La 2563e lettre d’info(x) de la ville de Bayonne

Les Spiritains viennent de trouver dans leur boîte aux lettres le n°2563 de « l’Echo de la Cité », la lettre de désinformation de la mairie de Bayonne. En date du 8 août, ce numéro concerne un projet tombé dans l’oubli depuis un an : le futur quartier sur la Rive Droite de l’Adour (RDA). Son contenu est très creux, mais sa publication était urgente : le 1er septembre, la lettre serait entrée dans les comptes de campagne pour les élections municipales, Un tel chiffre, 2563, nous renseigne aussi sur la communication d’Etchegaray.

La seule annonce nouvelle dans la lettre pour les habitants est la future occupation temporaire de 3 bâtiments du quai de Lesseps avant les prochaines municipales. Peut-être la lettre est-elle le début de la mise en œuvre des marchés publics pour la propagande (communication) sur ce projet RDA, dont j’avais fait état dans un billet il y a deux mois : https://lepimentbayonnais.fr/2025/06/28/960-000-euros-pour-la-communication-rda-et-encan/

L’information municipale bayonnaise comme production d’ignorance et d’opacité

Il y a peu, le 3 février 2025, la lettre n°2445 était glissée dans toutes les boîtes concernant la brigade de nuit de la police municipale. Le 20 février, le n°2455, destiné aux riverains de l’avenue Alsace Lorraine, annonçait des travaux de nuit. Le 3 juin, le n°2532 annonçait aux Spiritains une réunion publique dans le quartier.

Du 3 février au 8 août, soit 6 mois, si la numérotation est fiable, il y a eu 118 lettres de désinfo distribuées à différentes échelles, d’une rue à la ville entière. Soit, en moyenne, plus de 4 lettres par semaine dans un quelconque coin de la ville. Une débauche de papier, de travail des employés municipaux et d’euros.

La multiplication de telles lettres – en majorité ponctuelles – en direction des habitants relève d’une stratégie de communication assumée : une fragmentation totale de l’info municipale concrète, pour empêcher le « faire ville » comme Thatcher déniait le « faire société » à son époque. Ce n’est pas le magazine bimensuel, avec son enjolivement des actions municipales, qui peut former des citoyen-nes informé-es à même de prendre part aux débats municipaux.

Cette fragmentation fait disparaître le « en-commun », le « collectif » et, au final, produit de l’ignorance sur les politiques suivies par Etchegaray. Elle rend la ville opaque.

Par ailleurs, la loi rend obligatoire l’expression des groupes d’opposition dans la communication publique d’une municipalité. Cela se fait dans le magazine municipal, même de manière restreinte. Je n’ai pas remarqué les pages réservées aux oppositions sur le site internet de la ville, ce qui est sans doute illégal. De même, certains des 2563 numéros de l’Echo de la Cité sont certainement susceptibles de relever d’une obligation au pluralisme.

Cette fragmentation est aussi une manière de countourner l’obligation légale du puralisme politique,

Le grand projet RDA

La lettre insiste fortement sur le temps long nécessaire à un projet de cette envergure. L’ambition demande du temps, « patience et méthode ». Mais cela peine à justifier l’arrêt total du projet depuis plus d’un an. 2 ou 3 réunions publiques, des séances avec des écoles, entre le printemps 2023 et juin 2024, des centaines de posts sur un facebook dédié. Puis, plus rien. Aucun post depuis plus d’an an.

Güllet et Güller devaient rendre leur rapport (un plan-guide) il y a un an (et c’était déjà décalé) : mais silence, comblé par un hommage à ces spécialistes de «  l’aménagement en bord de fleuve ».

La patience et le temps long ne viendraient-ils pas plutôt du retard pris dans les négotiations foncières avec l’Etat et la SNCF ? La CAPB ne sait toujours pas de quel foncier elle disposera réellement pour son projet.

La lettre vante un projet d’envergure en « liaison étroite avec les habitants », et dit vouloir « faire émerger collectivement un projet exemplaire enraciné dans les traditions de Saint Esprit ». « De nombreuses réunion (sic pour la faute d’orthographe) ont eu lieu »… Des phrases creuses, de la brosse à reluire pour les habitants et une inflation mensongère du nombre de réunions.

A vrai dire, sans que cela ne transparaisse publiquement, avec une lenteur dictée par les incertitudes, la CAPB avait lancé des études pour un urbanisme transitoire depuis plusieurs années, avec Plateau Urbain, auxquelles il a été difficile d’avoir accès. Ce sont ces études qui ont conduit au projet d’occupation temporaire des 3 immeubles du quai de Lesseps. Voir mon billet, où se trouve une présentation des études de Plateau Urbain. https://lepimentbayonnais.fr/2025/04/20/bayonne-quai-de-lesseps-vers-la-re-ouverture-frileuse-de-3-immeubles-debut-2026/

Trois marchés de maîtrise d’oeuvre avaient été conclus avec Soliha, le 25.10.24, un pour chacun des bâtiments (le 11b et le 14 quai de Lesseps, le 9b/16 quai de Lesseps / rue Sainte Ursule), pour un total de 85 639 euros TTC. Le 4e bâtiment proposé pour une occupation temporaire par Plateau Urbain, la biscuiterie au 17 quai de Lesseps, n’avait pas été retenu. La lettre précise que les appels d’offres pour les marchés de travaux vont être passés à l’automne, et que tout sera livré au printemps 2026 (avant les élections ?).

Pour présenter cette occupation temporaire, la lettre nous raconte une belle histoire, mais mensongère : Pour que « l’attente ne soit pas synonyme d’inertie », la ville et la CAPB ont souhaité faire « une occupation transitoire dans 4 immeubles nouvellement acquis ». Le hic, c’est que ces immeubles ont été acquis voici près de 15 ans par l’EPFL (Etablissement Public Foncier Local) pour le compte de la Ville ou de la CAPB. Comme la CAPB n’en faisait rien, l’EPFL a obligé la CAPB à les racheter il y a un an… récemment donc (!).

La lettre précise que « cette démarche préfigure les dynamiques futures du quartier – notamment dans les domaines du logement étudiant, de la culture, des solidarités – tout en assurant la vitalité du secteur et une prévention active contre le vandalisme et les dégradations ». On est dans la mauvaise foi la plus complète.

Cela fait plus de 10 ans que la Ville laisse les immeubles se dégrader, et n’a pas empêché que les locaux mis à la disposition du « Point d’accueil jour » deviennent insalubres. En guise de prévention du vandalisme » sans doute, la Ville a fait expulser l’association Maurizia qui avait mis en œuvre une occupation temporaire, analogue à ce qui est proposé aujourd’hui.

La lettre présente pour ces 3 bâtiments (dont un double immeuble) les 36 chambres d’étudiants, la ressourcerie, les bureaux administratifs qui étaient déjà dans les marchés de Soliha (voir le billet cité plus haut). Un flou subsistait sur la destination d’un local : la lettre précise qu’il s’agira d’« un atelier d’artistes dédié aux arts visuels ».

Le tout s’accompagne d’un baratin dithyrambique sur le succès de l’Atalante, les entrées record du Didam et les animations du Gaztetxe « qui nous incitent à développer un projet ambitieux pour cette rive ».

Cerise sur le gateau, la lettre promet, pour la suite, à moyen terme, des locaux pour l’association Etorkinekin et des espaces de danse partagés (dans la biscuiterie ?). Gageons que cela se retrouvera dans le programme municipal d’Etchegaray en mars 2026.

Patrick Petitjean, 15 août 2025

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