveau élevé d’atteintes à l’environnement sous différents aspects, j’y reviendrai. L’« intérêt général » est-il suffisamment établi pour justifier de telles atteintes ? Le dossier présenté n’est pas convaincant.

Il est évidemment pratiquement impossible de juger de la nécessité des nouvelles installations militaires : l’armée est en dehors du débat public. Cependant, le dossier passe rapidement sur la recherche d’alternatives de localisation, qui sont écartées sans beaucoup d’explications. Il y a plusieurs domaines militaires peu éloignés de la citadelle, notamment la base navale de l’Adour. Pour le nouveau bâtiment d’hébergement, il aurait pu être intégré au nouveau quartier civil de la citadelle, en pleine reconstruction et extension. Le caractère économe ou vorace en surface imperméabilisée des bâtiments projetés n’est pas discuté.

La localisation du champ de tir dans la citadelle, en pleine ville, pose d’ailleurs déjà un problème de bruit important, pour les riverains, mais aussi dans tout le centre ville et les hauts de Bayonne.

Les marges de manœuvre existaient, et existent sans doute encore, notamment pour la déforestation : entre la concertation de janvier et l’enquête publique, plus de 1 ha de déboisement a été évité…

Questionnements

Le projet comporte beaucoup de nouveaux bâtiments sur les 43,8 ha dans l’enceinte militaire, dont 13,39 ha actuellement en espace boisé classé. Mais quelle surface en espace boisé non classé, en espaces verts ? Pour compenser les 1,43 d’EBC défrichés, il a été possible de trouver 2,76 ha de boisements non classés à classer : il y a donc de la réserve forestière. Quelle surface déjà imperméabilisée et quel surplus d’artificialisation en plus des 1,43 ha d’EBC défrichés ? A ce niveau, les chiffres du dossier sont incomplets ou peu clairs.

Vu de l’avenue Grenet. On aperçoit des bâtiments derrière le rideau d’arbres

Le dossier présente aussi un handicap important : l’essentiel est constitué d’études faites en 2021 et 2022 pour la concertation préalable. Depuis, certains aspects ont beaucoup changé, notamment une moindre déforestation. Dès cette époque, l’autorité environnementale et d’autres organismes d’État avaient avancé des réserves et des suggestions. Comment en a-t-il été tenu compte ? Il aurait été intéressant qu’un tableau récapitulatif soit fourni, avec les suites données.

Pour une gestion écologique des eaux pluviales

Chemin des Hausses

Le premier projet date de plus de 10 ans, et concernait la gestion des eaux pluviales, clairement inadaptée : la SNCF et les riverains du chemin des Hausses, en contrebas vers l’Ouest, subissaient régulièrement des inondations en cas d’orages importants. Les bâtiments se sont ajoutés au fil des années, et les projets initiaux des bassins de rétention ont beaucoup évolué. Il y a maintenant moins de bassins de rétention, ils sont enterrés. Le dossier n’a plus bougé sur ce point entre la concertation et l’enquête.

En ce qui concerne la gestion des eaux pluviales, la Commission Locale de l’Eau du bassin Adour à travers sa cellule SAGE (Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux) s’était étonnée qu’une approche écologique, s’appuyant sur les zones humides et l’infiltration, n’ait pas été choisie. Même avis pour le Conseil National de Protection de la Nature. La construction des bassins enterrés va provoquer à l’inverse une artificialisation supplémentaire de 3 ha, dont 1 ha de déboisement d’EBC. Et donc du ruissellement supplémentaire. Globalement, les zones humides vont perdre 2,6 ha (soir 25 % de celles dans l’enceinte), et la cellule SAGE s’était également inquiétée des mesures de compensation pour cette destruction.

Cet aménagement avec de nouveaux bassins semble contre-productif. C’est un enjeu qui aurait nécessité d’être repris à la base, avec une mise à jour du schéma des réseaux pour les eaux usées et pluviales, une étude sur les facteurs qui influent (et influeront) sur la qualité des eaux de ruissellement qui finiront dans l’exutoire de l’Adour : habitants, véhicules, installations classées, etc.

Déforestation

Le projet présenté lors de la concertation prévoyait la déforestation de d’espaces boisés classés (EBC), sans parler des non classés, répartis dans 3 secteurs : 0,46 ha à l’Ouest pour les bassins de rétention, 1,44 ha au Nord pour différentes constructions, 0,6 ha au Sud Est pour deux bâtiments d’hébergements. Soit au total 2,45 ha.

