Bayonne : la valse des panneaux « cyclistes, pied à terre ! »

On ne sait s’il faut en rire ou en pleurer. Pendant quelques jours cette semaine, aux abords des zones piétonnes du centre de Bayonne, les cyclistes étaient obligés de mettre pied à terre la nuit… Sous peine d’une amende de 150 euros. Une farce ? Mercredi soir, Bizi a recouvert ces 29 panneaux par des posters plus classiques. Un bandeau est ensuite venu corriger les horaires officiels, mais pas l’obligation de mettre « pied à terre ». Une rectification apposée par les services municipaux ?

L’intention était sans doute louable : éviter les conflits entre piétons et cyclistes dans des zones commerciales, dans le centre piétonnisé, quand la foule est dense. Mais la vision de l’usage du vélo par la ville est déterminée par le tourisme : prédominance d’un commerce où l’on fait ses courses à pied, et le vélo est fait pour le tourisme et non un usage quotidien. Et aussi par les lunettes des automobilistes.

La dernière commission extramunicipale sur le vélo fin octobre était consacrée à la question du vélo dans les aires piétonnes, jugée prioritaire par la ville. Cette commission consultative regroupe élus, services et associations concernées. La quasi totalité des élus était absente. Mais aussi, parmi les associations, seules étaient présentes celles des personnes handicapées, des aveugles et des taxis. Les cyclistes n’étaient pas là…

Screenshot

La question du pourquoi des vélos en secteur piétonnier n’était pas posée. Le seul angle d’attaque était la répression, pas la sensibilisation.

Les horaires d’interdiction de rouler en centre ville ont été simplement décalqués de ceux exigés des habitants pour leur voiture.

De là cette injonction absurde : pied à terre la nuit.

On trouve l’arrêté d’interdiction sur le site de Bizi, mais, curieusement pas sur le site de la ville au moment où ce billet est écrit.

capture d’écran de l’article 1 de l’arrêté du 24 novembre

Comme on peut lire, il y a des exemptions : les livreurs « professionnels habilités » (c’est précisé) et PMR (ouf!) : ils n’auront pas à mettre pied à terre, au contraire des cyclistes avec 2 ou 3 enfants ou les vélos cargo.

Les discussions lors de la commission ne semblent pas avoir été très loin.

Mettre en oeuvre un panneau « aire piétonne » clair et perceptible par tous… Mettre des panneaux indiquant que les piétons sont prioritaires… « pied à terre » aussi bien pour les vélos que pour les trottinettes, skates, EDPM.

Effectivement, il est proposé d’expérimenter l’obligation du « pied à terre » dès lors que le secteur piétonnier passe en régime aire piétonne. Il souligne que les habitants du secteur piétonnier ont l’autorisation de circuler sur les plages horaires suivantes : 6h00 à 10h30 et de 19h15 à 22h00.

Ces horaires pourraient être appliqués au « pied à terre » soit l’autorisation de circuler de 6h00 à 10h30 et de 19h15 à 22h00.

Le pied à terre de nuit est débattu. Mais conclusion :

Le pied à terre est maintenu la nuit dans un premier temps.

– Les professionnels circulant à vélo seront autorisés sans contrainte d’horaire

– L’expérimentation aura une durée de 6 mois. Un bilan sera proposé en mai/juin 2026.

L’assemblée valide la proposition faite soit une autorisation de circuler dans l’hypercentre de

6h00 à 10h30 et de 19h15 à 22h00

Réaction immédiate de Bizi

Sitôt ces 39 panneaux apposés en début de semaine, Bizzi a réagi, d’un côté par un appel à la désobéissance : “Nous appelons à désobéir à cette mesure injuste et à continuer de circuler à vélo en laissant la priorité aux piétons. Nous souhaitons une cohabitation respectueuse entre piétons et cyclistes. Mais plutôt que d’interdire les vélos, nous sommes pour mieux faire fonctionner l’aire piétonne existante, par l’installation de panneaux et par toute démarche de sensibilisation qui rappelle que les piétons sont prioritaires dans ce secteur”

Et d’un autre côté par une action « coup de poing » le mercredi soir : le collage de posters sur ces panneaux, avec des préconisations conformes aux usages habituels (le respect des piétons par les cyclistes roulant au pas et non le « pied à terre »).

Faut-il rappeler qu’un.e cycliste avec son vélo à la main au milieu des piétons est lui-même ou elle-même un.e piéton.ne encombré.e et encombrant.e ?

Bizi remarque aussi que l’amélioration des aménagements cyclables autour de la zone piétonne – aujourd’hui très insuffisants – pourrait limiter le transit des vélos en zone piétonne…

photo Bizi

Les horaires rectifiés dans la foulée.

On peut déceler sur la photo suivante qu’un simple bandeau, avec 10h-22h comme horaire de « pied à terre », a été collé en urgence sur les panneaux. Sans doute par les services de la ville, mais on attend l’arrêté conforme sans lequel l’amende la nuit court toujours.

Cela enlève l’absurdité des premiers panneaux, mais maintient l’obligation du « pied à terre ». La philosophie municipale n’a pas changé.

Au final

La ville s’intéresse avant tout au centre ville, alors que les enjeux et difficultés de la politique « vélo » sont autres. Ils nécessitent surtout des interventions sur la voirie, des mesures de prévention et de sensibilisation. Ils sont aussi ailleurs, y compris les conflits potentiels entre piétons et cyclistes.

Les attentes des piétons sont de nature différente de celles, réelles ou supposées des commerçants des zones piétonnes.

A juste titre, Bizi considère qu’il s’agit d’un rétropédalage de la ville en matière de politique cyclable

Patrick Petitjean, 21 décembre 2025

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