Du quai de Lesseps (Bayonne) au quai d’Austerlitz (Paris)

Quai de Lesseps au bord de l’Adour à Bayonne, et quai d’Austerlitz au bord de la Seine à Paris : rien à voir à première vue, mais les deux situations sont reliées par l’urbanisme transitoire. Ici, quai de Lesseps, le récent scandale de la manière dont le PAJ est traité et le gâchis des immeubles à l’abandon depuis des années, au mieux destinés à des logements provisoires pour étudiants, loin de l’esprit d’un urbanisme transitoire solidaire. Là, quai d’Austerlitz, Les Amarres, un tiers-lieu solidaire et festif qui va fermer ses portes début juillet

Les Amarres, un tiers-lieu solidaire et festif quai d’Austerlitz

Ce tiers-lieu va larguer les amarres le 5 juillet, après 4 ans d’existence. C’était un « Point d’Accueil Jour », une cantine populaire, le siège d’une douzaine d’associations solidaires. Ce fut un lieu de soir »es culturelles et festives, un lieu de rencontres militantes. Il avait notamment hébergé une rencontre nationale du réseau « maisons accueillantes » à laquelle une délégation d’Etorkinekin avait participé.

Dans son bilan, en forme d’une auto présentation, les Amarres écrivent :

« De 2021 à 2025, les Amarres ont pris vie dans les anciens bureaux du port autonome de Paris, sur les quais de Seine, et sont progressivement devenus un lieu incontournable des luttes pour les justices sociales. Porté par les associations Aurore et Yes We Camp, ce tiers-lieu solidaire et culturel s’est donné pour mission de créer un espace d’hospitalité, de convivialité et de rencontre entre des publics très variés.
Chaque jour, ce lieu unique a accueilli plus de 300 personnes en parcours migratoire (hommes, femmes, enfants), des travailleur·euse·s d’une trentaine d’associations engagées dans l’accompagnement des personnes exilées, et des milliers de visiteur·euses venu·e·s participer à une programmation culturelle engagée et inclusive.
Ce projet a suscité un véritable engouement. De nombreuses associations, collectivités, écoles, entreprises de l’ESS et porteurs de projets sont venu·e·s visiter ce lieu et s’en inspirer. Son équilibre singulier, entre social, culturel et citoyen, en a fait un laboratoire pour imaginer la ville inclusive et solidaire de demain ».

Aurore – un peu l’équivalent d’Atherbea – et Yes We Camp étaient avec Plateau Urbain les moteurs des Grands Voisins à l’ex-hôpital Saint Vincent de Paul, à Paris 14e il y a une dizaine d’années.


Le Point Accueil Jour (PAJ) de Bayonne

Sud Ouest et Mediabask se sont faits l’écho du cri d’alarme lancé par le PAJ le 18 juin, à l’issue de son assemblée générale. Le PAJ accueille des personnes en situation de précarité pour une bagagerie, des douches, des lessives, des recharges de téléphones, de la chaleur humaine. Le PAJ, c’est aussi 80 bénévoles.

Près de 37 000 personnes y sont passées en 2024, presque deux fois plus qu’en 2021 après le covid.

Le PAJ occupe un immeuble traversant entre le quai de Lesseps (l’ancien bar-tabac-PMU Le Vincennes) et la rue Sainte Ursule (le local initial, auquel Le Vincennes s’est ajouté en décembre 2020). A l’image de la plupart des autres immeubles du quai de Lesseps, il était propriété de l’EPFL depuis une bonne dizaine d’années, puis revenu récemment dans le giron de la CAPB. Tous étaient à l’abandon, sans entretien, se dégradant. Un immense gâchis. Certains, comme celui-là servaient de locaux provisoires

Installations électriques vétustes, placards moisis, murs troués, cafards, … des conditions d’insalubrité indignes tant pour les « passagers » que les bénévoles.

Des locaux pérennes avaient été promis par la ville : un pôle social, dans le cadre du projet « Rive Droite de l’Adour » sur lequel elle a beaucoup communiqué il y a deux ans, avant que le silence ne retombe depuis un an. Ce pôle social était promis dans un délai de deux ans, aujourd’hui allongé à 4 ou 5 ans, d’après une affirmation de l’adjoint Arnaud Fontaine à Mediabask. Ce qui est une (mauvaise) plaisanterie, vu que le projet est plutôt annoncé pour 10 ou 15 ans. Une manière de se moquer du PAJ

Urbanisme transitoire ?

Je n’aurais pas parlé de ce tiers-lieu parisien, si le maire de Bayonne ne s’était pas réclamé de l’urbanisme transitoire, en faisant appel à Plateau Urbain pour un aménagement transitoire du quai de Lesseps. Tout en ayant expulsé le collectif Maurizia qui avait squatté un immeuble encore en bon état pour en faire un tiers-lieu. Voir ce billet : https://lepimentbayonnais.fr/2023/05/30/soutenir-le-projet-maurizia/

J’ai présenté le travail de Plateau Urbain, et le « très peu » qu’en avait retenu la ville : des logements étudiants. La ville n’a jamais fait de publicité sur le travail de Plateau Urbain, dès fois que cela donnerait des idées aux associations locales.

Dans ses propositions, il y avait un esprit proche de celui des Amarres, en s’appuyant sur des associations comme la Table du Soir, le Point Accueil Jour, Atherbea, déjà présentes sur le quai de Lesseps. Mais le maire n’en a prtiquement rien retenu.

Voir le billet : https://lepimentbayonnais.fr/2025/04/20/bayonne-quai-de-lesseps-vers-la-re-ouverture-frileuse-de-3-immeubles-debut-2026/

Yes We Camp, partenaire habituel de Plateau Urbain aurait pu mettre en musique un tel projet.

https://yeswecamp.org/

Curieusement, dans la brochure 2025 de Yes We Camp, on trouve la mention d’un travail réalisé à Bayonne pour un cabinet d’architecture, UOA. Ou pour la mairie ? Mais aucune trace nulle part.

Tous les ingrédients des Amarres sont présents quai de Lesseps. Mais que peut-on attendre d’un maire si loin des valeurs qui peuvent être mises en œuvre dans cet urbanisme transitoire ? Vivement que Bayonne puisse respirer.

Patrick Petitjean, 25 juin 2025

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