Après la concertation, un des deux bâtiments d’hébergement a été repoussé à des jours (financiers) meilleurs, et ne restent que 0,06 ha à défricher. Pas de modification substantielle pour les bassins. Mais, et c’est la cerise sur le gâteau, le maire avait écrit, dès avant la concertation de janvier, pour demander qu’un rideau d’arbres soit préservé dans la partie Nord, le long de l’avenue Grenet, sur une profondeur de 40 mètres « au moins », au lieu des 13 mètres prévus dans le projet. Le maître d’ouvrage s’est empressé de donner son accord, en retenant 40 mètres. D’où une diminution de 0,5 ha du défrichement. Un rideau utile pour cacher le défrichage sur la profondeur ?

En bonne communication, le document qui sert de préambule au dossier met le focus sur cette baisse du déboisement des EBC, ainsi réduit à 1,43 ha.

Rideau d’arbres un peu troué vu du chemin du lavoir, côté Est de la citadelle

Qui plus est, il y aurait un classement plus important de nouvelles surfaces boisées 2,76 ha d’EBC seront ajoutés, au lieu de 2,45 dans le projet de janvier. Là, on est franchement dans le rideau de fumée. Le reclassement concerne des arbres déjà existants : cela ne change rien. Le déboisement est une destruction physique d’arbres existants, l’un ne compense jamais pas l’autre, même si cette artifice administratif est fréquemment utilisé dans les projets immobiliers artificialisants.

Espèces protégées… mais menacées

Dans le dossier, figure une études très détaillée(plusieurs centaines de pages dans le dossier pour l’autorisation environnementale) sur l’état faune / flore à l’intérieur de la citadelle, localisant très précisément les différentes espèces animales et végétales, leurs biotopes, les lieux de halte ou de nidification des oiseaux de passage. L’inventaire, très complet, révèle une biodiversité très riche.

On trouve parmi les espèces protégées et menacées : 2 végétaux (le Lotier velu et la Scille printanière) ; 27 des 34 espèces d’oiseaux repérés, dont le Verdier d’Europe, le Chardonneret élégant et le Gobemouche gris qui y ont des espaces de nidification ; 2 amphibiens, le Triton palmé et l’Alyte accoucheur ; un reptile, le lézard des murailles ; un insecte protégé, le Grand capricorne ; l’écureuil roux et le hérisson d’Europe comme mamifères ; sans parler de nombreux chiroptères, dont le Noctule commune, et le Grand noctule.

Des dizaines d’espèces sont impactées par la déforestation, la perte de zones humides, l’artificialisation supplémentaire, la destruction de leur habitat, dont un nombre important d’espèces protégées. Cela rend obligatoire une demande de dérogations pour s’affranchir des protections.

Ces dérogations sont accompagnées, c’est aussi obligatoire, par un catalogue de mesures dites ERC (Eviter, Réduire, Compenser). Le rapport de l’Autorité environnementale porte une appréciation positive sur les propositions du maître d’ouvrage, dont la liste est donnée : 1 évitement, 9 réductions, et seulement 4 compensations, toutes à l’intérieur de la citadelle. Dans la plupart des dossiers de ce genre, les compensations sont majoritaires, souvent éloignées du site, et souvent bidon. Ce n’est pas le cas ici.

Depuis cette étude, la réduction sensible des déboisements prévus devra sans doute modifier cette liste. Cette mise à jour n’est pas faite dans le dossier soumis à enquête

Quand on déstabilise un biotope, il reste difficile de savoir comment il va se réorganiser. La période des travaux a aussi son propre impact. La réalisation des mesures de compensations est propice à des surprises. Tout cela nécessite un suivi régulier, notamment pour les espèces protégées, qui devrait faire l’objet de communications publiques régulières, à défaut d’un comité plus formel.

A suivre

Plusieurs associations (le CADE, le Collectif 22-Bergeret, Vue d’ensemble,…) sont déjà intervenues, ou vont le faire, sur ces différents aspects du dossier auprès de la commissaire enquêtrice. En particulier, un débat public et une visite du site ont été demandés. La réponse est attendue sur le contenu du dossier comme sur ces demandes.

J’aurai l’occasion d’y revenir à la lecture des réponses et du rapport final de la commissaire.

Patrick Petitjean, 3 septembre 2024

Bayonne. Les bois du Sequé 4. Promenade en photos

Promenons-nous dans les bois du Sequé pendant que le bulldozer n’y est pas

Le projet d’urbanisation du Sequé 4 a définitivement été adopté par le conseil de la CAPB le 15 juin dernier. Les immeubles du Sequé 3 ne sont pas encore sortis de terre. Mais les buldozers ont déjà raser la zone il y a 2 ou 3 ans. Alors, avant que les machines n’entrent en action, voici une série de photos prises début juin sur l’emprise du projet.

(photo) vue d’ensemble.

Logement vue aérienne écoquartier du Séqué à Bayonne. Bayonne le 07/02/2024

Pour commencer, une vue d’ensemble du Sequé : au premier plan, le Sequé 2, avec l’habitat participatif Terra Arte et les résidences Bouygues. En haut à gauche, le Sequé 4, à défricher. A droite, derrière les arbres qui font face à Terra Arte, un petit coin de la friche de Sequé 3. En haut, à droite, le Sequé 1 avec la maison de quartier, une partie des immeubles.

On distingue au centre, en haut, le toit rouge de la seule maison (occupée) existante dans le périmètre Sequé 4.

Direction vers le sud-est. On commence par prendre une sorte de chemin le long de cette maison, qui part vers la partie la plus boisée, jusqu’à la lisière.

On longe la lisière, et on s’enfonce dans des sous bois

On suit une ersatz de sentier parallèle et en surplomb du ruisseau des Anges, que l’on peut entre-apercevoir. D’après le dossier, le ruisseau reste pour l’essentiel extérieur au périmètre du projet

Au fond, coule un ruisseau dont on voit quelques passages

C’est peu praticable, on rebrousse chemin, on longe au nord la rue de Loustaounaou, on repart vers le sud et le centre de la parcelle, où l’on aperçoit les vestiges d’une cabane en lisière de la forêt derrière laquelle coule le ruisseau des Anges. On oblique vers le nord-ouest et on passe à côté d’un arbre remarquable (?). On arrive en lisière nord ouest du périmètre Sequé 4 où passe une ligne HT

Un champ attend d’être coupé. On voit une partie très boisée en direction du ruisseau, et plus simplement végétalisée en direction de l’Ehpad.

vers la rue Loustaouanou et l’Ehpad
Vers le ruisseau des Anges

La carte qui suit, publiée dans le document de présentation de la mise en conformité du PLU permet de se repérer. On y distingue la maison au toit rouge qui ne survivra pas au projet.

Cette carte est surtout intéressante, car elle visualise la zone boisée réellement existante, non protégée, destinée actuellement à l’urbanisation. Tour de passe passe habituel, malhonnête. Sur le papier du PLU, une petite partie sera baptisée « naturelle » (en vert sur la carte), sans que cela ne change rien à son existence. Ce reclassement traduit seulement une renonciation à sa déforestation. Jusqu’à quand ?

Selon le rapport de présentation du projet (p.75), le périmètre à urbaniser représentait 5,16 ha. Il va diminuer de 12 % : 0,62 ha de zone naturelle. Il reste 4,54 ha à urbaniser.

Mais qu’on se rassure : la CAPB va laisser des espaces verts en plaine terre, à la hauteur de 50 % de la surface. Plus que ce qui est généralement fait. Moins d’artificialisation donc.

Limiter les dégâts dans le cadre d’un logiciel politique destructeur pour l’environnement n’est pas un avenir souhaitable.

Patrick Petitjean 26 juin 2024

RDA à Bayonne (2) : la CAPB dessine ses plans

Le « socle commun » entre les variantes, deuxième partie du document présenté le 20 mai, permet de découvrir le noyau dur des choix d’aménagement du nouveau quartier rive droite de l’Adour. Les cartes, notamment la synthèse, permettent de les visualiser. En voici quelques unes, commentées. Il y 7 sous-parties : les principes directeurs, le projet de paysage, un quartier pour 3 séquences, la résilience, la stratégie des mobilités, formes urbaines et patrimoine, programmation mixte.

Note : toutes les images sont reprises du document distribué lors de l’atelier public du 20.5

Dans le 1er billet, la question de la « résilience », à savoir l’adaptation aux risques d’inondation, avait déjà été traitée, il n’en sera pas question cette fois, mais elle reviendra dans le 3e billet sur les deux variantes proposées.

Synthèse

En commençant par la fin, la diapo de synthèse, permet de voir les différentes pièces du projet et de rendre plus lisible les diapos des sous-parties. Sur cette synthèse, on visualise :

– 1 400 nouveaux logements, au centre du nouveau quartier, avec un épannelage, à savoir des hauteurs de plus en plus grandes quand on s’éloigne de l’Adour. Et au centre « une petite polarité de proximité ».

– L’ouest du quartier protégé des eaux ; dans le front bâti actuel quai de Lesseps, seul le bâtiment de la manutention militaire serait conservé, le reste est reconstruit dans une mixité de fonctions.

– La promenade actuelle le long de l’Adour entre les deux ponts est élargie, prolongée vers la « Pièce noyée », et rebaptisée « jardin ». Un nouveau jardin de la Citadelle est créé, sur toute la profondeur, au pied du bâtiment militaire.

– La circulation est bannie du quai de Lesseps et renvoyée vers une rue traversante, le long de la voie ferrée, dans la continuité de la rue Sainte Ursule.

– Après le pont Grenet, l’avenue est transformée en « boulevard urbain », avec suppression du rond-point, et nouvelles constructions à niveau, avec un socle tertiaire.

– L’Université n’est pas localisée dans cette synthèse : dans une variante, elle est sur pilotis dans la Pièce noyée à l’Ouest, dans l’autre à l’Est à côté du Didam.

Les principes directeurs

C’est presque poétique, c’est très beau, mais pas réellement opérationnel. J’y retiendrai trois choses :

– L’affirmation qu’on sera dans le centre ville : ce qui pose la question de ce qui fait centre ville (la densité des commerces et des lieux de sociabilité?) et, a contrario, ce qui différencie des autres quartiers (dortoirs?).

– La pétale « nouveau quartier » est réduite à ce qui est à l’ouest de la Citadelle, et, inversement, Saint Esprit étendu jusqu’à la jonction de la rue Sainte Ursule et du quai de Lesseps.

– Cette trame urbaine croise une trame paysagère (verte) qui va de la Citadelle aux jardins des Remparts (sur une autre diapo)

– La liaison entre les pétales se fait par la « Promenade des berges », déjà existante.

Cette autre diapo (qui est la seule de la partie « séquences ») précise ces pétales. L’extension de Saint-Esprit est baptisée « pôle mixte et faubourien » ? Pourquoi pas. Cela ne dit rien de l’articulation avec le reste de Saint Esprit et le quartier de la gare.

En contrepoint, la 4e pétale devient un « quartier résidentiel apaisé », avec au centre la « petite polarité » pour les commerces de proximité, marquant bien la priorité logement.

Et surtout, apparaît pour la première fois, une « entrée de ville vitrine », du côté du boulevard Grenet, avec un « pôle culturel de grande envergure ». Et là, il y a de quoi beaucoup, beaucoup s’inquiéter. Une pétale du centre ville, avec une entrée de ville (en plus, on oublie le quartier Saint Bernard, après la pièce noyée) ? Les entrées de ville sont le plus souvent des catastrophes. Quand au pôle culturel de grande envergure, s’agit-il de ressortir un vieux projet de Zénith, sur la friche Duprat ? Avec ce que cela amène comme circulation automobile ? Un Pôle culturel, localisé de plus à l’opposé du Didam et de l’Atalante ?

Cette 3e « ambiance / séquence », « entrée de ville vitrine », paraît une bien mauvaise idée, et dangereuse.

Le Port de Bayonne

Avec cette « entrée de ville » se pose la question du Port de Bayonne, actuellement et de manière prospective. A l’ouest de la Pièce noyée (en vert sombre sur la photo précédente), débute la zone du Port de Bayonne propriété de la Région. La Région a adopté un plan de développement du Port à court et moyen terme sur la zone de Saint Bernard à Bayonne, divisée en 3 sous secteurs, avec au centre la partie habitée « Saint Bernard » (qui comporte aussi tout un ensemble de jardins ouvriers). A proximité de la Pièce noyée, ce sont, et seront, des activités portuaires « légères ». Par ailleurs, quand la Région a vendu la « Pièce noyée » à la CAPB, une clause précise qu’aucun logement ne doit y être construit, en prévisions d’éventuels conflits de voisinage.

Qu’en sera-t-il des projets du Port de Bayonne quand le nouveau quartier sortira de terre dans 10 ou 15 ans ? Comment évolueront-il ? L’articulation entre le nouveau quartier et le Port, et à plus forte raison la situation à 10 ou 15 ans, semblent relever d’une sorte d’impensé.

En particulier, on peut poser la question d’une sorte de « ceinture maraîchère », en liaison avec les potagers de Saint Bernard. L’agriculture urbaine est pour l’instant totalement absente du projet d’aménagement alors que cela relève de la biodiversité et de l’adaptation au réchauffement climatique. Ce ne sont pas 2 ou 3 jardins partagés au milieu des immeubles qui pourront en tenir lieu.

Un quartier résidentiel

Il n’est pas de bon diaporama d’urbanisme sans camembert. Celui-là montre la mixité voulue pour ce quartier, et ses limites.

77 % des surfaces pour le logement, sans que puisse être définie à ce stade la répartition des 1 400 logements entre locatif social, propriété (sociale ou non), habitat spécifique, en dehors de 200 logements étudiants. « Mixte » est un mot valise, et peut recouvrir des projets opposés. La nature de ce « résidentiel » reste à définir.

18 % pour les équipements, dont la moitié pour l’université, 1/4 pour la culture (dont le grand équipement?). Il reste 14 % pour des équipements de proximité (les écoles et crèches y sont comptées) ; 5 % pour un pôle social (comme La Table du Soir et le Point Accueil Jour) ; et 6 % pour commerces et restaurants.

5 % est ce qui reste pour la « ville active », donc les artisans. L’économie sociale et solidaire n’est pas fléchée.

Cette répartition ne peut que susciter force interrogations : d’où sort ce chiffre de 1 400 logements, alors que les documents de planification (PADD, PLUi, PLH) sont en en construction ? Cette densité, avec des immeubles en R+9 près de la vie ferrée est-elle justifiée ?

La partie « activités » est vraiment faible pour éviter un quartier dortoir du type Prissé, Aroussets, Séqué (réalisations récentes)… Le pôle social semble minimaliste, avec seulement le relogement (promis) des deux associations de solidarité actuellement dans le quartier, loin d’un quartier « mixte ». Ce n’est pas vraiment un pôle.

Patrimoine et formes urbaines

Comme bâtiment, seule la Manutention militaire, quai de Lesseps, serait conservée. Tout le reste du front bâti serait détruit, y compris certains immeubles typiques, ou porteurs de l’histoire maritime du quartier. Et ce, contrairement aux souhaits exprimés lors des ateliers de concertation. Priorité à de nouvelles surfaces de constructions, pour y mettre, selon les variantes, l’Université elle-même ou les logements étudiants.

On attend toujours d’ailleurs le résultat du travail de l’association Plateau urbain, bénéficiaire de plusieurs marchés pour y faire de l’urbanisme transitoire.

Güller & Güller sont, d’une part, dans une démarche de « réinterprétation du patrimoine », centrée sur les formes urbaines (voir photo) : la rythmique de la trame urbaine (?), la « silhouette du bâti historique » (?), selon leurs termes.

Les hauteurs du côté de Saint Esprit (R+3 à R+5) sont supposées conserver ces formes… bien que la proposition soit illustrée par une photo des quais du Petit Bayonne.

Pour la partie résidentielle, l’épannelage consiste à avoir des hauteurs R+3 du côté de l’Adour à R+9 du côté de la voie ferrée.

D’autre part, le paysage est ce qui fait davantage patrimoine dans ce quartier, avec l’Adour, la Citadelle avec ses massifs arborés et son lien au fleuve et les perspectives vers la rive gauche : voir la photo suivante.

Le projet paysage

C’est la sous-partie qui comporte le plus de pages dans le document. Chacune des séquences du bor de l’Adour a droit à une description précise, Avec même 2 pages pour le quai festif : « un lieu de rencontre faisant charnière entre Saint Esprit et le nouveau quartier », avec un « jardin linéaire de 25 à 30m de large ». L’idée de quai festif trouve sans aucun doute sa source dans le bar extérieur de l’Atalante.

On trouve de beaux arbres bien dessinés partout. Pour le quai résidentiel, s’y ajoutent divers agrès sportifs, aires de jeux et détente : toutes chose en partie déjà présentes à cet endroit.

Sur une autre diapo, figurent aussi de belles pénétrantes vertes et bleues, de l’Adour vers l’intérieur du coeur du nouveau quartier.

Arbres dessinés et paysage tiennent à distance les véritables enjeux environnementaux que pose ce projet. Certes, il est précisé qu’il y aura, pour un peu plus de 17 ha, 60 % d’espaces bâtis pour 40 % ouverts, dont la plus grande parte (5,7 ha) en espaces verts (une forme de nature artificialisée).

Même à ce stade d’un plan guide, un diagnostic de l’artificialisation actuelle, un inventaire de ce qui friches (plus ou moins artificialisées), sols dégradés non imperméabilisés (emprises SNCF en particulier). Sans parler d’une étude environnementale sur la faune et la flore, qui peut révéler des surprises. Cela viendra sans doute dans une phase plus opérationnelle, mais il est toujours surprenant, et de plus en plus, de faire de grands projets comme si les questions environnementales et de biodiversité étaient des variables secondaires d’ajustement final.

Mobilités

Il y a là des choses peu contestables : supprimer la circulation sur le quai et la reporter sur une seule rue à double sens (pour desservir la gare) le long de la voie ferrée ; pas de stationnement pérenne en surface ; des parkings en silos pour les habitants ; des voies de desserte pour résidents et services à l’intérieur du quartier. Proposition est faite que tout serait en zone 30, mais cette limitation a de bonnes chances d’être obligatoire dans toutes les villes à échéance de 10 ans.

Il et même proposé que le Pont Saint Esprit soit mis en sens unique pour une seule file de voitures vers la gare, pour laisser place aux vélos et aux bus sur la chaussée, laissant les trottoirs aux piétons. Ce que demandent a minima les associations de cyclistes et de piétons dès aujourd’hui, demande à laquelle la ville refuse de donner suite.

Un bus est prévu sur la rue qui longera la voie ferrée (il y en en déjà un sur le quai aujourd’hui), pas un mot sur une navette fluviale (pourtant demandée lors des ateliers). Une passerelle (piétons et vélos) entre le futur jardin de la Citadelle et le jardin Cassin n’est pas exclue…

Reste la question la plus délicate : le boulevard Grenet, devenu urbain et avec un carrefour à la place du rond point. Comment traiter les 40 000 voitures qui prennent actuellement ce boulevard et le pont, pour aller vers le boulevard du BAB ? Bonjour l’attractivité des immeubles le long du boulevard.

Dans les ateliers, on a entendu la proposition d’un nouveau pont plus en aval, un serpent de mer. Mais qui entrerait en contradiction avec l’objectif officiel de réduire la circulation automobile dans l’agglomération.

Un parking relai, au niveau de la pièce noyée, sur pilotis, complétée par une navette vers la rive gauche, permettrait-il d’arrêter une parte de la circulation dès le bas de la colline de la citadelle ?

Le plan guide est muet sur cet enjeu.

Au final

Les premières impressions sont très insatisfaites. C’est très inégal, parfois superficiel, pas toujours cohérent, avec beaucoup d’impasses. Les variantes (voir le 3e billet) apportent quelques précisions, mais le socle reste un socle.

Il y a du consensuel : l’aménagement des berges de l’Adour, la rue principale repoussée le long de la voie ferrée, la place donnée à une extension de l’Université, l’adaptation aux risques inondations, des logements (mais avec quelle densité et typologies ?)

Au-delà de la pétale du centre ville, quelle vision de ce nouveau quartier pour le vivre ensemble, et faire ville (ou village) et non cité dortoir ?

Des ratés : le patrimoine peu sauvegardé, comme la mémoire maritime ; le maraîchage oublié ; le pôle social très faible, le non traitement de la circulation boulevard Grenet…

Et beaucoup d’autres interrogations.

La deuxième version du plan guide cet automne permettra-t-elle d’aller plus loin avant de s’engager dans les différentes briques du projet ?

Patrick Petitjean, 30 mai 2024

GarbiAir, arbre en métal, gouffre à euros

Planter l’équivalent d’une cinquantaine d’arbres d’un coup, pour capter 30 % des émissions des gaz à effet de serre au pied du pont rouge à Bayonne. C’est ce que la communication de la CAPB voudrait nous faire croire en installant un arbre… en métal capable de réaliser cet « exploit ».

Ou bien est-ce une esbroufe, un gadget tellement ridicule, dont on peut se demander s’il n’est pas contre-productif en matière de communication municipale.

Transition écologique à toute vapeur

Cet arbre, nommé GarbiAir a été installé début janvier près du pont rouge, qui voit défiler près de 50 000 véhicules chaque jour. Avec donc une pollution considérable malgré le côté venteux de l’estuaire. Il a fait l’objet remarques ironiques lors du dernier conseil municipal, soulignant le manque de mesures de la pollution atmosphérique à cet endroit.

photo AVAP

L’association Aller en vélo, aller à pied (AVAP), a retrouvé deux autres projets semblables datant de 2017, à Paris (carrefour Alésia) et à Poissy, sans que des bilans en aient été tirés.

https://avap-pbsl.blogspot.com

Mais ce projet est différent, il est basque : la start-up « Bromalgue » est située à Barakaldo, au Pays basque sud. Un autre arbre à carbone est situé à Bilbao. Côté nord, c’est la société E.T.C International, située à Saint Pée sur Nivelle, qui promeut le projet, avec la CAPB. Un étudiant en licence du lycée professionnel de Saint-Pée procédera aux relevés réguliers. Lors de l’inauguration, nos élu-e-s étaient en admiration devant cette expérimentation, devant cet esprit innovant. Cette expérimentation devrait durer plusieurs mois, jusqu’à l’été. Et ils n’ont pas lésiné sur les moyens. L’arbre métallique est co-financé par le Gouvernement basque (50 000 euros) et la CAPB (49 000).

L’argent de nos impôts ne saurait être mieux utilisé.

inauguration

Comment ça marche

La fonction de cet arbre moderne est de capter la pollution. Une perspective en phase avec le techno-solutionnisme : capter, pour éviter de réduire.

Cet « arbre » dispose d’une cuve d’eau douce, où des microalgues sont cultivées : elles captent leCO2, pour en rejeter de l’oxygène. C’est le processus que fait naturellement un arbre.

« Évidemment, cela ne remplacera jamais de véritables arbres, mais cela peut venir aider à baisser les émissions mondiales de GES dans certains endroits », estime la biologiste à l’origine du projet. Rien que çà : verra-t-on des forêts métalliques dans le monde entier ?

Et le bilan carbone de l’arbre lui-même ?

Pour ce que deviennent les micro-algues après capture du CO2, le sit de l’AVAP nous livre le schéma : la suite du cycle est bien moins vertueuse, avec le méthane, que son début.

capture écran AVAP

Et si on prenait au sérieux la transition écologique ?

Patrick Petitjean, 27 février 2024

Qui veut tuer les Fêtes de Bayonne ? (3) : Changer de modèle. Ou pas.

(l’An01 de Gébé est paru en 1970 en série dans Politique Hebdo, puis en film et en BD)

Le Collectif 2032 vient de présenter ses 10 propositions au maire. Au même moment, EELV-LE (Bayonne) a rendu publique une tribune prônant une démarche radicale : faire de 2024 une « année blanche » pour laisser aux habitant.e.s le temps de prendre la parole à travers une « convention citoyenne ». Faire des ajustements ou changer de modèle ? Tel est le dilemme soulevé par ces deux démarches.

Fêtes de Bayonne, pour une année blanche

La tribune de EELV-LE

Que reste-t-il de nos grandes Fêtes populaires que nous avons connues ? La course à la fréquentation, la volonté de faire « davantage » que les villes voisines (concurrentes dans l’attractivité touristique), nous conduisent dans le mur, à l’instar de l’édition 2023.

Les Bayonnaises et les Bayonnais aiment les bandas, les penas, le corso, la musique vivante, les cultures basques et gasconnes. Le plaisir de se retrouver ensemble. On aimait leur dimension humaine, aujourd’hui perdue.

Les Fêtes de Bayonne doivent être sauvées, nous, écologistes, y sommes attaché.e.s.

2012

Excédés donc motivés

Aujourd’hui, les Fêtes vont dans le mur : violences, alcoolisation massive, drogues dures, atmosphère machiste, la ville comme toilette publique, la saleté partout. Si les penas permettent un entre soi plus sécurisant, d’autres habitants fuient la ville.

Des habitant.e.s excédé.e.s, mais qui s’emparent du problème, notamment à travers le collectif 2023 et la pétition de « citoyens bayonnais » demandant de repenser les Fêtes en profondeur, sans se limiter à des ajustements de détails, et à faire appel aux habitants. Toutes et tous refusent leur caractère de plus en plus commercial.

2012

Déni et fuite en avant

Le bilan officiel présenté est surréaliste. Il se veut basé sur des « faits et chiffres », sans doute en opposition à la subjectivité des critiques. Tout est à la hausse (on s’en douterait), mais tout s’est quand même bien passé pour la sécurité, les secours, la prévention, l’hygiène et la propreté. Les spectacles et animations, la musique vivante ont été des gros succès. La mort de Patrice Lanies, les violences multiples et sexistes, et l’impact environnemental n’existent pas dans ce bilan.

Si l’augmentation de la fréquentation est reconnue (+ 20% depuis 2019), elle n’est pas vue comme un problème en soi, pour ne pas remettre en cause le marketing territorial, dont le sur-tourisme est une autre conséquence.

Face à cela, il est proposé une extension du périmètre, source inévitable d’une nouvelle augmentation, ou encore un simple changement de dates. Rien qui ne puisse changer la trajectoire « toujours plus » des fêtes, à l’inverse d’une décroissance nécessaire.

2012

Une année blanche en 2024 pour donner la parole aux habitants

On arrête tout, on réfléchit, comme disait Gébé en 1970.

Pour prendre le temps d’élaborer un nouveau modèle de Fêtes populaires, nous n’aurons pas trop d’une année blanche. Elle permettra aussi de « faire choc » pour tenter de dégonfler la participation sans avoir à compter sur l’image négative de l’édition 2023 dans la presse nationale.

On ne saurait se contenter des « consultations » faites à la va-vite par la municipalité auprès des acteurs (économiques pour la plupart) des Fêtes de la commission extra-municipale des Fêtes (les mêmes plus des élus), à peine élargies aux quelques représentants des Conseils de Quartier.

Une « Convention citoyenne pour les Fêtes de Bayonne », sur le modèle de la Convention pour le climat : son travail s’étalerait sur l’année, avec tirage au sort d’habitant.e.s, leur formation, l’audition de scientifiques (sociologues notamment) sur les problèmes soulevés.Tous les aspects des Fêtes y seront examinés, et des alternatives proposées pour les changer en profondeur, leur redonner un sens et un caractère populaire.

Sans exclure une fête en 2024 (sur une journée) pour la conclusion des travaux et la présentation des grandes lignes de l’édition 2025…

Sophie Bussière, Conseillère régionale de Nouvelle Aquitaine & Porte-parole EELV-Les Ecologistes

Mixel Esteban, Conseiller municipal de Bayonne et Conseiller communautaire CAPB

Les adhérent.e.s EELV-Les Ecologistes de Bayonne

2013

Une « année blanche » : un choc nécessaire

Les dérives des Fêtes de Bayonne ne sont pas nouvelles. Cela fait plusieurs années que l’ambiance devenait délétère. Les affichettes contre les violences sexistes, la recherche de zones « safe » par les participants, en témoignent. Les viols, les morts collatérales (accidents de la route, prises de substances) ont déjà existé. Ce qui s’est passé en 2023 n’est pas une surprise, mais un changement de nature, avec la mort de Patrice Lanies. 2023 a été l’année de tous les excès, ce devrait être un point de non-retour.

On aurait pu profiter de la parenthèse des non-fêtes dues au covid pour réfléchir avec les habitants à les reprendre en mains. Mais au lieu de cela, c’est le « business as usual » qui a repris ses droits en 2022 et 2023.

L’« année blanche », c’est donc cela : un choc à la hauteur de ce qui s’est passé.

Et aussi casser la spirale de la surfréquentation.

Et enfin, et surtout, prendre le temps pour que les habitants.e.s s’emparent de l’impasse des Fêtes actuelles, et proposent un nouveau modèle.

C’est tout cela que la municipalité cherche à étouffer : tirer un véritable bilan « politique » du modèle actuel, traiter la surfréquentation à sa racine, et faire confiance aux habitants.

Le débat annoncé pour le 4 décembre au conseil municipal a été supprimé. Mais soyons sûrs que lors du prochain conseil municipal le 14 décembre, le débat resurgira à l’occasion d’une délibération sur le budget des Fêtes

Les propositions du Collectif 2032

Comme annoncé au moment de sa création fin septembre, le Collectif a remis début décembre ses propositions « concrètes » au maire. Voulant léguer aux générations futures des Fêtes « pleinement améliorées » il indiquait « Nous voulons contribuer à apaiser la rue, à mettre les habitants et la culture locale aux coeur des festivités, à responsabiliser les festayres et réduire l’impact écologique des Fêtes ». A tort ou à raison, il s’en est strictement tenu à ce programme.

2014

Parmi les propositions

Elles sont au nombre de 10, à mettre en œuvre dès 2024.

En premier lieu, pour apaiser la rue, « une application des Fêtes pour communiquer, alerter, prévenir, orienter », c’est-à-dire un outil pour mettre en lien les acteurs des Fêtes, les aider à réagir « en cas d’incident et se coordonner avec le PC sécurité ». Une proposition particulièrement poussée par le représentant de l’UMIH (Union des métiers et de l’industrie de l’hôtellerie » et par les Penas (le GAB, Groupement des Associations bayonnaises).

Puis, le développement des campagnes de prévention, avec un « protocole reconnu de tous ». Et, à la suggestion du Gaztetxe Zizpa, un objectif particulier avec les lieux de vie des jeunes, universités et établissements scolaires.

Ensuite, le déplacement de la fête foraine vers le Champ de Foire, une option déjà envisagée par la mairie, et poussée depuis plusieurs années par l’association « Carré des résidents » (Petit Bayonne), mais rejetée par les forains eux-mêmes.

2011

Et encore, une « expérimentation » : l’« absence de sonorisation extérieure » le jeudi 11 juillet 2024 jusqu’à 15h, ce qui semble avoir laissé sceptique le journaliste de Sud Ouest qui a fait le compte-rendu de la conférence de presse.

S’y ajoute la volonté de mettre en valeur la musique vivante (NDR : un souhait consensuel), « mieux répartie dans l’espace ».

Pour le « plus » écolo, le Collectif propose une amélioration de la collecte des déchets et la lutte contre les mictions sauvages (NDR : toujours très consensuel).

Plusieurs associations du Collectif sont déjà membres de la « commission extra-municipale des Fêtes ». La proposition est de réserver 4 sièges pour les jeunes dans cette instance (NDR : ce serait un progrès)

Enfin, il n’est pas favorable au changement de date des Fêtes, 2024 devant rester l’exception.

Les propositions semblent épouser les préoccupations sectorielles des membres du collectif, qui a reconnu lors de la présentation des propositions être formé de « groupes d’intérêts divergents ». Chaque groupe trouve son compte dans au moins une proposition.

Décevant

On pouvait attendre mieux du Collectif 2032, compte tenu de certains de ses membres, et au vu du développement des débats en octobre-novembre. L’UMIH semble avoir donner le là, dans la défense d’un modèle commercial.

On a malheureusement l’impression d’un « pschitt » : pas question d’un nouveau modèle (hormis des généralités sur la musique vivante) ; aucune remise en cause de la course à la fréquentation ; la consultation des habitants a disparu. On est dans l’entre-soi des acteurs économiques des Fêtes.

De manière étonnante EH Bai a apporté son soutien à ces propositions, alors qu’il avait appelé en octobre à « remettre en cause le modèle dans sa globalité » et avait refusé de « cautionner le modèle festif » actuel.

Il faut rappeler aussi que la pétition de « citoyens bayonnais », massivement signée, appelait à repenser le modèle en profondeur » et une « consultation des habitants sur tous les aspects ». Les propositions du Collectif 2032 en sont loin, hélas.

Ce n’est qu’un début, le combat continue pour que les Fêtes redeviennent populaires, des Fêtes citoyennes des habitants et habitantes de Bayonne.

Patrick Petitjean, 7 décembre 2023,

en remerciant Xan Ansalas pour ses photos